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Sportif et marque, le ticket gagnant

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Sur un marché masculin encore en construction, s’associer à un champion peut booster la notoriété et les ventes.

Sous réserve que le mariage fasse sens et soit bien exploité…

Les hommes ne sont que 42,9 % à utiliser un déodorant estampillé masculin et 25 % pour les gels douche (source : Kantar). Et on compte seulement 4 millions d’acheteurs de soin visage homme contre 23 millions pour les femmes. Ce qui a poussé Nivea (Beiersdorf) à mettre en place il y a trois ans son partenariat avec le Paris Saint-Germain afin d’accélérer la démocratisation du soin masculin, de recruter et de faire croître la catégorie. La marque étant loin d’être une inconnue : elle est la préférée en hygiène-beauté masculine (selon les données Prométhée en CAM à P6 2016), «le partenariat n’a pas été établi dans un objectif de notoriété. C’est davantage la préférence de marque que nous avons souhaité travailler », explique Susanne Schaefer, marketing manager de Nivea Men. La recette semble gagnante puisque la franchise a su attirer 1 million de nouveaux consommateurs depuis 2013.

« Depuis le début du partenariat, les ventes évoluent largement à la hausse, ce qui a permis de passer N° 2 sur le marché de l’homme », poursuit Susanne Schaefer. Plus récemment, la première crème multiusage spécialement conçue pour les hommes, Nivea Men Crème a déjà recruté 500 000 acheteurs dont 50 % nouveaux à la catégorie soin masculin. « Pour la faire connaître et inciter à l’essayer, il tombait sous le sens de passer par le partenariat avec le Paris Saint-Germain », indique la marketing manager de Nivea Men. Au tout début, la collaboration avec le club de foot s’est exprimée à travers une publicité dans laquelle les joueurs devenaient porte-parole des produits. Une première dans son genre car les joueurs n’apparaissent pas comme des stars, mais des individus de la vie quotidienne.

Champions, mais hommes avant tout. D’une manière générale en hygiène-beauté, les égéries sportives sont choisies pour leur aura de champions, mais c’est plutôt leur personnalité et leur style de vie qui sont mis en avant. Le film digital des body sprays Puma (L’Oréal Produits Grand Public) mise ainsi sur l’humour d’Antoine Griezmann.

Quelques jours seulement après sa mise en ligne, la vidéo avait dépassé les 10 millions de vues et avait été partagée plus de 300 000 fois. « D’une part Antoine Griezmann était déjà sous contrat avec l’équipementier Puma et d’autre part, c’est une égérie extrêmement aspirationnelle pour les 15-25 ans qui communique avec ses fans sur les réseaux sociaux. Cela nous a paru une évidence d’associer nos déodorants à son style de vie », souligne Jovana Arsic, directrice d’axe Mennen et Puma à Lascad. Tellement évident que la marque n’a pas «testé» le potentiel de l’égérie avant de lancer la campagne. Reste que s’il est aisé de voir les retombées sur les réseaux sociaux, il est beaucoup plus malaisé de mesurer l’impact du sportif sur la notoriété de la marque et in fine sur ses performances.

« Il demeure compliqué d’avoir une seule méthode pour évaluer le retour sur investissement. Tout dépend du type de campagne, du secteur d’activité, c’est au cas par cas. On peut se baser sur la notoriété spontanée ou sur les ventes », détaille Frank Hocquemiller, directeur général de VIP Consulting, qui est à la fois agent d’image pour les célébrités qu’elle a sous contrat et agence conseil en choix de personnalités pour les marques. « C’est un agrégat d’éléments, parmi lesquels un message adapté et un produit en résonance avec les attentes du consommateur, qui fait qu’un partenariat est un succès ou pas », confirme Elena Rakocevic, brand manager Rexona Men chez Unilever.

Pour sa part, Mennen, qui sponsorisait des athlètes comme Sébastien Loeb (Rallye) ou Paul Serin (kitesurf) a revu sa communication pour dorénavant montrer des hommes «authentiques» dans leur quotidien. « Après avoir effectué un fond de marque, nous nous sommes aperçus qu’il y avait un décalage entre ce que les hommes perçoivent de Mennen et les sports extrêmes », commente la directrice d’axe de Lascad.

De la communication au passage en rayon. Nouer un partenariat est une chose, le mettre en œuvre en est une autre. « Nous avons un rôle de chef d’orchestre sur tout ce qui en découle. Nous avons la vision de la célébrité et celle de l’annonceur, chacun doit y trouver son compte et respecter les objectifs de l’autre », rappelle Franck Hocquemiller.

Rexona Men (Unilever) a par exemple cessé sa collaboration avec l’équipe de France de Tennis, car il s’est avéré compliqué de coordonner les agendas alors que les joueurs étaient aux quatre coins du monde. La marque a en revanche continué de miser sur le tennis, mais elle le fait maintenant avec Jo-Wilfried Tsonga qui apparaît dans les spots télévisés, mais aussi sur les PLV pendant les temps forts de promotions. « Cette année, nous avons essayé de construire notre plan d’activation en parallèle de l’élaboration du contrat. Il faut pouvoir activer le partenariat, c’est cela qui lui donne de la valeur », précise Elena Rakocevic.

