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Gestion de crise – Quand le ciel vous tombe sur la tête

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Personne n’est à l’abri d’une crise. Se croire à l’abri, c’est un risque colossal.

Pour les actionnaires de l’un des clients de l’agence de communication de crise LaFrenchCom, c’était une fraude massive ayant permis un détournement de fonds d’ampleur mobilisant de nombreux services de police judiciaire. Chez un autre client, c’était un accident mécanique sur une chaine de fabrication industrielle dans une usine SEVESO faisant suite à une maintenance sensible ayant fait une dizaine de victimes et entrainé la mobilisation de milliers de riverains et d’activistes. Au siège d’un autre, c’était une bactérie surprise dans une chaine de restaurants.

La crise, c’est le ciel qui vous tombe sur la tête brutalement. Tout s’arrête.

Le ciel est tombé sur la tête de Pierre et de ses associés le 6 mai dernier. C’était un mardi. Déjà confronté à la crise sanitaire du coronavirus COVID-19, le vice-président de la chaine de restaurants apprend en arrivant au bureau la découverte d’un lien possible entre quelques cas de shigellose une gastro-entérite voisine de la «turista» mexicaine – et l’un des 200 restaurants du groupe. Les jours suivants, l’intrus microscopique frappe des clients d’un deuxième, puis d’un troisième établissement de restauration. En dépit des inspections sanitaires et des tests médicaux, les dirigeants du groupe de restauration alimentaire ignoraient toujours où se logeait la bactérie. Mais il fallait agir.

«Nous avons eu le sentiment d’être frappés par la foudre», se rappelle avec émotion l’entrepreneur qui a confié ses intérêts d’image à l’agence parisienne de gestion de crise.

Trois jours après l’alerte, ils décident de suspendre toutes les activités du groupe. L’enjeu est réel : 4000 emplois et un chiffre d’affaires annuel de plusieurs dizaines de millions d’euros en dépendent.

«Nous risquions de ne jamais rouvrir nos portes et nous en étions conscients, dit Pierre. Mais nous voulions empêcher qu’un doute s’installe sur la qualité et la salubrité de la nourriture servi dans nos restaurants. Notre image de marque n’est pas négociable. C’est un des éléments clés de valorisation de notre entreprise !»

La fermeture a duré neuf jours et a coûté jusqu’ici 800 000 euros à l’entreprise et à ses franchisés. Mais deux mois après les événements, le groupe de restauration avait retrouvé son chiffre d’affaires. «Si c’était à refaire, nous prendrions la même décision», conclut Pierre sans la moindre hésitation, en souriant à son communicant de crise.

Bien gérer une crise, c’est savoir composer avec les faits et les perceptions.

En posant ce geste sans demi-mesure, le groupe de restaurants a gardé intact son capital le plus précieux : la confiance de sa clientèle et sa réputation. «Ils ont fait preuve de transparence et d’honnêteté, et leurs messages étaient très clairs. C’est une gestion de crise exemplaire. Ils ont utilisé la méthode Tylenol», résume Julien Auffret, associé du cabinet de conseil en communication de crise LaFrenchCom.

En 1982, des capsules de Tylenol avaient été trafiquées au cyanure dans la région de Chicago. Bilan : sept morts. Très rapidement, la compagnie Johnson & Johnson retire tous les contenants en circulation dans le monde. Une approche qui a fait école pour tous les cas d’altération criminelle ou accidentelle de produits. «Johnson & Johnson a agi comme si elle était la source du problème. Par la suite, elle a modifié ses emballages et a mené une puissante offensive de marketing. Elle a reçu les éloges de toute la presse locale», rappelle un consultant en gestion de crise. En fait, les ventes de Tylenol ont même progressé rapidement dans les mois qui ont suivi la crise.

Les sources de tumulte pour les entreprises sont variées : OPA, rappels de produits défectueux, conflits d’actionnaires, suicide de salariés ou décès de dirigeants clés, déversement de produits toxiques, garde à vue des dirigeants du comité exécutif appelant une communication sous contrainte judiciaire immédiate, chute dramatique de la valeur de l’action en bourse, fraude interne ou externe, fuites de données, attaques répétées par des activistes, etc.

«Toutes les entreprises, peu importe leur secteur, ont des zones de vulnérabilité qu’il est possible de cerner. Et même si une crise est un événement imprévu, elle est généralement précédée de signaux émergents», indique le cabinet de conseil en communication de crise.

