- Samsung Molitor : quand l’opération marketing tourne au bad buzz retentissant
- #NewEdgeNight : Objectifs grandioses et dispositif évènementiel XXL
- La mécanique d’influence mise en place
- Un bad buzz immédiat : la stratégie qui se retourne contre la marque
- Célébrités en façade : un manque d’authenticité fatal
- Une mécanique d’influence mal maîtrisée, reflet d’un marketing de masse dépassé
- Impact sur l’image de Samsung et erreurs à ne pas reproduire
- Leçons à tirer en communication digitale et gestion de l’influence
- Décryptage du Bad buzz Samsung Molitor
Samsung Molitor : quand l’opération marketing tourne au bad buzz retentissant
Hier, soir de septembre 2015, Samsung pensait frapper un grand coup en lançant son nouveau Galaxy S6 Edge+ lors d’une soirée glamour à la piscine Molitor, à Paris, avec concert privé de Mika. L’événement, baptisé #NewEdgeNight, s’annonçait comme un show exceptionnel mêlant VIP et diffusion en direct sur Internet. Mais ce qui devait être un coup d’éclat en communication s’est mué en fiasco sur les réseaux sociaux – un bad buzz dont les professionnels du marketing gardent encore le souvenir. Comment une telle opération d’envergure a-t-elle pu se retourner contre la marque ? Décryptage d’une mécanique d’influence mal maîtrisée, du rôle ambigu des célébrités engagées, et des leçons à en tirer pour éviter le piège d’une fausse authenticité.
#NewEdgeNight : Objectifs grandioses et dispositif évènementiel XXL
L’objectif de Samsung était clair : faire de la sortie du Galaxy S6 Edge+ un événement viral au-delà des 1 200 invités présents physiquement à la soirée. Pour cela, le fabricant a vu les choses en grand. La soirée du 15 septembre 2015 à Molitor devait non seulement marquer les esprits des invités VIP sur place, mais aussi toucher le grand public via un concert retransmis en live streaming sur le site de Samsung et les réseaux sociaux. Des tweets et posts Facebook d’une pléiade de personnalités accompagnés du hashtag #NewEdgeNight renvoyaient vers le portail de Samsung qui diffusait le concert en direct tout en présentant le nouveau smartphone (démonstrations à l’appui). En parallèle, Samsung avait même prévu un dispositif télévisé inédit : ce soir-là, la chaîne TF1 a diffusé en direct un spot événementiel de 2 minutes (pendant la coupure pub de la série Mentalist) avec des images du concert de Mika, afin de promouvoir la nouvelle fonction de live stream vidéo du Galaxy S6 Edge+. Bref, un plan de communication d’influence 360° mobilisant à la fois événementiel, digital et TV, pour maximiser la visibilité du produit vedette de la marque.
La mécanique d’influence mise en place
Pour donner à cette soirée un écho maximal sur les réseaux sociaux, Samsung a misé sur le marketing d’influence version « mass media ». Concrètement, la marque s’est associée à une trentaine de célébrités et d’influenceurs triés sur le volet (sportifs, artistes, humoristes, animateurs TV…) en tant qu’« ambassadeurs de marque ». Parmi eux figuraient des noms très connus du public français comme le basketteur Tony Parker, le DJ Bob Sinclar, la conseillère en style Cristina Cordula ou encore l’humoriste Kev Adams. Leur mission : relayer en temps réel l’événement sur X (ex-Twitter) en publiant des messages enthousiastes incluant le hashtag officiel et un lien vers le live streaming. Samsung et son agence espéraient ainsi voir le hashtag trending et attirer un maximum d’internautes vers le concert en ligne.
