Gestion de crise, communication de crise et Lobbying

Sommaire

Question :

“Faites vous du lobbying ? Si j’ai à faire face à une crise liée aux affaires publiques, puis-je faire appel à votre agence de gestion de crise ?”

Réponse :

Nous sommes des conseillers en communication de crise. Nous ne sommes pas des lobbyistes. Nous gérons pour nos clients la communication et l’influence pendant les crises aux cotés de leur conseil en affaires publiques. Le lobbying de crise est une practice à part entière, qui ne fait pas partie de celles de nos sociétés de conseil en gestion de crise à Paris.

De nombreux lobbyistes sont devenus des partenaires réputés en s’appuyant sur nous pour l’aspect communication des dossiers de leurs clients, afin d’offrir à leurs clients le meilleur accompagnement en la matière.

Prolifération des directives européennes, complexification de la loi et autonomisation croissante des régions ont ouvert de nouveaux horizons au lobbying. Le lobbying est un art qui allie veille minutieuse et tactique de joueurs d’échecs devient stratégique pour les entreprises et les grands groupes de pression. Pour les sociétés de conseil en gestion de crise, la prise en charge d’actions de communication de crise au soutien des actions de lobbying, plus qu’une niche, tend à devenir une véritable practice. C’est un authentique coeur de marché.

Développé dans les pays anglo-saxons, le lobbying de crise n’est certes pas, pour l’instant, le nouvel eldorado du conseil en gestion de crise. Il n’y a point, à sa clef, de gigantesques projets nécessitant une armée de consultants en communication de crise dédiés au lobbying de crise. L’objet de ce consulting de crise d’un genre particulier ne réside pas dans la transformation de l’entreprise mais de son environnement, et plus précisément de son cadre juridique via des actions très ciblées.

Stricto sensu, le lobbying de crise vise à influer sur les processus décisionnels réglementaires. Les leviers ? Veille parlementaire, analyse des systèmes d’influence en place, notes stratégiques, rédaction de livres blancs et autres études, élaboration de consensus et stratégies d’intermédiation, organisation de colloques et conférences, campagnes d’information grand public, partenariat avec les pouvoirs publics ou les Ong… Le panorama est large.

Un éventail de prestations qui constitue une practice à part entière, généralement rattachée au département “affaires publiques” des société de conseil en communication de crise, mais qui, aujourd’hui encore, ne représente qu’une part marginale de la communication, c’est-à-dire en dessous de 5 % de l’activité totale.

Ce marché du conseil en affaires publiques de crise est évalué entre 42 millions et 60 millions d’euros. Une vingtaine de cabinets de conseil ainsi que des avocats spécialisés se partagent les recettes et les missions déployées. Nos amis de chez Boury, Tallon & Associés constituent le cabinet de conseil spécialisé dans les relations publiques institutionnelles et les affaires publiques le plus réputé de Paris depuis 1984. Avec d’un côté des filiales de cabinets de relations publiques anglo-saxons comme Hill & Knowlton, Burston-Marsteller, Porter Novelli ou encore Weber-Shandwick et des agences françaises comme Image7, Lysios, Aromates, Communication & Institutions, I&E consultants, Euralia ou encore Séance publique, qui sont pour certaines, membres du Syntec Conseil en relations publics ou de l’Afcl (Association des Conseils en Lobbying et Affaires Publiques).

De l’autre côté, il faut compter avec les cabinets d’avocats, de redoutables concurrents comme August Debouzy ou Gide l’un des principaux cabinets d’avocats d’affaires internationaux, avec 600 avocats spécialisés dans tous les domaines du droit des affaires. Il est indispensable de disposer d’une connaissance technique de la loi et notamment de son écriture pour pratiquer le lobbying de crise. La connaissance des enjeux législatifs ne suffit pas. Car ‘le diable est dans les détails’, jusqu’au placement des virgules. En tant que spécialistes du droit, ces lobbyistes de crise sont à même de contribuer à la rédaction des textes juridiques, en toute légitimité. Aux communicants de crise de concevoir et déployer la stratégie de communication de crise la plus impactante pour convaincre l’opinion publique.