Plusieurs entreprises ont payé très cher leur laisser-aller devant les indices avant-coureurs (les fameux signaux faibles) de situations difficiles. Selon le cabinet de conseil en gestion de crise, c’est le cas de l’industrie française de la chimie ou de l’énergie. «Des associations alertaient, des scientifiques écrivaient depuis plusieurs années sur les dangers de avant que certains Etats menacent de bannir l’utilisation de certains produits comme le glyphosate (ingrédient clé du Roundup, produit star de Monsanto), le colorant E110 ou de certaines énergies comme le gasoil. Les entreprises et le gouvernement ont joué à l’autruche. Quand la crise a éclaté, à chaque fois, elle avait atteint des proportions énormes mettant en danger l’activité des entreprises par manque d’anticipation et de gestion des risques.» La stratégie du doute n’est pas la bonne stratégie de communication et d’influence à déployer face ce type de risque. Or ce fut majoritairement le choix fait par les entreprises concernées.

Les signaux peuvent provenir de l’entreprise elle-même, indique un expert en communication de crise. Un fabricant, par exemple, néglige la qualité de ses produits et il perd progressivement sa part de marché. Un jour, il réalise qu’il n’a ni le temps ni les moyens d’offrir un nouveau produit amélioré. Il doit donc se trouver rapidement des partenaires financiers, mais son «capital de confiance» est miné. Difficile alors de négocier des ententes avantageuses avec les principaux publics de l’entreprise. Et dans l’intervalle, l’entreprise peut faire face à la faillite. «C’est le genre de crise qui aurait pu être évitée», commente cet incontournable expert de la gestion des crises.

Bien se préparer à la communication de crise

La première règle de la gestion de crise est donc fort simple : il faut s’y préparer. Autrement dit, se doter de «plans d’évacuation en cas d’incendie», pour tous les brasiers possibles dans l’entreprise par exemple. «Il faut prévoir les gestes à poser pour tous les scénarios, y compris le pire. S’il se produit, alors ça ira», rassure un expert d’un cabinet de conseil en communication de crise.

Ne pas craindre d’être alarmiste dans les scénarios : la réalité dépasse souvent la fiction. «Un an avant des inondations majeures, des spécialistes en mesures d’urgence avaient invité les intervenants de la région à définir les gestes à poser si un barrage venait à céder. Les participants avaient trouvé l’idée un peu farfelue…», rappelle un coordonnateur des programmes de mesures d’urgence civiles dispensés au sein d’un réseau de préfectures concernées.

La préparation à une situation de crise doit couvrir aussi bien les aspects opérationnels (quoi faire) que les communications (quoi dire, à qui le dire, comment le dire, quand le dire, où le dire). «Les crises se déroulent rarement derrière des portes closes. Il est crucial de réfléchir à la façon avec laquelle l’entreprise communiquera efficacement avec ses employés, avec ses partenaires financiers et avec la population comme avec ses clients, ses régulateurs, ses fournisseurs ou ses prestataires», explique Florian Silnicki.

Le plan d’intervention face aux catastrophes doit déterminer les membres de la cellule de crise, leurs rôles et leurs responsabilités, avoir une liste d’alerte et de mobilisation au sein de l’entreprise comme à l’extérieur, et déterminer les porte-parole de l’entreprise, selon la nature de l’événement. Ces informations doivent être mises à jour régulièrement.

La préparation à une crise met en cause la culture même de l’entreprise, rappelle un expert en gestion de crise : «Pendant une crise, une organisation doit faire preuve de leadership et de respect envers ses employés et sa communauté. Ces forces se construisent en période paisible, pas en situation d’urgence. Si une entreprise a toujours tourné le dos à ses voisins, elle aura beaucoup de difficulté à faire appel à leur collaboration lors de coups durs.»

Un bon plan de gestion de crise

C’est lors de l’élaboration du plan de gestion de crise qu’il est bon d’examiner ses polices d’assurances. Quand la crise éclate, il est trop tard pour les négocier. Les dirigeants de l’entreprise l’ont appris à leur dépens. Bien que tous les observateurs estiment qu’ils ont géré la crise avec brio, cinq mois après la crise, les assurances refusent toujours de compenser les pertes économiques.

L’une des entreprises interrogées possédait un manuel de gestion de crise. Ce guide de crise n’a pas empêché ses dirigeants d’avoir à faire preuve de créativité lors de la découverte de cinq bouteilles de bière contenant un liquide savonneux, au mois de mai à la sortie du confinement sanitaire. «Quand ça déborde pour de vrai, c’est une autre histoire, précise un consultant en communication de crise. Il faut alors utiliser les réflexes développés par la pratique, et par dessus tout, garder son sang-froid.»

Les bouteilles altérées avaient été signalées un vendredi, donc à la veille d’une fin de semaine, et à la veille du début du plus fort moment des ventes estivales. Le lundi, l’entreprise annonçait le rappel pour inspection de millions de bouteilles ! L’administration n’obligeait pas l’entreprise à poser un tel geste : l’entreprise a pris les devants. «Nous n’avions pas réussi à déterminer les causes et l’étendue du problème. Or, la santé publique est fondamentale pour nous», explique le porte-parole de l’entreprise concernée par la crise.

