
Trente ans aprĂšs le terrible accident dans lâusine de produits chimiques de Bhopal, deux ans aprĂšs lâaccident sur le site de la sociĂ©tĂ© Lubrizol Ă Rouen et, Ă lâaube de la transposition de la troisiĂšme directive Seveso III le 1 er juin 2015 (Dir. Parlement europĂ©en et Cons. UE n° 2012/18 4 juill. 2012), la prĂ©vention et la gestion dâun accident environnemental majeur demeure un sujet de prĂ©occupation pour lâexploitant dâune installation classĂ©e pour la protection de lâenvironnement (ICPE) et les pouvoirs publics.
Un accident majeur naĂźt de la conjugaison de plusieurs paramĂštres que sont, dâune part, la gravitĂ© de la cause du dommage tel que lâĂ©mission de produits toxiques, un incendie ou une explosion dâimportance majeure et, dâautre part, lâatteinte Ă des intĂ©rĂȘts particuliĂšrement sensibles tels que la santĂ© ou lâenvironnement, que ses effets soient immĂ©diats ou diffĂ©rĂ©s, circonscrits Ă lâintĂ©rieur de lâĂ©tablissement ou Ă©tendus Ă lâextĂ©rieur de lâĂ©tablissement ( qui transpose , Seveso II et qui transpose Dir. Seveso III prĂ©c., art. 3).
Pour Ă©viter la survenance de telles crises, lâexploitant dâune ICPE doit surveiller son installation, Ă©tablir des plans de prĂ©vention des risques et mettre en Ćuvre des moyens de rĂ©action rapides en cas dâaccident. Les plans de prĂ©vention et de gestion des risques, de mĂȘme que les mesures dâurgence et de gestion des crises, doivent sâarticuler au sein dâun dispositif cohĂ©rent et partagĂ© au sein de lâorganisation dans le cadre dâune politique globale de gestion des risques et des crises testĂ©e rĂ©guliĂšrement. De lâefficacitĂ© de ces mesures et de leur application dĂ©pend en effet la protection des intĂ©rĂȘts humains et environnementaux mais Ă©galement celle des intĂ©rĂȘts financiers et de rĂ©putation de lâentreprise.
I. – AVANT LA CRISE : PRĂVENIR ET SE PRĂPARER
Anticiper les risques impose de les identifier et dâĂ©valuer le degrĂ© de gravitĂ© et de frĂ©quence, de prendre en compte leur combinaison et leurs interdĂ©pendances. Or, les risques Ă©tant par nature Ă©volutifs, leur identification nâĂ©puise pas les obligations de lâexploitant. Celui-ci doit en effet surveiller rĂ©guliĂšrement lâĂ©volution des principaux risques recensĂ©s afin dâĂ©viter la survenance et, Ă tout le moins, de limiter leurs impact en pareil cas, lâexploitant doit enfin Ă©tablir des plans de prĂ©vention et de gestion des risques.
A. – Identifier les risques pertinents et cartographier les interdĂ©pendances
Ăvaluer les risques est un exercice de prospective qui impose de dĂ©passer les biais cognitifs et la traditionnelle rĂ©fĂ©rence Ă lâanalyse historique et aux risques connus. Il convient en effet de prendre en compte des menaces qui ne sont que soupçonnĂ©es Ă ce stade ou dont la provenance et la typologie sont largement incertaines, voire totalement inconnues. Ă cette fin, une logique de rĂ©flexion ascendante par les scĂ©narii de consĂ©quences en passant des consĂ©quences aux risques susceptibles de les induire peut sâavĂ©rer efficace.
