A quelques jours de cette fête cruciale pour son activité, le géant des confiseries a dû élargir sa campagne de rappels de produits et se résoudre à suspendre les activités de son usine belge à l’origine des cas de salmonellose. Il lui faut désormais agir vite pour retrouver la confiance des consommateurs.
Cette année, les Kinder Surprise et Schoko-Bons devraient être les grands absents des traditionnelles chasses aux oeufs de Pâques. Depuis quelques jours, ces produits phares du groupe Ferrero font l’objet de rappels suite à des cas détectés de salmonellose, entraînant une méfiance généralisée pour les produits de la marque. Une nouvelle qui tombe au plus mal pour le géant italien des confiseries, leader des ventes en France durant cette période cruciale pour le secteur.
Chaque année, en moyenne, les Français consomment quelque 15.000 tonnes de chocolats à Pâques, principalement achetées dans les grandes et moyennes surfaces. Temps fort de l’année pour la filière après Noël, Pâques représente 200 millions d’euros de vente, rappelle le Syndicat du chocolat.
Les produits Kinder occupent traditionnellement une place de choix dans le panier des Français. La marque réalise un peu plus de 10 % de son chiffre d’affaires durant cette période de ventes qui se concentre sur quelques semaines seulement et dont l’organisation (commandes et livraisons) débute dès les mois de décembre et janvier qui précèdent. « Pâques est le deuxième temps fort de l’année pour Kinder », confirme une porte-parole de Ferrero France.
Une crise à dimension internationale
Le groupe Ferrero, qui n’est pas coté en Bourse, ne livre pas plus de détails. Mais il y a quelques années, Stéphane Salomone, alors responsable du trade marketing chez Ferrero France, confiait, dans une interview au magazine « LSA », que le groupe écoulait sur le marché français près de 25 millions d’unités durant cette fête. Avec comme produit stars, les Kinder Schoko-Bons et les gros oeufs Maxi Kinder Surprise. La grande majorité des ventes Kinder à Pâques – 80 % – concerne d’ailleurs des produits dédiés aux enfants contre 20 % pour une clientèle adulte.
Le coup sera donc forcément dur à encaisser pour le géant italien cette année. Ce dernier se refuse pour le moment à livrer une estimation de l’impact de cette crise sanitaire sur son activité. « Trop tôt », souffle la porte-parole de Ferrero France. D’autant plus que le problème, d’abord européen, a pris une dimension internationale. Les rappels de produits concernent désormais aussi les Etats-Unis et la Nouvelle-Zélande, deux pays où aucun cas n’a toutefois été déclaré à ce jour.
Une question de confiance
Ferrero, qui a admis « des défaillances internes » et présenté ses excuses, a également dû suspendre temporairement son usine de chocolats Kinder d’Arlon en Belgique, sous le coup d’une enquête de la justice belge. Cette dernière représente environ 7 % du volume total des produits Kinder fabriqués dans le monde sur un an.
« Ce qui arrive à Ferrero aujourd’hui est le scénario cauchemardesque : une crise sanitaire au moment où l’opportunité commerciale est la plus grande », décrypte Florian Silnicki, expert en stratégies de communication de crise, président Fondateur de l’agence LaFrenchCom et membre fondateur du réseau CCNE (Crisis Communications Network Europe).
Selon lui, regagner la confiance des consommateurs prendra du temps en raison des erreurs commises aux prémices de la crise. « Le groupe a choisi au départ de garder le silence, n’a pas communiqué sur ses réseaux sociaux. Or, en faisant cela, il apparaît comme ayant quelque chose à cacher et laisse sa communication entre les mains des autres. C’est absolument anxiogène pour les consommateurs », explique Florian Silnicki.
Dans ce contexte, pas sûr que Ferrero parvienne à reconquérir le coeur de ses clients d’ici à Noël, autre temps fort de l’année pour le confiseur. « Noël, c’est déjà demain. Cela doit appeler une mobilisation générale de l’entreprise pour montrer aux consommateurs que le problème a été identifié et que tout a été mis en oeuvre pour que ça ne se reproduise pas. Et tout cela doit être incarné ! Des communiqués de presse ne suffisent pas », prévient l’expert. « La confiance se mérite, encore plus quand il s’agit d’enfants », rappelle-t-il.
Hayat Gazzane