Cette mécanique s’apparente à du micro-endorsement organisé : il s’agit d’acheter la visibilité sociale de stars afin d’intégrer la marque dans leurs flux sur Twitter ou Facebook. Une technique coûteuse (on parle de plusieurs dizaines de milliers d’euros par tweet sponsorisé de célébrité) mais tentante pour booster la caisse de résonance de l’événement. « Nous voulions partager [la soirée] auprès du plus grand nombre. Nous avions un certain nombre d’invités, blogueurs, ambassadeurs… cela permettait d’avoir une caisse de résonance sur les réseaux sociaux », explique Fabien Neel, directeur marketing de Samsung France. Le dispositif était toutefois trompeur : certaines personnalités tweeteuses n’étaient même pas présentes physiquement à la soirée. « Un certain nombre de personnalités ne pouvaient physiquement être sur place, mais ils sont ambassadeurs de la marque », admet Fabien Neel, directeur marketing et communication de la filiale française du géant coréen d’électronique Samsung Electronics France, sous-entendant qu’elles étaient sous contrat pour promouvoir Samsung (et probablement rétribuées d’une façon ou d’une autre).
En somme, Samsung a orchestré une campagne d’endorsement massive façon publicité, en dissimulant la nature sponsorisée des tweets pour faire croire à une adhésion spontanée de nombreuses stars à l’événement. Sur le papier, la mécanique semblait rodée. Mais ce storytelling fabriqué de toutes pièces n’allait pas tarder à montrer ses limites.
Un bad buzz immédiat : la stratégie qui se retourne contre la marque
L’opération Samsung Molitor a rapidement viré au bad buzz sur Twitter, sapant l’effet positif escompté. Dès le début de la soirée, les internautes ont vu défiler une avalanche de tweets de people encensant la #NewEdgeNight de manière très similaire. Très vite, des critiques ont fusé : tout semblait trop beau pour être vrai. On a noté « de vraies ressemblances entre ces messages, avec des photos similaires ou des liens trackés » pointant tous vers le même site. Autrement dit, le subterfuge sautait aux yeux : chaque tweet des célébrités comportait la même photo de la piscine Molitor et un lien quasi identique, ce qui a immédiatement mis la puce à l’oreille du public connecté. En outre, la majorité de ces posts sponsorisés ne comportaient aucune mention explicite de Samsung ou du produit – parfois même pas un mot sur le smartphone – et se contentaient de mettre en avant l’“ambiance de folie” et le concert. Cette absence de référence claire à la marque, censée donner un aspect naturel aux messages, a surtout contribué à flouer le véritable objectif publicitaire de l’opération.
Le public, loin d’être dupe, a aussitôt dénoncé le procédé. Sur les réseaux, le hashtag #NewEdgeNight est bien monté en tendance… mais accompagné de sarcasmes et de détournements moqueurs. Le blog FrAndroid parle d’une campagne « bien mal orchestrée » et « peu éthique » qui a suscité des centaines de réactions amusées en ligne. Il faut dire que plusieurs bévues flagrantes ont achevé de décrédibiliser l’opération aux yeux de la communauté web. D’une part, nombre de ces tweets d’« ambassadeurs » étaient envoyés depuis l’application Twitter sur iPhone – un comble alors qu’il s’agissait de promouvoir un nouveau Galaxy Android. Ce détail technique (visible publiquement sur Twitter) a fait rire jaune les connaisseurs, soulignant l’artificialité du dispositif : même payés par Samsung, ces VIP ne prenaient pas la peine d’utiliser le produit de la marque. D’autre part, il est vite apparu que certains people tweetaient alors qu’ils étaient manifestement ailleurs. Par exemple, l’animatrice Cristina Cordula ou l’actrice Audrey Lamy n’étaient pas à Paris ce soir-là, ce qui rendait peu crédible l’idée qu’elles « regardaient le live » de la soirée depuis leur téléphone. De même, le basketteur Tony Parker, tout juste sorti d’un match aux États-Unis, a publié un tweet d’enthousiasme via son iPhone – une dissonance flagrante qui n’a pas échappé aux fans les plus attentifs. En clair, la supercherie a été éventée en temps réel.