Une analyse par lâentreprise des donnĂ©es quâelle recueille sur ses fonctionnements peut Ă©galement permettre dâidentifier des risques nĂ©s dâinterdĂ©pendances de processus, ainsi que leur apparition et leur diffusion, en ce compris leurs consĂ©quences financiĂšres(1)
Lâexploitant dâune ICPE a une obligation spĂ©cifique dâidentification et de cartographie des risques appelĂ©e Ă©tude de dangers. LâĂ©tude de danger est la clĂ© de voĂ»te de la politique de prĂ©vention des risques industriels (). Son exhaustivitĂ© concernant la probabilitĂ© et la gravitĂ© des risques internes ou externes, directs ou indirects de lâinstallation pour la santĂ©, la sĂ©curitĂ© et la salubritĂ© publiques, la nature et lâenvironnement () est donc essentielle, surtout lorsque lâinstallation expose Ă des risques importants, ce qui sera notamment le cas des Ă©tablissements dits Seveso ( ; ). Cette exhaustivitĂ© permettra Ă©galement de rassurer lâadministration sur la capacitĂ© de lâexploitant Ă Ă©valuer et maĂźtriser les risques et Ă envisager les actions prioritaires. Le prĂ©fet peut en effet sur proposition de la DREAL prendre un arrĂȘtĂ© complĂ©mentaire pour tenir compte des risques mis en Ă©vidence dans lâĂ©tude de dangers initiale ou lors de son rĂ©examen quinquennal (, rĂ©capitulant les rĂšgles mĂ©thodologiques applicables aux Ă©tudes de dangers, Ă lâapprĂ©ciation de la dĂ©marche de rĂ©duction du risque Ă la source et aux plans de prĂ©vention des risques technologiques (PPRT) dans les installations classĂ©es en application de la ). Cette obligation de rĂ©vision quinquennale de lâĂ©tude de danger pour les Ă©tablissements dits seuil haut ( ; ) est maintenue par la directive Seveso III qui impose un rĂ©examen et une actualisation de cette Ă©tude dans un certain nombre de cas et notamment Ă la suite dâun accident majeur (, futur).
Les retours dâexpĂ©riences sur les accidents survenus sur le site et hors site sont en effet essentiels afin dâamĂ©liorer les mesures de rĂ©duction des risques internes Ă lâĂ©tablissement et leurs effets en cas dâaccident, sachant quâelles doivent pouvoir ĂȘtre mises en Ćuvre dans des conditions Ă©conomiques acceptables et proportionnĂ©es aux objectifs ( ; , ann. II). Elles doivent surtout pouvoir ĂȘtre appliquĂ©es de maniĂšre efficace quand on sait que le facteur organisationnel et humain prime dans prĂšs de 90 % des accidents mortels dont les causes sont connues ou suspectĂ©es et que les travaux sur les installations sont Ă lâorigine de seulement 30 % des accidents(2).
De plus, si le non-respect de ses obligations rĂ©glementaires par lâexploitant est dĂ©montrĂ© par lâenquĂȘte de lâinspection des installations classĂ©es post accident, sa responsabilitĂ© administrative est susceptible dâĂȘtre engagĂ©e pouvant aboutir Ă la fermeture, la suspension du fonctionnement de lâinstallation, la remise en Ă©tat des lieux ou au paiement dâune amende ().
Cette responsabilitĂ© nâest pas exclusive de la responsabilitĂ© pĂ©nale qui, par le systĂšme du « nĆud coulant administratif », vient aggraver la sanction administrative par la condamnation Ă des peines de prison ou le paiement dâamendes(3). La lĂ©gislation des ICPE et la jurisprudence constante de la Cour de cassation ; (4)font en effet peser sur lâexploitant la responsabilitĂ© pĂ©nale du respect des prescriptions lĂ©gales imposĂ©es. Toutefois, la cour de cassation rappelle que le principe dâinterprĂ©tation strict de la loi pĂ©nal empĂȘche de sanctionner pĂ©nalement une nĂ©gligence ou une imprudence dĂšs lors que nâest pas caractĂ©risĂ© un manquement Ă une obligation de sĂ©curitĂ© ou de prudence prĂ©vue par la loi ou le rĂšglement .