Ce mini segment déjà bien convoité, n’en recèle pas moins des opportunités. Très pratiqué aux Etats-Unis, le lobbying de crise est enfin progressivement rentré dans les moeurs en France. Mais comme on dit, il y a encore de la marge.

Vers une vision multipartite de l’intérêt général

Notre société tend à adopter la démocratie à l’américaine, avec des citoyens qui s’impliquent via des organisations non gouvernementales, associations de consommateurs… Autant d’acteurs qui pratiquent le lobbying comme instrument démocratique de pression. Cette forme d’action de gestion de crise va pourtant à l’encontre de la conception du politique “à la française”.

La conception de l’intérêt général en France rend les pouvoirs publics réticents au lobbying de crise. Même si, au nom de la ‘concertation’ et du ‘dialogue social’, l’Etat accepte de discuter avec des acteurs comme les syndicats, qui sont de véritables lobbies institutionnels.

Exit le lobbying et la communication de papa

Un autre facteur de réticence résulte de l’habituel amalgame entre lobbying et trafic d’influence, ce dernier étant évidemment interdit et même réprimé par la loi. Une image négative dont les prestataires de lobbying de crise cherchent à se détacher. Le lobbying à la papa ne marche plus. Il y a près de 10.000 décideurs en France et le double au niveau de la communauté européenne, alors il ne suffit pas d’en connaître une centaine pour résoudre une problématique ! Même si, comme le concède un consultant, les clients ont encore tendance à confondre lobbying et commerce de relations.

Respect de l’intérêt général

En fait, la difficulté pour les partisans du lobbying de crise est de prouver, notamment à l’opinion publique, qu’ils ne remettent pas en cause la sauvegarde de l’intérêt général. Notre objectif n’est pas de freiner mais de concilier la réglementation avec la réalité de l’exercice économique. Nous n’allons pas à l’encontre d’objectifs d’intérêt général comme le développement durable mais nous négocions plutôt un aménagement, une période de transition, qui soit conciliable avec la pérennité de notre activité Nous ne nous comportons pas pour cela comme des groupes de pression à l’américaine, mais cherchons plutôt à donner tous les éléments d’information complémentaires.

Charte de bonne conduite

En gage de leur engagement, les lobbyistes se sont même auto-imposés des chartes qui encadrent strictement leurs missions. L’Afcl en propose une, mais aussi l’APAP, association des professionnels des affaires publiques, pour les relations avec les pouvoirs publics, qui regroupe les spécialistes internes aux entreprises. Et le Syntec conseil en relations publics dispose aussi de son code déontologique en la matière.

Quant aux avocats, qui proposent aussi des prestations de conseil en lobbying, ils revendiquent leur respect au code de l’éthique défini par les règles du barreau. Ne pas avoir de mandat électif, ni faire partie de la fonction publique au niveau national ou international, agir dans la plus grande transparence, respecter la confidentialité des informations, éviter les conflits d’intérêts entre clients, respecter les institutions, répondre à toutes les demandes d’information… Tels sont les grands principes communs à ces chartes.

Une société de plus en plus complexe

Le lobbying de crise s’épanouit également grâce au contexte socio-économique de plus en plus complexe, que la loi doit régir, et qui ne laisse plus apparaître tous les enjeux au premier coup d’oeil. C’est à toutes les parties prenantes de jouer les garde-fous et de contribuer à la compréhension pointue des problématiques. Par le biais de la veille parlementaire, nous jouons les intermédiaires entre les directions opérationnelles qui donnent leurs avis et les parlementaires. Car ces derniers sont aussi demandeurs d’information. Le levier principal de notre action consiste à nous faire connaître de tous les décideurs, parlementaires et élus régionaux, en leur fournissant des informations.

La communauté européenne est une manne pour le lobbying.