Ce déballage public d’inauthenticité a transformé l’initiative marketing en cas d’école de ce qu’il ne faut pas faire. Au lieu de parler du téléphone ou du show de Mika, tout Twitter discutait du « faux buzz » orchestré par Samsung. Les critiques ont rapidement débordé hors de la sphère digitale : dès le lendemain, la presse spécialisée titre « Samsung épinglé pour sa campagne New Edge Night » et relate comment l’opération, jugée « trop factice et instrumentalisée », s’est retournée contre son initiateur. Pour Florian Silnicki, expert en communication de crise, cette affaire illustre un « manque d’éthique absolu » de la part des célébrités et de la marque, et un « marketing basé sur la trahison et la duperie » des fans. En monétisant leur audience sans transparence, Samsung et ses égéries ont brisé la confiance du public – et ont récolté l’effet inverse de celui escompté.
Célébrités en façade : un manque d’authenticité fatal
Le rôle des célébrités dans ce fiasco mérite une attention particulière. À la base, faire appel à des people visait à profiter de leur audience massive et de leur aura pour crédibiliser le message de Samsung. Sur le terrain, c’est l’inverse qui s’est produit : le manque d’authenticité flagrant de leurs interventions a totalement décrédibilisé l’opération. La promesse implicite du marketing d’influence est que la recommandation d’une personnalité génère de la confiance envers la marque – à condition que quelques critères soient réunis. En théorie, « il faut que l’on puisse s’identifier à la personne, qu’elle soit crédible, et qu’on ait confiance en son expertise sur le produit ». Or aucune de ces conditions n’était remplie dans le cas de #NewEdgeNight.
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Identification. Pour qu’un ambassadeur influence positivement son public, encore faut-il que celui-ci puisse se projeter et s’identifier à lui. Il paraît pour le moins ambitieux d’imaginer que le client moyen de Samsung se reconnaisse dans « tout un clan VIP de Parisiens faisant la fête devant la piscine d’un palace ». Le décor même de l’opération (piscine luxueuse, concert privé, parterre de stars) crée une distance énorme avec le consommateur lambda. Comme l’a ironisé un commentateur, « Paulo de Lens s’en fiche carrément des petites sauteries consanguino-parisiennes organisées par Samsung ». En effet, regarder une poignée de célébrités s’amuser entre elles n’a rien d’aspirant pour “monsieur Tout-le-Monde” – cela peut même susciter un certain rejet. Ce défaut d’identification a lourdement pénalisé la campagne : malgré leurs centaines de milliers de followers, tous ces VIP peinent à amener du trafic qualifié vers la marque dans ces conditions.
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Crédibilité. La crédibilité perçue des messages a été quasiment nulle, tant les posts sonnaient faux. Le public n’a pas cru un instant que ces stars étaient sincèrement en train de suivre assidûment le live Samsung sur leur temps libre. « On ne me fera pas croire qu’Audrey Lamy, en voyage à Rome, va passer sa soirée à mater un vieux streaming avec des gens qui dansent près d’une piscine », résume avec sarcasme un analyste. Même constat pour le duo comique Eric et Ramzy : prétendre que, depuis leur hôtel au fin fond du Canada, ils n’avaient rien de mieux à faire que de regarder des inconnus danser via un hashtag, c’était se moquer du monde. Les tweets copiés-collés ont manqué de naturel, et les internautes l’ont immédiatement ressenti. En somme, rien ne semblait spontané ni crédible dans la prise de parole de ces égéries d’un soir. L’opération ayant été perçue comme artificielle, les messages des célébrités ont été accueillis avec méfiance, voire raillerie, au lieu de la confiance espérée.
