Astreinte de crise 24h/24 7j/7

Faut-il parler aux journalistes ?

interview

Question : 

« Face à une crise, quelle est la bonne attitude stratégique de communication de crise à adopter ? Faut-il ou non répondre aux journalistes ? »

 

Réponse : 

Les patrons nous disent souvent que dans une crise, ils sont mal à l’aise, voire méfiants avec les journalistes. La pire erreur consiste toutefois à les éviter à tout prix.

Chez nos clients, poser la question ferait sourire. On serait sans doute d’accord pour causer avec les représentants des médias, mais en réalité on reste toujours un peu méfiant et, surtout, on s’entend pour dire que l’échange de civilités a ses limites.

Répondre aux journalistes ne veut pas dire se mettre sous leurs ordres et leur servir l’information sur un plateau d’argent. Les entrepreneurs ont légitimement le droit de ne pas se laisser imposer leur agenda par la presse quand ils traversent la crise évidemment, mais même en dehors des périodes de crise.

Une fois qu’ils ont rempli leur devoir de livrer un minimum d’information, tous les types de relations entretenues avec la presse se défendent. Y compris celles du PDG qui sème ses déclarations à tous les vents et celles du président qui est aussi avare de commentaires qu’un ministre des Finances à la veille d’un discours du budget.

Peu importe l’attitude choisie par un patron, les médias ont cependant des raisons que la raison d’entreprise ne devrait pas ignorer. Les absents ont toujours tort.

UN SILENCE SUSPECT

« No comment is big comment », disent les anglophones en évoquant ces silences qui en disent souvent plus que le plus complet des discours. Tous les conseillers en communication s’entendent sur ce point : la pire chose que peut faire un patron, c’est d’éviter les médias à tout prix.

Se cacher la tête dans le sable ou émettre un « pas de commentaires » tout sec, c’est piquer la curiosité d’un journaliste et l’inciter à ne pas lâcher l’os.

À tort ou à raison ? Là n’est pas la question : on sait seulement que celui qui agit ainsi prête automatiquement le flanc à la critique. On le soupçonne de dissimuler quelque chose et on spécule sur son compte.

En se taisant, on prend le risque de déclencher la machine à rumeurs. Et quand une rumeur circule, ce n’est pas facile de l’arrêter.

RAPPELEZ-NOUS DEMAIN

Que faire lorsqu’il est préférable de garder le silence ? Par exemple, dans le cas de négociations délicates que la moindre allusion échappée en public risque de faire avorter ?

On insiste sur l’importance d’évaluer correctement l’impact d’un silence prolongé. On peut taire une information en attendant qu’une situation mûrisse ou le temps qu’on en maîtrise mieux les issues possibles. Mais, dans ce cas, il faut absolument être en mesure de juger combien de temps on peut attendre sans que la stratégie passe pour du camouflage ou qu’elle n’entraîne du coulage dans l’entreprise. Le timing est donc très important.

Même lorsqu’un dirigeant ne veut rien dire, la prudence exige qu’il prenne au moins le temps d’expliquer aux médias pourquoi il ne fera aucun commentaire. Histoire de ne pas les laisser totalement sur leur faim !

Si quelqu’un préfère garder le silence, qu’il le dise ouvertement plutôt que de ne jamais retourner les appels . De toute façon, les communicants de crise, nous préférons ça à une personne qui parle à travers son chapeau ou qui ment, même par omission.

Il y a également une autre raison de ne pas fuir les journalistes : si vous ne leur parlez pas, êtes-vous certain que quelqu’un d’autre ne le fera pas à votre place ? Il y a encore des gens qui s’imaginent que s’ils ne parlent pas à un journaliste, celui-ci n’écrira rien ou ne dira rien. Rien de plus faux : il peut dire n’importe quoi, d’exact ou d’inexact, mais surtout pas ce que vous voulez qu’il dise. Il n’y a pas de problème si vous acceptez cette éventualité. Sinon, préparez-vous à recevoir un choc !

QUI RÉPOND AUX MÉDIAS ?

Les journalistes préfèrent avoir le grand patron au bout du fil. Et plusieurs dirigeants leur donnent raison. Les réponses stéréotypées n’intéressent pas les médias et donnent une mauvaise image de l’entreprise. Dès qu’il s’agit d’engager, même au minimum, le nom de l’entreprise, c’est l’entrepreneur qui doit parler.

Les directions de la communication servent à donner de la rigueur aux relations entre les dirigeants d’entreprise et les médias ainsi qu’à aider ceux qui n’ont ni le goût ni les aptitudes pour jouer au chat et à la souris avec la presse.

Ces intermédiaires peuvent également éviter aux entreprises de commettre de graves erreurs de parcours.