Ainsi, par un arrĂȘt du 13 janvier 2015 (, n° 12-87059), la cour de cassation a censurĂ© lâ qui avait dĂ©clarĂ© la sociĂ©tĂ© Grande Paroisse, exploitante de lâusine AZF, ainsi que le chef dâĂ©tablissement, coupables dâhomicides et blessures involontaires et de dĂ©gradations involontaires, par explosion (CA Toulouse, ch. corr., 24 sept. 2012, n° 2012/642). Si on oublie le premier moyen aux termes duquel la cour de cassation a censurĂ© le dĂ©faut dâimpartialitĂ© dâun des magistrats de la formation de jugement de la cour dâappel, la Haute Juridiction a retenu que, selon , la destruction ou la dĂ©gradation involontaire par explosion ou incendie ne peut ĂȘtre sanctionnĂ©e que si est violĂ©e une obligation de prudence ou de sĂ©curitĂ© imposĂ©e spĂ©cifiquement par la loi ou le rĂšglement. Or, la cour de cassation reproche Ă la cour dâappel dâavoir prononcĂ© cette condamnation en se rĂ©fĂ©rant implicitement aux fautes de maladresse, dâimprudence, dâinattention ou de nĂ©gligence constitutives des dĂ©lits dâhomicides et de blessures involontaires, et de nâavoir pas caractĂ©risĂ© une infraction Ă la loi ou au rĂšglement et, ce faisant, dâavoir insuffisamment caractĂ©risĂ© lâinfraction en cause. Il convient donc dĂ©sormais dâattendre la dĂ©cision de la cour dâappel de Paris saisie de cette affaire.
B. – Surveiller les Ă©volutions des risques et des perceptions
Lâexploitant doit procĂ©der Ă un contrĂŽle continu de son installation et Ă une surveillance de ses effets sur lâenvironnement, proportionnelle aux risques de pollution potentiels quâelle crĂ©e ( ; ). Afin de surveiller lâĂ©volution des principaux risques recensĂ©s, lâexploitant doit sâinscrire dans une dĂ©marche de recherche continue de nouveaux facteurs de risques en sâaidant notamment de systĂšmes dâanalyse et de traitement des donnĂ©es, de modĂ©lisation des risques et de suivi des Ă©carts aux tendances.
Plus particuliĂšrement, lâexploitant dâune installation soumise Ă autorisation et a fortiori lorsquâelle est classĂ©e Seveso est tenu de recenser rĂ©guliĂšrement les substances, prĂ©parations ou mĂ©langes dangereux qui sây trouvent ( et 10), au plus tard le 31 dĂ©cembre 2015 puis tous les quatre ans, Ă compter de lâentrĂ©e en vigueur de la directive dite Seveso III (, futur et et 4). Dans tous les cas, celui-ci doit ĂȘtre rĂ©alisĂ© pour la premiĂšre fois avant la mise en service dâune nouvelle installation, avant la rĂ©alisation de changements notables et dans le dĂ©lai dâun an Ă compter du jour oĂč lâinstallation devient Seveso.
Cette « auto surveillance » peut Ă©voluer aprĂšs un accident majeur et la prise de conscience de nouveau risque ou Ă la suite dâĂ©pisodes accidentels majeurs Ă une Ă©chelle plus globale faisant Ă©voluer la perception des risques jusque-lĂ inconnus ou jugĂ©s improbables(5).
Un Ă©vĂšnement de pollution peut Ă©galement donner naissance Ă une nouvelle rĂšglementation emportant un accroissement des obligations pesant sur lâexploitant. Ainsi, Ă la suite de plusieurs Ă©pisodes graves de pollution ayant souillĂ© les berges de la Garonne en 2007, de la Loire en 2008 et le parc rĂ©gional de la Crau en 2009, les exploitants de certaines ICPE soumises Ă autorisation se sont vus imposer de lutter notamment contre les risques engendrĂ©s par le vieillissement de certains Ă©quipements(6)et les consĂ©quences de pertes de confinement en cas de dĂ©faillance dans les conditions de stockage de substances polluantes (, relatif Ă la prĂ©vention des risques accidentels au sein des installations classĂ©es pour la protection de lâenvironnement soumises Ă autorisation). Depuis le 31 dĂ©cembre 2014, ces actions pour maĂźtriser le risque liĂ© au vieillissement dâĂ©quipements Ă risques emportant une obligation de recensement des Ă©quipements concernĂ©s et lâĂ©laboration de dossiers pour chacun, doivent ĂȘtre inscrites dans le systĂšme de gestion de la sĂ©curitĂ© (SGS) des Ă©tablissements susceptibles dâĂȘtre Ă lâorigine dâaccidents majeurs .