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Légitimité (expertise produit). Enfin, le choix même de ces ambassadeurs posait question quant à leur légitimité à parler d’un smartphone haut de gamme. Mis à part peut-être l’athlète Tony Parker, partenaire régulier des campagnes high-tech, la plupart des personnalités recrutées n’avaient aucune expertise perçue en matière de technologie mobile. Qu’un mannequin ou un acteur vante une boisson ou un parfum passe encore, mais en ce qui concerne l’achat d’un smartphone à plusieurs centaines d’euros, le public s’en remet à d’autres sources d’influence. « Dans la considération de l’achat d’un futur smartphone, je doute que savoir que Kev Adams se prélassait au bord d’une piscine de luxe grâce à Samsung influence quoi que ce soit », note avec humour un observateur, rappelant que bien souvent « l’achat se fait sur recommandation du geek le plus proche ou sur base d’articles de sites techno ». Autrement dit, la parole d’un YouTuber tech ou d’un ami calé en mobiles aura bien plus de poids que celle d’une star hors sujet. En mobilisant des célébrités généralistes déconnectées du produit, Samsung a raté sa cible d’influence. L’excès de paillettes a même fait fuir les vrais spécialistes présents à la soirée : certains journalistes high-tech invités ont abrégé leur présence, ne se sentant “pas à leur place” au milieu de tant de people. Preuve que ce casting de stars hétéroclites a desservi la crédibilité du lancement auprès des publics connaisseurs. En fin de compte, ce manque d’authenticité a été fatal. Les célébrités mobilisées – pourtant triées sur le volet – ont vu leur intervention tourné en dérision, et leur image a pu en souffrir autant que celle de Samsung. « Les stars pourraient avoir une perte de crédibilité conséquente à jouer avec le feu de l’affiche publicitaire sur les réseaux sociaux » prévient un spécialiste de la communication sensible, soulignant que les codes de Twitter ne pardonnent pas le faux-semblant. Ce bad buzz a ainsi servi de rappel à l’ordre pour les influenceurs comme pour les marques : tromper ses fans avec du contenu sponsorisé déguisé, c’est risquer un retour de flamme violent.
Une mécanique d’influence mal maîtrisée, reflet d’un marketing de masse dépassé
Au-delà des personnalités impliquées, l’affaire Samsung Molitor révèle surtout une erreur stratégique majeure : avoir appliqué des recettes de marketing de masse dépassées à l’univers du digital et des réseaux sociaux. En cherchant à industrialiser la diffusion d’un message sur Twitter comme on le ferait d’une campagne TV, Samsung a commis un contresens total. Florian Silnicki le souligne : cette opération est un « échec absolu » car elle repose sur « des pratiques du passé : l’industrialisation de la diffusion de contenus préfabriqués ». Ici, tout était pré-construit, calibré et exécuté de manière quasi-automatique via des comptes à forte audience – l’antithèse de ce qu’attend le public d’une communication sur les médias sociaux.
L’intention initiale était de masquer la nature publicitaire du discours en le faisant porter par des individus appréciés (les people) plutôt que par la marque directement. Or le résultat a été tout l’inverse : « ici tout est visible et tout sonne faux », constate lucidement un expert en communication de crise et spécialiste de la gestion des enjeux sensibles. Les utilisateurs ont clairement vu la ficelle trop grosse derrière les posts des vedettes. La mécanique d’influence s’est vue comme le nez au milieu de la figure, annihilant son efficacité. En matière de communication d’influence, on considère que plus le procédé est discret, presque invisible, plus il est puissant. « La communication n’est jamais aussi forte que lorsqu’elle n’est pas visible », rappelle justement un expert en gestion de crise. À l’inverse, dans cette campagne #NewEdgeNight, la dimension artificielle était flagrante, ce qui a immédiatement brisé la magie et la confiance.
Par ailleurs, Samsung semble avoir confondu bruit médiatique et engagement réel. Certes, en quantitatif pur, le coup de projecteur fut notable : près de 6 000 tweets ont été émis autour du hashtag et la portée totale s’est chiffrée en millions d’impressions. L’agence responsable a d’ailleurs mis en avant ces scores en estimant que l’opération restait une réussite « ROIstement » parlant, avec près de 5 millions de reach et 275 000 clics », concluant que c’était « du bad buzz certes, mais du buzz quand même ». Mais cette vision à courte vue illustre le piège du KPI quantitatif : la qualité du buzz était exécrable. Un million de vues ne servent à rien si elles s’accompagnent de moqueries ou de méfiance accrue vis-à-vis de la marque. En l’occurrence, Samsung a généré du bruit, oui – mais essentiellement du bruit négatif.