La libéralisation du marché européen qui génère une multiplication des règles du jeu, émanant de directives européennes ou d’autorités de régulation, constitue également un formidable moteur pour le lobbying. Du reste, plusieurs cabinets n’ont pas hésité à installer des antennes à Bruxelles : mieux vaut être sur place pour exercer une influence efficace auprès des autorités européennes.

Les régions deviennent un gisement de croissance.

Dans une moindre mesure, l’autonomisation progressive des régions et de leurs élus locaux génère de son côté de nouvelles formes de lobbying de crise. Nous sommes de plus en plus régulièrement en contact avec les élus locaux. 

Par ailleurs, pour les entreprises, anticiper les nouvelles réglementations fait partie intégrante d’une bonne gestion des risques et d’une anticipation de la communication de crise. L’imposition d’une norme peut en effet obliger une entreprise à des changements très coûteux et à des risques d’image très fort.

Les sociétés commencent donc à développer leur propres cellules de lobbying, à l’instar de groupes comme Véolia, Suez, Renault, Rio Tinto, Orange, Sanofi, Axa, Bnp Paribas, Engie, Sncf mais aussi de fédérations ou syndicats professionnels comme le Medef. Total dispose par exemple de spécialistes des relations avec le parlement français, européen, les Ong et encore les instances diplomatiques françaises à l’étranger. Les lobbyistes internes se sont même fédérés au sein de l’APAP.

Lobbyistes internes : donneurs d’ordre ou concurrents ?

Les lobbyistes internes apparaissent aux consultants comme des donneurs d’ordre mais aussi des concurrents. Sur notre portefeuille clients, la moitié dispose de personnel en interne. L’intégration de personnel en interne ne nuit pas à la demande de conseil. Les conclusions du prestataire permettent d’appuyer la stratégie en interne. Un adage qui ne se vérifie pas systématiquement.

Loin des yeux, près du conseil

Pour justifier de sa valeur ajoutée, le prestataire de conseil doit donc être capable d’accompagner les entreprises sur des terrains qui leur sont moins familiers.

Développer sa présence européenne et régionale

Les prestataires de lobbying ont d’ailleurs bien saisi les enjeux européens et régionaux et s’installent sur place.

Un avantage pour les filiales de cabinets anglo-saxons

Les conseils émanant de structures anglo-saxonnes, eux, attirent les clients étrangers désireux de s’implanter dans l’hexagone. Nous avons de nombreux clients étrangers qui ne sont pas présents en France. Nous avons par exemple conseillé une compagnie aérienne étrangère qui souhaitait accéder au ciel français. Il ne s’agissait pas dans ce cas directement de législation mais de relation avec les différentes instances qui réglementent l’aéroport. Et le ministère des transports avait un rôle décisif, notamment dans l’attribution des créneaux aux compagnies aériennes.

Les structures nord américaines, comparées aux cabinets européens et français, bénéficient donc de plusieurs avantages objectifs : tout d’abord, une réelle antériorité d’expérience en matière de lobbying et d’autre part, une forte demande émanant de groupes d’intérêts ou de grandes entreprises à la recherche de relais de croissance partout dans le monde, et notamment en Europe.

Mapping décisionnel et arguments sensibles

Les entreprises attendent aussi de leur conseil une compréhension détaillée du contexte de la décision, qu’ils n’ont pas toujours le recul nécessaire pour appréhender. Et l’intermédiation du conseil atténue le choc frontal avec les lobbies adverses.

Un lobbyiste de crise raconte ainsi sa mission auprès d’un laboratoire pharmaceutique souhaitant obtenir une autorisation de vente par boîte de 20 cachets, sans ordonnance, d’un anti-inflammatoire. Nous avons d’abord cherché qui décidait, et en fonction de quels arguments, officiels et officieux, sachant que, face à nous, se dressait le lobby de l’aspirine. Ensuite, nous avons noué un travail d’alliances pendant deux ans et préparé un dossier pour montrer qu’il n’y avait pas de dose létale. Nous avons aussi travaillé avec les pharmacies et les profs de médecine pour convaincre les membres d’un jury. Mais pour finir, il y a tout de même un moment où la mission devient une véritable négociation de marchands de tapis !