Le terme dâ« auto-surveillance » ne doit toutefois pas tromper sur la nature de lâobligation qui pĂšse sur lâexploitant qui doit rendre compte rĂ©guliĂšrement Ă lâinspection des installations classĂ©es (C. env., futur , art. R. 515-86 ; ) sans parler des contrĂŽles inopinĂ©s dont lâinstallation peut ĂȘtre lâobjet ()(7). Ces contrĂŽles sont renforcĂ©s par la directive Seveso III : les inspections dites « de routine » des ICPE Seveso seuil bas devront dĂ©sormais avoir lieu au minimum tous les trois ans, les ICPE Seveso seuil haut Ă©tant dĂ©jĂ soumises Ă une inspection annuelle. Les inspections non programmĂ©es(8)devront intervenir dans les meilleurs dĂ©lais Ă la suite de plaintes, dâaccidents graves, de « quasi-accidents », dâincidents et de non-conformitĂ©s Ă la rĂ©glementation Seveso. Enfin, pour toute non-conformitĂ© dĂ©celĂ©e lors de ces inspections suivies dâun arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral de mise en demeure, une inspection supplĂ©mentaire devra ĂȘtre effectuĂ©e dans un dĂ©lai de six mois, comme cela est du reste souvent le cas.
C. – DĂ©finir des outils de prĂ©vention et de gestion des crises
1) Lâarticulation des plans et procĂ©dures
En cas dâaccident majeur, les organisations efficaces en temps normal ne sont plus suffisantes et doivent faire place Ă des organisations exceptionnelles oĂč les rĂŽles et responsabilitĂ©s de chacun sont modifiĂ©s. La mise en place par lâentreprise dâun dispositif global de gestion de crises permet de faciliter une rĂ©action rapide et adaptĂ©e. Ce dispositif est constituĂ© dâun plan et de procĂ©dures dĂ©terminant les modalitĂ©s de gouvernance de la crise, les acteurs internes ou externes et les expertises utiles ainsi que leurs rĂŽles et responsabilitĂ©s. Il identifie la logistique de la ou des cellules de crise et les circuits dâinformation correspondants, les systĂšmes dâastreintes techniques et administratives et dĂ©finit les seuils dâactivation de ces cellules de crise aux diffĂ©rents niveaux de lâorganisation.
Le dispositif de gestion de crise renvoie aux procĂ©dures dâurgence et aux plans opĂ©rationnels qui seront activĂ©s. Il doit permettre dâarticuler Ă©troitement les procĂ©dures de continuitĂ© dâactivitĂ© Ă©ventuellement nĂ©cessaires Ă la survie de lâentreprise en cas dâaccident, avec les plans et les procĂ©dures de gestion technique de lâurgence et de remise en Ă©tat de lâinstallation conformĂ©ment Ă rĂ©glementation applicable. Ces principes sont dĂ©clinĂ©s par la rĂ©glementation relative aux ICPE.
En effet, eu Ă©gard aux risques potentiels auxquels les ICPE soumises Ă autorisation exposent la population et lâenvironnement, les exploitants doivent, sur le fondement de lâĂ©tude des dangers et notamment des scĂ©narii dâaccidents, prĂ©voir des procĂ©dures spĂ©cifiques de prĂ©vention et de gestion des accidents proportionnĂ©es aux risques et aux effets dâun accident au sein et hors de lâinstallation. Des outils complĂ©mentaires de prĂ©vention et de gestion des risques doivent exister dans les Ă©tablissements Seveso, que sont la politique de prĂ©vention des accidents majeurs (PPAM) (, point 5 ; , futur et ; ) complĂ©tĂ©e, pour ceux dits seuil haut(9), dâun systĂšme de gestion de la sĂ©curitĂ© (SGS) qui dĂ©crit les moyens de rĂ©alisation des objectifs gĂ©nĂ©raux et mesurables de la PPAM et ; ; .