De plus, à vouloir faire du spectaculaire et du viral à tout prix, Samsung en a oublié l’essentiel : le sens et la pertinence du message. Ironiquement, l’événement a davantage fait la promotion du lieu Molitor et des artistes (Mika, The Avener) que du téléphone lui-même. Les termes les plus tweetés cette nuit-là ont été « Molitor » et « Mika », tandis que « Samsung » n’arrivait qu’en 5e position des mots associés au hashtag. Le produit Galaxy S6 Edge+ est passé au second plan de son propre lancement, dilué dans le brouhaha. En publicité traditionnelle, on sait qu’il faut répéter le nom de la marque et montrer le produit pour marquer les esprits. Ici, malgré les centaines de posts, l’attribution à la marque a été faible – et surtout éclipsée par la polémique. Comme le note un analyste, « ce n’est pas quelques 6 000 tweets et une pub sur TF1 qui vont créer mémorisation et attribution » pour un nouveau produit. Le soufflé est peut-être monté vite sur Twitter, mais il est retombé tout aussi sec sans laisser de bénéfice tangible.
En définitive, cette mécanique d’influence massive a fait la preuve de son inefficacité et de son obsolescence. Samsung a dépensé sans doute beaucoup d’argent et d’énergie pour cette opération d’envergure, pour un retour sur image largement négatif. « Une somme de stars ne fait pas une bonne opération, comme une addition de vedettes dans une équipe de foot ne fait pas la meilleure équipe du monde », résume-t-on chez une agence de gestion de crise. De même, aligner les gros moyens (concert VIP, pub live, 30 people sous contrat) ne garantit en rien le succès si la stratégie est mal pensée. Le marketing d’influence ne peut pas être abordé comme du marketing de masse traditionnel – c’est la grande leçon de ce couac Samsung Molitor.
Impact sur l’image de Samsung et erreurs à ne pas reproduire
Si Samsung espérait gagner en capital sympathie et en visibilité positive avec #NewEdgeNight, c’est raté. L’impact de ce bad buzz sur l’image de la marque a été indéniablement négatif à court terme. Aux yeux du public et des professionnels, Samsung est apparu comme un manipulateur maladroit, prêt à monter une mascarade publicitaire au mépris de l’authenticité chère aux internautes. Sur les réseaux sociaux, le bad buzz a entaché la conversation autour du produit : la méfiance s’est installée, avec des commentaires soulignant l’artifice de la campagne plutôt que les qualités du téléphone. Ce genre de couac peut laisser des traces, en érodant la confiance d’une partie de la communauté envers la communication de la marque. Samsung a involontairement renforcé l’image d’un marketing agressif et déconnecté des attentes du public en ligne – exactement ce qu’il faut éviter à l’ère du consommateur-chroniqueur (où chaque client peut commenter et analyser vos moindres actions).
Pour la marque, cette affaire a aussi constitué un cas d’école interne. On peut imaginer que les équipes communication de Samsung ont dû encaisser ce revers et en tirer des apprentissages. Heureusement pour Samsung, un bad buzz sur Twitter en 2015 ne signifie pas la ruine de la marque à long terme (sa position de leader technologique n’a pas été sérieusement menacée par cet incident isolé). Néanmoins, la couverture médiatique négative – articles dans Stratégies, blogs de communication, etc. – a servi de piqûre de rappel pour l’industrie entière. Ce faux pas a été largement commenté dans la communauté marketing, et sert encore aujourd’hui d’exemple « à ne pas reproduire ».