L’argumentaire doit aller droit au coeur… ou au portefeuille du décideur. Comme à propos de l’introduction de la dialyse péritonéale continue ambulatoire, méthode qui permet aux insuffisants rénaux, soumis à des hémodialyses pratiquées à l’hôpital tous les deux jours, d’intégrer un dispositif ambulatoire. Cette solution permettait de leur rendre leur autonomie. Mais les dialyses en clinique représentaient alors une véritable manne pour les médecins spécialisés. La stratégie a consisté à préparer une très grosse étude, très rigoureuse, sur la dialyse et le coût de l’insuffisance rénale sur le système de santé.

Des missions courtes et ciblées…

La durée des missions varie bien sûr selon les missions. Mais la tendance est à des demandes ponctuelles, plus qu’à une consultation au long cours. Même si la fidélité reste importante, compte tenu de l’aspect stratégique et confidentiel de la relation. Les contrats à moyen et long terme perdurent, surtout avec nos anciens clients (depuis 10 ans parfois). Mais les nouveaux clients nous sollicitent davantage sur des missions courtes et ponctuelles. Les sociétés de lobbying recourent au conseil en communication de crise lors de périodes critiques, comme le durcissement d’une loi ou la montée en puissance d’un point de vue gênant pour l’activité.

… mais qui touchent tous les secteurs

Tous les secteurs confondus recourent au lobbying de crise mais les plus demandeurs sont aujourd’hui ceux de la santé, sécurité, environnement et des nouvelles technologies. Certains conseils se spécialisent du reste pour répondre à ces demandes, sur les traces des cabinets bruxellois. Les entreprises ne sont pas seules clientes, syndicats professionnels, Ong, associations mais aussi collectivités locales et même pays recourent au lobbying de manière croissante. Les syndicats professionnels et les pouvoirs publics deviennent clients et constituent un marché encore complètement immature qui dispose de budgets de communication, souvent utilisés essentiellement en publicité.

Des honoraires facturés à l’heure

Si le bouche à oreille et la clientèle récurrente alimentent en grande partie les budgets, les appels d’offres se pratiquent également, notamment de la part de pays, de collectivités territoriales, de villes, d’entreprises, d’Ong… Les prestations sont ici facturées, au forfait, à la journée mais aussi à l’heure. Avec des honoraires qui varient de 1500 euros pour un junior à 4000 euros de l’heure, et de 10000 à 30000 euros par semaine, selon les consultants.

Avec des chartes de déontologie encadrant strictement son objet, une panoplie d’actions précises et des bonnes pratiques codifiées, le lobbying semble avoir atteint sa maturité en France et constitue une véritable practice pour le conseil en communication de crise. Une niche qui devrait continuer à croître à mesure que ses multiplient les réglementations européennes et que les régions gagnent en autonomie du fait de la nouvelle loi sur la décentralisation. L’aspect sensible et stratégique de ce type de conseil lui confère en outre une forte valeur ajoutée que les cabinets sauront mettre en exergue auprès de leurs clients.

Dans le lobbying aussi l’union fait la force

Signe de sa maturation progressive, le lobbying se fédère. Un moyen, pour tous les acteurs concernés, d’échanger les bonnes pratiques, de se soumettre à une charte de déontologie commune et de contribuer à une meilleure reconnaissance de la profession. Aujourd’hui, trois structures représentent la profession en France.

L’AFCL (Association française du conseil de lobbying) qui regroupe les spécialistes côté conseil. www.afcl.net

Le Syntec conseil en relations publics, qui rassemble les sociétés de conseil dont les missions couvrent plus généralement la communication et les relations publics. Tous les membres ne pratiquent donc pas systématiquement le lobbying. https://www.relations-publics.org

L’APAP, qui réunit les lobbyistes internes aux entreprises. L’objectif de l’APAP est de démultiplier le réseau de connaissances, de défendre et promouvoir ce métier et de promouvoir des valeurs communes, avec notamment le code de déontologie. http://www.affairespubliques-asso.fr