La PPAM a vocation Ă ĂȘtre intĂ©grĂ©e au sein de la politique de lâentreprise et, afin quâelle ne se limite pas Ă une simple dĂ©claration dâintention de la direction, lâexploitant doit veiller Ă ce quâelle soit exĂ©cutĂ©e et Ă ce quâun niveau de protection Ă©levĂ© soit garanti. Ă compter du 1 er juin 2015, elle devra ĂȘtre actualisĂ©e tous les cinq ans, avant la mise en service dâune nouvelle installation ou la mise en Ćuvre de changements notables (, futur ; ). De plus, la PPAM visant Ă Ă©viter un effet domino en cas dâaccident au sein de lâĂ©tablissement, lâexploitant doit informer les exploitants des ICPE voisines des risques potentiels de son Ă©tablissement.
Le SGS dĂ©finit lâorganisation, les fonctions des personnels, les ressources, les procĂ©dures et les actions proportionnĂ©es aux dangers liĂ©s aux accidents majeurs et Ă la complexitĂ© de lâorganisation ou des activitĂ©s de lâĂ©tablissement. Ă compter du 1 er juin 2015, le SGS devra en outre prĂ©voir lâidentification systĂ©matique des risques majeurs pouvant se produire en cas de fonctionnement normal ou anormal, y compris dans le cas dâactivitĂ©s sous-traitĂ©es, ainsi que, depuis le 31 dĂ©cembre 2014, lâĂ©valuation de leur probabilitĂ© et de leur gravitĂ© et la gestion et la maĂźtrise des risques liĂ©s au vieillissement de lâĂ©quipement et Ă la corrosion (-1). LâarrĂȘtĂ© prĂ©fectoral dâautorisation ou complĂ©mentaire fixera les mesures dâurgence qui incombent Ă lâexploitant et ses obligations dâinformation et dâalerte des personnes susceptibles dâĂȘtre affectĂ©es par un accident, sur les dangers encourus, les mesures de sĂ©curitĂ© et le comportement Ă adopter (, futur).
Le SGS sâinscrit dans le systĂšme de gestion gĂ©nĂ©ral de lâĂ©tablissement et ses procĂ©dures sâarticulent avec le plan dâopĂ©ration interne (POI) ( ;, art. L. 515-41, futur et ; , Ann. I). Il est pour autant non substituable Ă dâautres systĂšmes de management de la santĂ©-sĂ©curitĂ© au travail ou du triptyque hygiĂšne-sĂ©curitĂ©-environnement.
Le POI Ă©tabli par lâexploitant est un plan de sĂ©curitĂ© Ă lâintĂ©rieur de lâinstallation excĂ©dant de simples consignes applicables en cas dâaccident. Il a vocation Ă dĂ©terminer les mesures dâorganisation, les mĂ©thodes dâintervention et les moyens proportionnĂ©s au regard des dangers que créé lâinstallation, que lâexploitant doit mettre en Ćuvre pour protĂ©ger le personnel, les populations et lâenvironnement en cas dâaccident de façon Ă en limiter les effets et les dommages sur la santĂ© publique, lâenvironnement et les biens.
Le POI nâest toutefois pas exclusivement rĂ©servĂ© aux Ă©tablissements dits Seveso et peut ĂȘtre imposĂ© par le prĂ©fet en fonction de la dangerositĂ© prĂ©sentĂ©e par lâinstallation (, Union des industries chimiques). ·à lâextĂ©rieur de lâĂ©tablissement, le pendant du POI est le plan particulier dâintervention (PPI) Ă©tabli sous la responsabilitĂ© du prĂ©fet (, NOR : INTE0500253D ; ).
2) Les simulations de crise et le retour dâexpĂ©rience
La simulation de crise, tout comme lâanalyse des incidents nâayant pas conduit Ă des crises ou lâanalyse des crises vĂ©cues par des organisations similaires sâinscrivent dans un processus dâamĂ©lioration continue des plans de gestion de crise par lâintĂ©gration des retours dâexpĂ©rience. Il sâagit dâĂ©valuer si les risques sont suffisamment compris, intĂ©grĂ©s et gĂ©rĂ©s et de dĂ©celer les forces et les faiblesses des dispositifs existants et la capacitĂ© de rĂ©silience des organisations.
