Canal relationnel par excellence, le Web intéresse de près les mouvements de lobby. Mais l’impact réel des « nouveaux influenceurs » reste difficile à évaluer.
Cas particulier en termes de lobbying, la France a toujours accompagné la pratique d’une lourde connotation négative, contrairement aux pays anglo-saxons. Aucune surprise donc à ce que peu d’acteurs s’affichent comme e-lobbyistes… Pourtant, les activités de relations institutionnelles ou d’affaires publiques, mots sous lesquels le lobbying avance souvent masqué, sont légion sur la Toile. Finalement, encore une fois, il s’agit d’un problème de définition… Ici, le mot déterminant, c’est bien « influencer ».
Et si certains pensent que les opérations qui peuvent se mener sur Internet se résument tout au plus à de l’activisme, faute de pouvoir toucher directement les médias et/ou les parlementaires, cette opinion n’est pas partagée par tous. « On fait tout ce que fait un lobby, sans employer le mot : on remplace le mot « lobbying » par « networking », mais, au fond, il s’agit d’avoir un réseau », explique Emery Doligé, directeur des contenus d’OgilvyOne.
D’accord. Mais, dans ce cas, comment les actions de lobbying sur la Toile se matérialisent-elles ? « Tout le débat autour du référendum français de 2005 sur le traité de Constitution pour l’Europe est parti du Net ; il y a eu là un vrai lobbying de fait. De la même manière, Bayrou était le candidat du Net aux dernières présidentielles », répond l’intéressé.
Internet étant le média par excellence du relationnel et de l’affinité, dont l’illustration la plus flagrante réside dans les réseaux sociaux, le canal n’a effectivement pas mis beaucoup de temps à intéresser les lobbyistes et communicants de tout poil. La communication de crise a certainement été la première discipline à s’approprier le canal, avec, par exemple, la gestion de crise par Image Force de la communication de crise on line de Buffalo Grill, ou encore Michel-édouard Leclerc qui, via son blog, a fait passer ses idées sur les cas d’intoxications alimentaires dues au steak haché.
Une grande confusion
Reste que la mesure de l’influence réelle des blogs est floue. Et la question de la détermination de ce qu’est un blogueur-influenceur tourne en boucle sur de nombreux blogs dits influents justement.
La première constatation est qu’il règne une grande confusion entre influence et affluence, et entre notoriété et autorité. Or, comme l’explique Grégory Pouy, de Vanksen, « il ne faut pas confondre audience et influence », première erreur, selon lui, des non-initiés. Le problème est que, mis à part des classements d’audience, il n’existe pas encore, à notre connaissance, de mesure véritable de l’influence générée par lesdits influenceurs… On ne sait pas, par exemple, si le commentaire positif d’un produit va générer des ventes, quand bien même générerait-il du trafic, ou si la participation à des débats correspond à une intention de vote. Si l’on s’en réfère à la règle des 1 % du Guardian*, 11 % des internautes seraient pourtant des influenceurs. Étrange, dans ce cas, qu’aucun outil ne permette de mesurer leur impact. Pourtant, la puissance du Web et l’impact de certains groupes organisés sur la Toile sont bien réels.
Dernière démonstration de force en date, « l’affaire » des étoiles du Guide Michelin. Thierry Richard, chroniqueur gastronomique sur Internet, et Stéphane Riss, hôtelier restaurateur/blogueur, ont créé un groupe sur Facebook réservé à un petit cercle ciblé (journalistes, blogueurs, passionnés reconnus), puis ouvert au public le 1er février. Le groupe a trouvé 19 des 25 étoiles attribuées cette année. Mieux que n’importe quel support de presse.
* 1 % du » Guardian » : Sur 100 personnes en ligne, une créera un contenu inédit, 10 interagiront (avec commentaires, critiques…) et 89 se contenteront d’en prendre connaissance. Les nouveaux influenceurs sont les 11 personnes qui créent, commentent ou améliorent l’information générée par les utilisateurs.