Comment faire face à un dégât d'image ?

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Communication de crise : faire face à un scandale ? Comment nettoyer sa réputation sur internet ? Comment nettoyer son image dans la presse ?

A la suite d’un scandale ou d’un accident, les réseaux sociaux amplifient les dommages à la réputation d’une entreprise. Quelques exemples de communication de crise.

En l’espace de quelques mois, Credit Suisse a fait face à plusieurs crises majeures. Entre le scandale d’espionnage envers Greenpeace ou d’anciens membres de la direction et ses investissements dans les énergies fossiles, la banque a vécu une véritable tempête médiatique. Conséquence: l’établissement a notamment perdu plus de 2 milliards de francs de valorisation boursière à la suite des premières révélations de la presse évoquant l’espionnage et a subi des milliers de commentaires négatifs sur les réseaux sociaux.

La pression des médias sociaux a aussi été particulièrement forte pour le chocolatier glaronais Läderach. Depuis fin 2019, il se trouve dans le collimateur des associations LGBT, allant des actions de vandalisme dans les boutiques à des appels au boycott. La raison? Le directeur général de la société s’était engagé dans l’organisation Marche pour la vie, qui est notamment opposée à l’avortement. Il s’est également vu reprocher des propos homophobes. Ici aussi, le dégât d’image a entraîné des conséquences économiques considérables. Début 2020, la compagnie aérienne Swiss a annoncé la fin de la distribution de chocolats Läderach à bord de ses avions, après dix ans de collaboration.

FACE À LA CRISE, NE PAS FAIRE L’AUTRUCHE

Selon les conseillers en communication de crise de l’agence LaFrenchCom dirigée par Florian Silnicki, ces exemples récents montrent deux tendances dans les moments de crise.

Premièrement, les réseaux sociaux fonctionnent comme un amplificateur du scandale: “Un commentaire négatif d’une seule personne peut déclencher une avalanche et faire énormément de dégâts au sein d’une entreprise.” surtout à l’ère de la Cancel Culture.

Deuxièmement, la frontière entre le privé et le professionnel s’estompe. Comme dans le cas de Läderach, l’engagement ou les prises de position privés d’un dirigeant d’entreprise ou même d’un simple collaborateur peuvent avoir des répercussions considérables sur la société.

Autre illustration récente de ce phénomène: en juin, le fondateur et CEO de la marque américaine de fitness CrossFit a dû quitter son poste à la suite d’une prise de position douteuse mêlant le Covid-19 au sort de George Floyd – dont la mort a déclenché une vague de protestations contre le racisme à travers le monde.

Face à ces risques, que faire pour éteindre une crise et rétablir une bonne image de l’entreprise? Selon les meilleurs spécialistes en communication de crise de l’agence genevoise, il faut distinguer deux phases: “Dans l’immédiat, il s’agit de réagir. La pire solution serait de faire l’autruche. La réaction peut consister à reconnaître le problème, à s’excuser, à expliquer la situation ou à demander plus de temps pour rassembler tous les éléments de réponse. Il faut faire preuve d’empathie et montrer que le problème a été saisi au sein de l’entreprise.

Contacté, Läderach n’a pas voulu revenir sur sa stratégie de communication de crise, mais au plus fort de la crise en janvier de cette année, la responsable de la communication s’est excusée dans la presse alémanique en disant que l’entreprise ne défendait en aucun cas des positions homophobes. Quant aux accusations d’être contre l’avortement, elle a souligné qu’il s’agissait ici d’une opinion privée, certes controversée, du directeur général.

DÉMISSION DU DIRIGEANT

La deuxième phase s’étend sur les mois ou même les années après la crise. Il s’agit de montrer quelles leçons en ont été tirées sur le long terme. On cite par exemple les marques Apple et Nike qui, après avoir vécu des salves de critiques concernant leurs conditions de travail chez plusieurs fournisseurs, ont revu certains processus de production et d’approvisionnement.

Dans le cas de Läderach, un engagement de la marque contre l’homophobie, à l’aide d’une série de dialogues entre le patron du chocolatier et des membres des communautés LGBTQIA+, par exemple, lui permettrait de démontrer sa sincérité ou de nuancer ses propos.