La simulation de crise vise Ă tester le dispositif de gestion de crise au regard de lâensemble des risques identifiĂ©s jusquâĂ toucher le « point de rupture » des dispositifs mis en place, et ce peu important la probabilitĂ© de lâoccurrence des risques quâils visent Ă endiguer. Seront ainsi particuliĂšrement Ă©prouvĂ©s lâorganisation de la cellule de crise et son fonctionnement, et les procĂ©dures de rĂ©ponse Ă la crise, câest-Ă -dire la capacitĂ© de lâorganisation Ă gĂ©rer un ou plusieurs risques particuliers et Ă mettre en Ćuvre en « mode rĂ©flexe » les procĂ©dures dâurgence, opĂ©rationnelles, et de continuitĂ© dâactivitĂ©.
Faute dâexpĂ©rimentation prĂ©alable, lâefficacitĂ© rĂ©elle dâun POI ne peut en effet ĂȘtre mesurĂ©e quâen cas de sinistre, ce qui fait courir un risque pour lâĂ©tablissement et les tiers. Sâinspirant de lâobligation de simulation au moins triennale du POI dans les Ă©tablissements dits Seveso seuil haut emportant une obligation de mise Ă jour du plan (, futur et ; , Ann. I), lâexploitant dâune installation nâappartenant pas Ă cette catĂ©gorie peut nĂ©anmoins dĂ©cider, de sa propre initiative, de rĂ©duire cet alĂ©a et dâeffectuer des simulations rĂ©guliĂšres du POI. Des tests rĂ©guliers des mesures organisationnelles de prĂ©vention des accidents relativement frĂ©quents gĂ©nĂ©rĂ©s par le mĂ©lange de produits incompatibles sont Ă©galement prĂ©conisĂ©s par le MinistĂšre du DĂ©veloppement Durable qui recommande une approche globale de la crise par la mise en place de dispositifs techniques (soupapes, Ă©vents, protections individuelles…) ou des interventions humaines (mesures dâintervention dâurgence telles que arrĂȘt des transferts, alerte, neutralisation du mĂ©lange le cas Ă©chĂ©ant…) ainsi que la limitation des consĂ©quences par la protection des personnes (confinement, Ă©vacuation…)(10).
II. – PENDANT LA CRISE : DĂCIDER ET GĂRER
Le premier facteur dâune bonne gestion de crise est la dĂ©tection immĂ©diate de lâaccident, le dĂ©clenchement rapide de lâalerte relayĂ©e auprĂšs des cellules de crises et la parfaite connaissance par le personnel de consignes dâalerte claires et complĂštes.
La capacitĂ© Ă dĂ©cider en situation dâurgence et dâincertitude, la maĂźtrise de lâinformation et la transparence sont Ă©galement des Ă©lĂ©ments fondamentaux dâune bonne gestion de crise. La communication doit ĂȘtre adaptĂ©e au contexte, au type de mĂ©dias et aux parties prenantes, selon une stratĂ©gie dĂ©finie prĂ©alablement au sein dâun plan de communication comportant notamment des Ă©lĂ©ments de langage adaptĂ©s en fonction des parties prenantes.
A. – Une approche coordonnĂ©e et transversale
Lâactivation des procĂ©dures dâurgence et dâune organisation exceptionnelle de crise doit ĂȘtre dĂ©cidĂ©e au plus haut niveau de lâentreprise et/ou au plus prĂšs de « lâĂ©picentre », selon les dĂ©lĂ©gations de pouvoir existantes. Les modalitĂ©s dâinformation et de dĂ©clenchement dâalerte doivent ĂȘtre identifiĂ©es afin de permettre une gestion des Ă©vĂšnements cohĂ©rente et harmonisĂ©e, au bon niveau de lâorganisation selon leur intensitĂ© et des enjeux pour lâentreprise.