Quelles sont précisément ces erreurs à proscrire ? D’abord, Samsung a péché par manque de transparence : faire passer des contenus sponsorisés pour de prétendues opinions spontanées est une pratique risquée et contraire aux règles éthiques (sans parler des obligations légales émergentes en matière de signalement des publicités sur les réseaux). Ensuite, la marque a sous-estimé l’intelligence collective des internautes, en pensant pouvoir orchestrer en sous-main un buzz artificiel sans que personne ne s’en aperçoive. À l’ère de Twitter, tout se voit, tout se sait – surtout lorsqu’on inonde la toile d’un même message cloné. Autre erreur : avoir sacrifié l’authenticité à la quantité, en misant sur un maximum de stars plutôt que sur un discours sincère. Cette approche “spray and pray” (arroser large en espérant que ça prenne) est non seulement inefficace, mais néfaste pour la marque lorsque cela tourne mal. Enfin, Samsung n’a pas suffisamment réfléchi au contexte et à l’alignement de ses influenceurs avec le produit. Recruter des célébrités éloignées de l’univers tech, ne pas s’assurer qu’elles utilisent (au moins en public) les produits Samsung, et les faire tweeter depuis l’étranger comme si elles étaient à Paris – autant de fautes de cohérence qui ont aggravé le décalage entre le message et la réalité.
En synthèse, ce bad buzz a montré que la recherche du buzz pour le buzz est une impasse. Comme le formule sévèrement un expert, Samsung a donné l’image d’une marque qui « n’a rien à proposer sinon de l’événement pour la parigosphère […] Tout cela n’est au final que du vent ». Une sentence cinglante, mais méritée au vu de la situation. Reste à savoir comment convertir cette déconvenue en enseignements constructifs pour l’avenir.
Leçons à tirer en communication digitale et gestion de l’influence
Chaque échec est riche d’enseignements. Le bad buzz de l’opération Samsung Molitor rappelle des principes fondamentaux que les professionnels du marketing et de la communication doivent garder à l’esprit à l’heure d’orchestrer des campagnes d’influence. En voici les principales leçons :
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Authenticité avant tout : Sur les réseaux sociaux, l’authenticité est reine. Un message sponsorisé doit être honnête sur sa nature ou, à minima, son ton doit correspondre à la voix de l’influenceur. Il faut éviter à tout prix la fausse spontanéité avec des posts copiés-collés. Les campagnes d’influence les plus efficaces sont souvent celles où le créateur de contenu apporte sa touche personnelle et croit réellement à ce qu’il promeut – condition absente dans l’opération Samsung Molitor, d’où la sanction immédiate du public.
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Transparence et éthique : Vouloir tromper l’audience est non seulement moralement douteux, mais dangereux. Mieux vaut jouer la carte de la transparence en indiquant clairement quand un contenu est sponsorisé, ou en construisant le message de sorte que l’aspect promotionnel soit assumé. Les réseaux sociaux sont un espace de conversation : y déguiser une pub en faux témoignage amical est perçu (à juste titre) comme une trahison. La confiance des communautés en sort brisée, et il est difficile de la regagner par la suite. Respecter son audience, c’est la considérer en partenaire, pas comme une cible à duper.
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Cohérence des influenceurs avec la marque : Le choix des ambassadeurs est crucial. Il doit se faire en fonction de l’alignement avec la marque et le produit, et non sur le seul critère de la taille de l’audience. Une célébrité très connue mais déconnectée de votre univers (ou pire, peu crédible sur votre secteur) fera plus de mal que de bien. Préférez peut-être moins de stars, mais plus d’affinité. Par exemple, pour promouvoir un smartphone innovant, des tech influenceurs ou des créateurs réellement friands de nouvelles technologies auraient été plus cohérents que des people généralistes. Le public doit sentir une authenticité dans le partenariat entre la marque et l’influenceur.