LES AVANTAGES DE LA TRANSPARENCE MEDIATIQUE

Les entreprises cotées en bourse dont les actions sont disséminées dans le public sont tenues par la loi de divulguer certaines informations sur leurs activités. Ce qu’elles font avec plus ou moins d’enthousiasme.

Il fait partie des tâches d’un dirigeant d’accorder un temps raisonnable à la presse pour informer le public et les actionnaires des buts de l’entreprise et de la direction qu’elle entend prendre. C’est le « devoir de transparence» de l’entreprise. Un devoir qui comporte parfois des exigences irritantes, mais qui, en revanche, fait en sorte qu’un actionnaire bien informé du cheminement de l’entreprise fait habituellement preuve de plus de compréhension lorsque celle-ci connaît des difficultés.

Une fois ce devoir accompli, rien n’oblige plus un dirigeant à se soumettre au supplice de la question. Et si l’on s’en tient au strict point de vue des affaires, estiment la plupart des entrepreneurs, un patron n’a pas toujours intérêt à deviser longuement avec les journalistes. Au contraire, trop se dévoiler peut éventuellement lui causer du tort. Dans le cas, par exemple, où son entreprise traverse une période critique : débattre ses problèmes en public risque d’envoyer de très mauvais signaux à ses banquiers, à ses créanciers ou à ses investisseurs.

Je comprends très bien qu’un patron en pleine transaction préfère ne pas étaler toute son histoire en public. Il serait d’ailleurs bien fou de le faire. J’irais même plus loin en disant et cela va peut-être scandaliser certains – que tout entrepreneur impliqué dans une affaire où il est question d’emplois en bout de ligne devrait toujours avoir une réponse prête pour les journalistes ! C’est une question de responsabilité sociale. Si le contrat échoue parce qu’il a trop parlé ou mal parlé, qui va payer les pots cassés ?

Dans tous les cas, les dirigeants d’entreprise ne sont jamais assez familiers avec les médias.

Nos clients craignent souvent de se faire citer de travers, d’être incompris, de perdre la maîtrise de leur information et, surtout, de se faire « planter ». Mais une fois qu’on a compris un peu mieux comment ça fonctionne, on retourne ses appels.

Quand on débute en affaires, il faut y aller tranquillement avec les médias. Puis, avec le temps et l’expérience, les risques de gaffes diminuent.

L’habitude des médias, c’est souvent ce qui fait la différence entre un patron qui se fait descendre en flammes et un autre qui gagne ses galons médiatiques. Entre la phrase lâchée sans filet de protection et l’autre qui atteint directement son but. C’est aussi, disent les habitués, ce qui permet aux dirigeants de séparer le bon grain de l’ivraie dès que tombent les premières questions…

L’ennui, c’est que les « talents naturels » de communicants se font rares dans le milieu des affaires. Pour un patron capable de rivaliser avec les journalistes, il y a en 10 autres qui patinent à reculons durant une entrevue. Avant leur formation en médiatraining dans notre agence de communication, plusieurs de nos clients perdaient tous leurs moyens dès qu’on brandissait un micro, une caméra ou un magnétophone sous leur nez. Et la majorité ne savaient rien des contraintes que vivent quotidiennement les journalistes, ni des exigences particulières des différents médias. Les clients nous disent souvent en arrivant dans notre agence de crise : « Je lui ai parlé pendant 1 h 30 et il y en a juste pour 30 lignes dans le journal ! Qu’est-ce qui se passe ? »

LaFrenchCom, comme plusieurs autres agences de communication de crise, enseigne à tous ses clients le B.A.BA du fonctionnement des médias et l’art d’entretenir de bons rapports avec la presse, parfois avec le concours de journalistes « vedettes ». On montre, entre autres choses, comment se préparer avant une interview, comment réagir devant les journalistes, comment vulgariser ses propos sans jargon, comment gérer une crise médiatique, etc.

Les dirigeants se sentent plus à l’aise dès qu’ils saisissent mieux ce qui se passe dans les salles de rédaction et dans la tête des journalistes. Beaucoup de PME sous-estiment l’importance de la performance de leurs dirigeants en public. On oublie trop facilement que, lorsqu’un patron bute sur une question, c’est toute l’entreprise qui tombe avec lui.

Mais que faire si, malgré toutes vos précautions, vous estimez être victime d’une erreur ou d’un malentendu après avoir accordé une entrevue ? Ou, pire encore, si vous pensez qu’un journaliste a fait preuve de mauvaise foi à votre égard ?

Certains clients choisissent d’inscrire le nom du coupable dans leur petit calepin noir. D’autres clients, préfèrent passer l’éponge et mettre le tout dans la rubrique des profits et pertes. Nous avons appris avec le temps, ce qu’est la principale arme des journalistes : peu importe ce qu’on pense, ce seront toujours eux qui auront le dernier mot !