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Comment bien préparer une interview avec un journaliste ?ActualitésComment bien préparer une interview avec un journaliste ?

Comment bien préparer une interview avec un journaliste ?

« Le secret d’ennuyer est celui de tout dire. » – Voltaire

RÉPÉTEZ, RÉPÉTEZ, RÉPÉTEZ votre message

Nous avons tous vu des hommes et des femmes politiques qui récitent encore et encore la même chose à la télévision.

Ce genre de litanie a le don d’énerver leur public. On peut aisément imaginer les téléspectateurs lever les yeux au ciel et crier « mais réponds à la question ! », à moins qu’ils n’aient déjà zappé sur une autre chaine.

C’est une des raisons pour lesquelles la communication politique des femmes et des hommes politiques n’arrive pas à convaincre leur public et nuisent à leur propre image.

Pourtant, nous vous conseillons de décliner votre message et vos renforts de message dans presque toutes vos réponses.

Vous devez présenter un message ou un renfort de message dans presque toutes vos réponses.

Nous ne voulons pas dire par là que vous devez vous répéter textuellement dans chaque réponse mais plutôt que toutes vos réponses devraient exprimer le même thème ou au moins l’un de vos principaux messages.

Vous devriez maintenant disposer de 21 réponses différentes : trois sous la forme de messages, six anecdotes, six chiffres et six petites phrases. Ces 21 réponses vous permettent de répondre à 21 questions différentes de 21 manières différentes. Elles sont toutes cohérentes mais ne sont pas répétitives pour autant.

Vous vous demanderez peut-être si vous pouvez abandonner votre message pour une réponse ou deux. Nous vous le déconseillons. En effet, imaginons qu’un journaliste de presse vous pose 10 questions au cours d’un entretien. Vous répondez par un message ou un renfort de message dans 7 de vos 10 réponses. C’est plutôt bien, non ?

Mais que se passe-t-il si le journaliste décide de reprendre l’une de vos trois réponses ? Cela signifie que votre réponse – votre opportunité unique d’influencer ou informer votre public – ne parlera même pas de vos principales idées.

Nous savons que cela semble évident, mais des dizaines de clients m’ont déjà demandé, d’un ton exaspéré : « Mais pourquoi le journaliste a-t-il cité cette phrase ? Ce n’était même pas intéressant ! » Nous leur répondons toujours en disant : si vous ne voulez pas que cela soit cité, ne le dites pas !

Nous plaisantons parfois en disant à nos clients que quand un journaliste leur demande comment ça va, ils devraient commencer à parler de leur message. Nous plaisantons à peine, en fait. La plupart des questions qu’on vous pose sont une opportunité de faire passer un message ou un renfort de message, donc ne gâchez pas votre temps de réponse. Les réponses futiles d’un jour peuvent être reprises par la presse le lendemain.

Ne gâchez pas votre temps de réponse. Les réponses futiles d’un jour peuvent être reprises par la presse le lendemain.

Sauf si l’entretien est en direct, les journalistes vous donneront généralement la possibilité de communiquer une dernière fois votre message. Ils demandent souvent à la fin de l’entretien s’ils ont oublié quelque chose ou si vous voulez ajouter quelque chose. Sachez tirer parti de cette opportunité. Si vous avez dit tout ce que vous aviez à dire au cours de l’entretien, répétez vos principaux arguments. Si vous avez oublié de faire passer l’un de vos messages, c’est le moment idéal pour le faire.

Enfin, souvenez-vous de considérer votre communication avec les journalistes avant et après l’entretien comme si cela faisait partie de l’entretien en lui-même. Vos échanges avec les journalistes avant un entretien pourront modifier les questions qu’ils vous poseront, et vos e-mails complémentaires, après l’interview, pourront l’aider à se souvenir d’inclure l’un des principaux arguments dans son article.

N’ABREUVEZ PAS LE JOURNALISTE D’INFORMATIONS

Lors d’un de nos déplacements, nous avons entendu un professionnel des RP discuter avec une collègue.

« Le journaliste est passé complètement à côté de l’histoire », a-t-il dit, furieux. « J’ai passé un temps fou à parler avec lui et il n’a rien compris ! »

Nous nous sommes tout de suite demandé si le problème était précisément qu’il en avait trop dit et si cela avait brouillé le message.

Les porte-paroles sont trop souvent victimes du syndrome du « il faut tout leur dire ». Ils sont persuadés, à tort, que leur principal rôle est d’informer en détail les journalistes alors qu’en fait leur objectif est d’influencer le contenu de l’article et de faire en sorte que leurs déclarations soient publiées.

Bien sûr, fournir aux journalistes les informations dont ils ont besoin pour leur article est un aspect important de la fonction des porte-paroles. Mais plus vous leur donnerez de détails, plus il est probable qu’un point secondaire voire encore moins important se retrouvera dans l’article au lieu de votre message principal.

En d’autres termes, l’objectif d’un entretien avec les médias n’est pas de transmettre toutes vos connaissances, mais de prioriser vos connaissances. Comme nous le disons à nos clients : plus vous parlez, plus vous vous écartez (du message).

Nous ajouterons même que votre principal objectif n’est pas de communiquer les faits aux journalistes. Si vous vous contentez de ça, vous n’êtes qu’une encyclopédie Wikipédia vivante. Votre mission est de donner du contexte et de la signification aux faits.