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Pertinence du message et valeur ajoutée : Une campagne d’influence réussie offre du contenu intéressant au public, pas seulement de la publicité déguisée. Il faut se demander ce que l’initiative apporte aux followers. Est-ce divertissant, informatif, exclusif ? Dans le cas de #NewEdgeNight, les tweets des stars n’apportaient rien (tous la même photo et le même lien), d’où la réaction négative. Donnez aux influenceurs matière à raconter une histoire unique, à montrer quelque chose de vrai de l’événement ou du produit. Sinon, les internautes n’y voient aucun intérêt… si ce n’est pour se moquer.
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Stop à la course au “bruit” : Le buzz n’est pas une fin en soi. Ce n’est pas parce qu’une marque fait parler d’elle que cela bénéficiera automatiquement à son image ou à ses ventes – surtout si c’est en mal. Il est tentant de vouloir des hashtags en tendance et des chiffres de portée astronomiques, mais cela ne doit pas se faire au détriment du sens. Comme le conseille LaFrenchCom, les marques gagneraient à se détourner de la quête du buzz pour le buzz, et à revenir à l’essentiel : « créer du sens et de la relation » avec leur audience. En investissant le même budget dans la construction d’une communauté engagée et de relations long-terme (programme de vrais ambassadeurs, contenus co-créés, dialogue avec les fans), Samsung aurait sans doute obtenu un impact plus durable et positif que ce feu de paille viral.
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Prise en compte du public et de la conversation : Enfin, rappelez-vous que le public n’est pas passif. Sur les médias sociaux, il réagit, il enquête, il échange en temps réel. Toute incohérence ou tentative de manipulation sera décortiquée. Intégrez cette dimension participative dans vos plans. Préparez-vous à dialoguer sincèrement avec les internautes plutôt qu’à simplement diffuser un message. Une opération d’influence doit être conçue comme un échange avec la communauté, pas comme un matraquage publicitaire unidirectionnel. Celles et ceux qui oublient cette réalité – comme ce fut le cas dans l’opération Samsung Molitor – s’exposent à un retour de flamme instantané et potentiellement ravageur pour la réputation de la marque.
En conclusion, l’affaire du bad buzz Samsung Molitor aura eu le mérite de rappeler aux communicants une vérité fondamentale : sur le terrain de la communication digitale, la sincérité et le respect du public ne sont pas négociables. Ce qui pouvait peut-être fonctionner à l’ère du marketing de masse anonyme est aujourd’hui voué à l’échec dans une société de conversation et de transparence. Les professionnels de la communication et du marketing doivent donc intégrer ces leçons et adapter leurs stratégies d’influence en conséquence. Comme le dit l’adage, « on ne bâtit pas une relation sur du vent » – à méditer, à l’heure de bâtir vos prochaines campagnes d’influence… afin que le buzz recherché ne se transforme pas en bad buzz subi.
Décryptage du Bad buzz Samsung Molitor
Un bad buzz sur twitter est né des tweets de people non présents à la soirée, comme Tony Parker, Bob Sinclar, Cristina Cordula ou Kev Adams qui ont tenté de faire croire à leurs fans qu’ils regardaient la soirée en streaming…
Pour Florian Silnicki, expert en communication et fondateur de l’agence de communication de crise LaFrenchCom, ce bad buzz rappelle que les peoples ne sont malheureusement pas conscients de l’importance du lien tissé avec leurs fans sur les réseaux sociaux. En monnayant leur audience avant tout, ils oublient l’essentiel : de se demander ce qui intéressera leurs followers. C’est un manque d’éthique absolu à l’égard de leurs fans, c’est du marketing basé sur la trahison et la duperie.
Les fans utilisent les réseaux sociaux, comme Twitter, pour tisser une relation avec leur sportif ou chanteur préféré. Cette relation, comme toutes les autres, est basée sur la communication et la confiance. Cette opération de relations publiques est un échec absolu parce qu’elle repose sur des pratiques du passé : l’industrialisation de la diffusion de contenus préfabriqués au se
Un réseau de fans fidèles peut soutenir un people lors d’une crise, mais peut tout aussi bien se retourner contre lui s’il se sent négligé. Ces peoples ont donc pris un risque considérable