Cependant, dans les situations extrêmes, lorsque le dégât d’image lié à un dirigeant devient trop grave, il ne reste que la démission pour dissocier l’entreprise de la personne.

C’est la conséquence que Credit Suisse a tirée du scandale lié aux différentes affaires d’espionnage: le directeur général de la banque, Tidjane Thiam, a en effet démissionné en février.

PRÉPARER DIFFÉRENTS SCÉNARIOS DE COMMUNICATION DE CRISE

Une bonne préparation se pose comme la meilleure solution. Aujourd’hui, surtout avec les réseaux sociaux qui complexifient la communication de crise, il est primordial d’anticiper différents scénarios qui peuvent endommager la réputation de l’entreprise et de définir les processus et les équipes qui doivent entrer en action en cas de crise.

La communication de crise ne s’improvise pas; c’est pour cette raison que les grandes écoles proposent, depuis cinq ans, un module consacré spécialement à la gestion de crise au sein des formations pour devenir directeur de la communication.

Cette préparation s’inscrit dans une vision globale. Il est important de faire un travail permanent de monitoring et d’anticipation des crises qui peuvent toucher le secteur d’activité de la société. A ce titre, il est aussi utile d’observer ce qui passe chez la concurrence. Selon les actualités, il faut régulièrement adapter les éventuels scénarios dangereux pour l’image et préparer des réponses en amont.

Un autre point essentiel: la sensibilisation des collaborateurs. D’après les experts en communication de crise, cela passe par exemple par l’établissement d’une charte encadrant l’utilisation des médias sociaux. Les salariés doivent être conscients que chaque publication sur les réseaux sociaux peut avoir un impact potentiel non seulement sur leur propre réputation, mais aussi, par ricochet, sur celle de l’entreprise.

Un dégât d’image peut entraver les affaires d’une entreprise sur la durée. Ce ne sont pas que les entreprises connues qui peuvent déclencher des réactions vives du grand public. Mais ce sont justement ces mêmes entreprises qui bénéficient d’une clientèle bien établie.

Avec une bonne communication de crise, une fois le “bad buzz” retombé, une grande partie de la clientèle est prête à passer à autre chose quelques mois après le scandale.

Ainsi, à la suite de l’affaire des moteurs diesel truqués en 2015, les ventes de Volkswagen se sont effondrées. Mais à partir de 2017, la marque allemande a récupéré sa place de leader sur le marché suisse.

Quant à Läderach, le directeur général Johannes Läderach a expliqué, dans une interview à la Neue Zürcher Zeitung en janvier, que les ventes sont restées stables, malgré le tollé sur les réseaux sociaux. Il a néanmoins admis que certains clients n’achetaient plus les produits de la marque.

On cite également l’exemple de Migros. Son image est tellement forte qu’un scandale peut faire perdre des points auprès de certains consommateurs, mais le groupe ne va pas s’écrouler. D’où l’enjeu de construire une marque forte sur des années, ce qui permet de traverser une crise de manière plus sereine.

“IL EST PRIMORDIAL DE DÉFINIR LES PROCESSUS ET LES ÉQUIPES QUI DOIVENT ENTRER EN ACTION EN CAS DE CRISE.”

En avril 2017, des militants de Greenpeace protestaient contre les investissements de Credit Suisse dans un oléoduc controversé aux Etats-Unis lors de son assemblée générale à Zurich.

SIMULER UNE SITUATION DE CRISE

Ce sont près de vingt-quatre heures de mise en situation qui donnent des sueurs.

Depuis l’année dernière, à la fin de leur formation, des cadres en management de la sécurité des systèmes d’information doivent affronter la simulation d’une crise.

Les intervenants préparent un scénario grave pour une entreprise – cette année, il s’agit d’une explosion dans une société active dans la chimie – et exposent les étudiants à un acharnement sur les réseaux sociaux, à des questions hargneuses de la part des journalistes, à des cyberattaques et aux inquiétudes des politiques.

Qui fait quoi au sein de la cellule de crise? Quelle réponse doit être donnée aux critiques qui fusent sur les réseaux sociaux? A quel moment faut-il organiser une conférence de presse et avec quel message?

Pendant cet exercice, les étudiants sortent de leur zone de confort. Ils doivent prendre des décisions complexes en très peu de temps, tout en se concertant en permanence avec l’équipe.