Lorsque vous rencontrerez des journalistes de presse, vous les verrez probablement prendre fébrilement des notes sur un petit calepin. Pour pouvoir tout noter, ils écrivent généralement très gros, sont à peine lisibles et tournent les pages à une allure vertigineuse. À la fin de l’interview, ils ont parfois des dizaines de pages de notes.

Si vous restez concentré sur vos messages principaux, vous aiderez les journalistes à prioriser. Ils auront peut-être 12 pages de notes, mais votre clarté leur permettra d’identifier facilement vos trois principaux thèmes. Cela ne garantit pas qu’ils les reprendront dans leur article, mais cela en augmentera la probabilité selon Florian Silnicki, expert en communication.

En revanche, si vous vous éparpillez, le journaliste aura 12 pages d’idées non priorisées, au hasard, parmi lesquelles choisir. Si vous avez alors la chance de voir votre principale idée publiée, ce sera plus du fait de la chance que de votre travail.

Il y a un moyen facile de savoir si vous vous éloignez de vos principaux messages. Si vous dites les mots suivants lors d’un entretien (ou similaire), vous êtes probablement en train de vous éloigner du message :

  • « Ah, au fait… »
  • « Et d’ailleurs… »
  • « Entre parenthèses… »
  • « Cela me rappelle que… »

Nous pensons que c’est l’erreur qu’a faite la personne entendue dans le train. Comme il l’a dit, il a « passé un temps fou à parler » avec le journaliste, ce qui indique très probablement que ses réponses n’étaient pas uniquement axées sur le message. Il a probablement fourni au reporter 12 pages de notes peu claires, incohérentes, le forçant à choisir lui-même ce qui était important. Et, comme presque toujours dans ces cas-là, il n’a pas été satisfait du résultat.

Il a oublié que son principal objectif n’est pas d’informer mais de prioriser.

SOYEZ BREF. MAIS PAS TROP BREF.

Si vous avez dû faire une déposition au cours d’un procès ou lors d’une garde à vue, votre avocat vous a probablement dit de limiter vos réponses au minimum possible de mots. Dans un contexte juridique, toute logorrhée peut revenir vous hanter. Donc si on vous demande si vous savez quelle heure il est lors d’une déposition, la bonne réponse n’est pas « une heure et demie » mais « oui ».

Ce n’est donc pas une surprise que les juristes soient souvent les pires invités des plateaux de télévision. Ils terminent leurs réponses de manière abrupte, et donnent l’impression à leur auditoire que leurs réponses sont artificielles, laconiques et minutieusement calibrées.

Les clients qui suivent les conseils de leurs avocats lors d’entretiens avec les médias (« dites ce que vous avez à dire, puis taisez-vous ») passent à côté de l’essentiel. Contrairement aux dépositions lors des procès, les entretiens avec des journalistes sont une opportunité de défendre votre produit ou vos idées.

Le bon conseil serait plutôt : « dites ce que vous avez à dire, défendez brièvement votre produit ou vos idées, puis arrêtez. » Vous pouvez vous appuyer sur vos messages, renforts de message et call to action pour défendre votre produit ou vos idées. C’est au journaliste de savoir gérer un silence. Le piège est de continuer à parler sans plus rien avoir à dire… pour combler !

Comme vous l’avez déjà lu plus haut, une citation de porte-parole au journal du soir dure généralement 7,3 secondes, soit 18 mots en moyenne. Mais cela ne signifie pas que vous devez répondre à chaque question en 7,3 secondes. Bien sûr, ce serait une bonne chose que vos réponses soient concises et percutantes. Mais c’est encore plus important de s’assurer que chacune de vos phrases exprime pleinement une pensée et puisse être citée à part. De cette manière, peu importe celle que le journaliste choisira. Si tout ce que vous dites reflète l’un de vos principaux messages, renforts de messages, ou appels à l’action, alors tout ce que le journaliste pourra publier sera en adéquation avec le message.

Par exemple, souvenez-vous de ce messages :

«Je voudrais rappeler que plus de 18 000 femmes en âge d’avoir des enfants vivent à plus de 150 kilomètres de l’obstétricien le plus proche, ce qui les fait courir un grand risque. Avoir un médecin à 150 kilomètres de chez soi est comme de garder des pansements chez des amis : inutile quand on en a besoin. C’est une situation dangereuse et quelque chose doit changer. »

Cette réponse est composée de trois phrases, mais peu importe laquelle le journaliste choisira. Elles sont toutes des réponses cohérentes avec le message.

Cela ne veut pas dire que vous pouvez déblatérer éternellement. Essayez de vous en tenir à 30 secondes par réponse. Mais vous avez le droit de donner une réponse plus complète que celle que vous donneriez au tribunal.

ÉTUDE DE CAS : BILL CLINTON ET JOHNNY CARSON

Avant les élections présidentielles de 1992, Bill Clinton était surtout connu aux États-Unis pour son discours d’investiture à la Convention nationale du parti démocrate de 1988, qui a duré une heure.

Ceux qui ont vu le discours ne se souviennent probablement pas d’un seul mot prononcé, mais ils se rappellent probablement des extraits montrant des délégués qui somnolaient sur place. Et ils se souviennent probablement aussi des applaudissements de la foule quand elle a entendu les mots « En conclusion… ».

Quelques jours plus tard, Bill Clinton est passé à l’émission télévisée du soir The Tonight Show Starring Johnny Carson. La première question de Johnny Carson a été : « Monsieur le gouverneur, comment allez-vous ? » et, sans attendre la réponse, il a sorti un sablier de sous son bureau, l’a retourné et l’a posé sur la table.

Le public a explosé de rire.