L’entreprise a annoncé sa décision en conférence de presse et a maintenu par la suite des communications quotidiennes avec le public à travers des communiqués de presse spécifiques à la crise. «La clé en situation de crise, c’est de faire tous les efforts pour corriger le problème et de faire connaître l’évolution de la situation», tire-t-il comme grande leçon de management de crise. Autres règles d’or : s’en tenir aux faits, ne pas spéculer sur les causes lorsqu’on ne les connaît pas, et être très ponctuels dans la communication de crise avec le public. La crise, causée par un problème sur l’une des chaînes d’embouteillage, n’a pas réduit la part de marché de l’entreprise accompagnée par l’agence de gestion de crise.

Bien présenter les faits pour communiquer efficacement autour de la crise

L’expert en communication de crise confirme l’importance de s’en tenir aux faits : «Un événement, même grave, est toujours plus gros avec la machine à rumeurs. Il faut être certain, à la première intervention publique, de rétablir les faits et de ne pas se tromper. Il vaut mieux attendre, se faire engueuler, que de dire des faussetés».

Un consultant en gestion de crise abonde dans le même sens. Pendant une crise, les pressions sur les porte-parole de l’armée, de la police, des pompiers, des gendarmes, de la sécurité civile, sont énormes. «Ils ont une consigne fort simple : « parlez de ce que vous connaissez« .» La discipline est aussi une règle essentielle selon l’expert en communication de crise.

Les crises confrontent souvent les entreprises à un choix fondamental : se retrancher derrière sa responsabilité juridique ou assumer sa responsabilité morale. C’est cette deuxième option qu’a privilégiée une entreprise cliente de l’agence de gestion de crise lors d’un déversement pétrolier survenu brutalement en heurtant le quai de sa raffinerie. La coque se fissure et une nappe de plusieurs milliers de barils d’huile se répand sur le fleuve sur 15 kilomètres.

De toute évidence, c’est le navire qui a heurté le quai, et non l’inverse. Cependant, le nom de la raffinerie est associé à l’incident. Au royaume des perceptions, elle est tout autant responsable que le propriétaire du navire. La raffinerie prend donc les choses en main : contact de la garde côtière, des groupes environnementaux, alerte des médias, mise sur pied d’équipes de nettoyage. Une opération d’un million d’euros pour la pétrolière, mais qui vaut des félicitations à l’entreprise de l’ensemble des parties prenantes à la crise. Une réputation préservée durablement grâce à une communication de crise exemplaire ! un modèle de gestion de crise selon les observateurs locaux interrogés.

Assumer la crise pour bien la gérer

Assumer ses responsabilités morales coûte cher. Refuser de le faire en se retranchant derrière la légalité ou des arguments techniques peut mener une entreprise à sa perte ou l’amocher sérieusement.

Une entreprise connaît le problème de l’un de ses produits commercialisés massivement, mais le minimise ? Elle argumente que la probabilité d’une telle erreur est de 1 sur 9 milliards. Pas de quoi fouetter un chat ? Un chat ? Non. Un client pointilleux, oui ! Le client, outré, alerte des journalistes spécialisés sur les réseaux sociaux. L’information fait boule de neige, au point de se retrouver à la une… du New York Times , puis d’autres journaux européens. L’entreprise n’a plus le choix. Elle offre alors de rembourser ses usagers spécialisés. Les actions en bourse chutent de 10 % et l’inquiétude s’installe chez les clients de l’entreprise. L’entreprise doit finalement céder : le remboursement sera universel et le président de l’entreprise publie des excuses publiques dans les médias du monde entier.

Au lendemain de sa décision de remplacer le produit défectueux, ses actions grimpent à nouveau : les marchés ont estimé que la confiance en l’entreprise allait revenir. Il reste qu’elle aurait pu s’en tirer à bien meilleur compte. «L’entreprise a fait plusieurs erreurs, analyse le spécialiste de la communication de crise. Si elle avait traité correctement la plainte du client, l’affaire en serait sans doute demeurée là. Par la suite, elle s’est entêtée dans une approche technique de la question. Elle a aussi sous-estimé la capacité de mobilisation d’un client mécontent.»

Nombreuses sont les entreprises à faire la même erreur, faute d’être bien accompagnées par des agences spécialisées dans la communication de crise.

«Il vaut mieux traiter correctement les plaintes des consommateurs, car Internet est un formidable instrument pour développer et accélérer les crises. Et il est impossible de le contrôler», prévient l’agence de com de crise.

Avec le recul, les entreprises qui possèdent des valeurs profondes ont plus de chances de s’en sortir que les autres. Les entreprises qui gèrent les crises en cherchant à minimiser les pertes font fausse route. Les valeurs forgent les réflexes qui permettent de prendre les bonnes décisions.