À condition qu’au-delà des performances soprtives, le champion, comme toute autre star, ne dérape pas dans sa vie privée.

Ou pire, dans l’affaire Oscar Pistorius, à l’image de Nike, Clarins a dû cesser d’utiliser l’athlète sud-africain dans sa communication.

Trois questions à Priscilla Foucault, directrice du marketing international de Biotherm Homme.

Pour quelles raisons associer la marque à David Beckham ?

P. F. : Il a un rayonnement mondial qui va bien au-delà du seul domaine sportif. Il ne parle pas uniquement aux fans de foot, mais à tous et à toutes les générérations et ce, dans tous les pays. Il est très aspirationnel pour les jeunes. De plus, David Beckham est aussi une icône de style qui fait bouger les lignes de la masculinité dans la mode et la beauté. En outre, il est très attaché à sa famille et engagé auprès de l’Unicef.

Quelles ont été les retombées ?

P. F. : Notre collaboration a commencé en mai 2016 autour de notre gamme Aqua Power, puis en septembre 2016 avec Force Suprême, principalement en Asie et en Espagne. La vidéo a généré plus de deux millions de vues sur YouTube en quelques semaines et le compte Instagram de Biotherm Homme a vu son nombre de followers doubler. Et nous avons enregistré une croissance à deux chiffres sur ces deux gammes en France, en Europe et en Asie.

Allez-vous reconduire cette collaboration ?

P. F. : Nous avons pensé ce partenariat sur le long terme et comme une co-construction. Nous avons développé avec lui une nouvelle ligne de soins qui sera lancée au niveau mondial à la fin de l’année. Cela va renforcer notre leadership. Preuve que le soin masculin se démocratise.

La marque, confrontée depuis 2009 à de nombreux dérapages de ses champions, s’étend le moins possible sur le sujet.

Nike gère les scandales en silence

COMME D’HABITUDE, le communiqué de presse fut lapidaire. Le 21 février, Nike indiquait qu’elle avait suspendu son contrat avec Oscar Pistorius, accusé d’avoir tué sa compagne une semaine plus tôt. L’annonce de cette rupture était accompagnée de ces quelques mots : « Nous pensons qu’Oscar Pistorius doit bénéficier d’une procédure (judiciaire) en bonne et due forme et nous continuerons à suivre la situation de très près. » Pour l’équipementier américain, cette triste affaire est l’aboutissement d’une longue série de scandales impliquant certains de ses champions les plus emblématiques. Ainsi, en 2009, Tiger Woods avait interrompu sa carrière en raison de la divulgation de ses infidélités. L’année suivante, c’était au tour de Franck Ribéry d’être embourbé dans l’affaire Zahia. Dans la foulée, les suspicions de dopage autour de Lance Armstrong avaient repris de plus belle, suscitant une enquête de l’USADA, l’agence américaine antidopage.

Face à chacune de ces crises, Nike en a dit le moins possible, se contentant généralement de déclarations très brèves, rédigées par la direction de la communication de l’entreprise, basée à Portland. Quant aux déclinaisons nationales de Nike, elles sont sommées de réagir a minima sur des sujets aussi sensibles. Ainsi, quand on interroge Sophie Nicolet, qui gère la communication de Nike France, sur les processus de gestion de crise de la marque, sa réponse par mail est laconique : « Quand il y a un problème avec un athlète, nous évaluons la situation au cas par cas, en fonction de chaque situation. »

Dans les faits, Nike, en peu de mots, a su afficher son soutien aux athlètes impliqués dans les affaires de moeurs (Woods et Ribéry), et annoncer clairement sa rupture avec Pistorius, mais aussi avec Armstrong, après ses aveux à la télévision américaine, en janvier dernier. « Le cas Armstrong a été délicat a gérer car il incarnait totalement Nike : quand tu le voyais, tu avais l’impression de voir le logo à la virgule, analyse Michel Desbordes, professeur en marketing du sport. Comme Nike avait été très loin dans ce partenariat, c’était difficile pour eux de quitter Armstrong sans passer pour des salauds. Ils l’ont donc soutenu jusqu’au bout. »

Reste une question : cette série de polémiques va-t-elle remettre en cause la stratégie de starisation de la société ? « Je ne pense pas car d’une certaine manière, dans l’ADN de Nike, il y a le refus du politiquement correct, affirme Olivier Michel, consultant en marketing sportif. Ils se sont toujours positionnés sur des personnalités très performantes qui n’étaient pas à l’abri de dérapages, comme Éric Cantona… C’est pour ça que, si on isole le cas Armstrong, je pense que Nike souffre finalement peu de ces faillites individuelles. » En tout cas, si la marque souffre, c’est en silence