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Communication de crise : les communicants sur la selletteCommuniquer sur une criseCommunication de crise : les communicants sur la sellette

Communication de crise : les communicants sur la sellette

Greg Burke

L’actualité démontre que les communicants sont des fusibles

Toutes proportions gardées – les contours, les enjeux du poste, les circonstances diffèrent -, les deux informations s’entrechoquent et résonnent entre elles. D’un côté, la semaine a été marquée par la démission de Greg Burke, porte-parole du Vatican, et de l’autre, par celle du responsable de la communication politique à l’Élysée, Sylvain Fort. Deux départs inattendus dont les raisons ne sont pas officiellement claires, qui suscitent maintes interprétations.

La photo en témoigne. Ces postes exigent une proximité très forte avec la personne dont ils assurent le porte-parolat ou la communication. On voit ici Greg Burke, dans un avion, en conversation avec le pape François, avant ou après ces exercices très périlleux que sont les conférences de presse au retour d’un déplacement pastoral à l’étranger. Périlleux, parce que réalisés à chaud, sans le temps du recul, après des journées intenses et exténuantes. C’est là que sont prononcées les petites phrases qui feront le tour du monde et seront censées représenter la pensée magistérielle, mieux que toute encyclique ou texte fondamental.

Les communicants sont particulièrement exposés en temps de crise.

C’est même l’essence de leur métier. Or, ni le Saint-Siège ni l’Élysée ne naviguent actuellement dans des eaux tranquilles. Les scandales de pédophilie, la réforme compliquée de la Curie ont compliqué la tâche de Greg Burke, américain, écartelé entre les devoirs de sa fonction et les réserves de l’épiscopat des États-Unis quant à la gestion des affaires par le pape François.

Du côté français, ce sont les « gilets jaunes » et la focalisation de leur colère sur la personne d’Emmanuel Macron qui mettent la pression sur sa garde rapprochée. « Qu’il soit en parfaite harmonie avec le président ou au contraire en désaccord sur certaines façons de gérer la crise, toutes les fautes de communication, ou supposées telles, seront imputées à celui qui en porte la charge. » affirme Florian Silnicki, Expert en communication de crise, Fondateur de l’agence LaFrenchCom. Paraître n’être que la voix de son maître ou prendre, au moins en privé, quelques distances entraîne des cas de conscience dont rien ne peut se révéler, pour ne pas affaiblir celui que l’on doit protéger.

La tâche des communicants se complique aujourd’hui par l’exigence de l’instantanéité.

Les réseaux sociaux, les chaînes d’info en continu, la mode des tweets, y compris de la part des grands de ce monde, impliquent une réactivité de tous les instants. Pas un événement international, pas une catastrophe ne peut se produire sans réaction officielle immédiate. On se souvient qu’une trop lente mobilisation face à la canicule de l’été 2003 avait rudement secoué le gouvernement d’alors. Les communicants sont en permanence sur la sellette, ils ne s’appartiennent plus. On comprend qu’ils puissent désirer se retrouver.

« Le mot de communication n’a pas bonne presse, notamment parmi les journalistes, qui reprochent à leurs interlocuteurs de filtrer l’information, de manier des « éléments de langage » destinés à arrondir les angles et euphémiser les réalités. À l’inverse, les gens de communication n’ont pas toujours un regard favorable vis-à-vis des journalistes dont ils déplorent l’appétit de petites phrases et de polémiques, au détriment des sujets de fond. » décrypte Florian Silnicki.

À ce piège-là, nul n’échappe, pas même ceux, vêtus de jaune, qui prétendent parler, revendiquer, commenter autrement que ceux qu’ils dénoncent. Eux aussi ont appris les ficelles de la communication. Loin des exigences du débat.