Une fois la procĂ©dure dĂ©clenchĂ©e, une approche coordonnĂ©e et transversale des diffĂ©rents acteurs est essentielle pour mettre en Ćuvre les mesures prĂ©alablement dĂ©finies et hiĂ©rarchiser les prioritĂ©s.
Lâorganisation de la gestion de crise est complexe car elle poursuit plusieurs objectifs : limiter les consĂ©quences environnementales et sanitaires, permettre Ă lâentreprise de poursuivre tout ou partie de ses activitĂ©s en fonction de lâimpact de la crise, tout en sachant quâune partie de ses Ă©quipes sera mobilisĂ©e par la gestion de lâaccident, sauvegarder sa valeur et sa rĂ©putation.
Au sein dâorganisations complexes, on observera plusieurs cellules de crises qui devront travailler conjointement et de maniĂšre coordonnĂ©e. En premier lieu, une cellule devra rassembler les principaux dirigeants en charge des dĂ©cisions stratĂ©giques. La direction gĂ©nĂ©rale doit en effet pouvoir maĂźtriser les enjeux de la crise et ne peut pas dĂ©lĂ©guer totalement cette mission aux fonctions techniques concernĂ©es, dans une approche par « silo » encore aujourdâhui trop souvent observĂ©e.
Ces dĂ©cisions stratĂ©giques seront mises en Ćuvre par dâautres cellules Ă©galement chargĂ©es de dĂ©ployer les procĂ©dures dâurgence. Une cellule de crise dĂ©diĂ©e aux opĂ©rations sera plus particuliĂšrement responsable du suivi et de lâanalyse de la situation, une autre coordonnera la communication interne et externe, une autre rĂ©flĂ©chira aux diffĂ©rentes hypothĂšses dâĂ©volution de la crise, notamment consĂ©cutives Ă certaines dĂ©cisions et aux mesures dâanticipation de ses effets.
En cas dâaccident, lâexploitant devra appliquer les mesures dâurgence fixĂ©es par le prĂ©fet soit dans lâarrĂȘtĂ© dâautorisation, soit dans un arrĂȘtĂ© complĂ©mentaire et mettre en Ćuvre les mesures appropriĂ©es dĂ©finies dans lâĂ©tude de dangers et ses dĂ©clinaisons, la PPAM et le SGS et Ă©ventuellement, le POI ( R. 512-31 ; ).
Lâorganisation de crise, via ses cellules et les circuits dâinformation dĂ©diĂ©s, devra ĂȘtre en capacitĂ© de rĂ©cupĂ©rer et dâanalyser rĂ©guliĂšrement les informations essentielles relatives Ă la situation pour en Ă©valuer lâimpact et effectuer les ajustements nĂ©cessaires. Câest en effet en fonction de lâĂ©valuation de la gravitĂ© de lâaccident et de ses Ă©volutions et incidences ultĂ©rieures que lâexploitant devra, dans un dĂ©lai assez bref permettant dâĂ©viter une extension des dommages, dĂ©cider de dĂ©clencher le POI du site sâil existe. Cette dĂ©cision sera bien sĂ»r facilitĂ©e, dans un contexte dâurgence et dâincertitude, si le POI prĂ©voit les hypothĂšses prĂ©cises dâaccidents imposant le dĂ©clenchement des opĂ©rations. Toutefois, mĂȘme si le dĂ©clenchement du POI est entre les mains de lâexploitant, sa mise en Ćuvre peut ĂȘtre exigĂ©e par le prĂ©fet. En effet, lâadministration que lâexploitant aura immĂ©diatement informĂ©e de lâĂ©vĂšnement, sâassurera in situ de lâexĂ©cution des mesures dâurgence en prenant au besoin des arrĂȘtĂ©s dits dâurgence afin dâimposer Ă lâexploitant les premiĂšres mesures permettant, notamment, de prĂ©venir la survenue dâun nouvel accident et dâune nouvelle pollution.
De plus, si le dĂ©clenchement par lâexploitant du POI entraĂźne lâactivation du PPI par le prĂ©fet afin de limiter les effets de lâaccident Ă lâextĂ©rieur du site, lâexploitant devra se coordonner avec les services de secours et leur fournir toute information de nature Ă rĂ©sorber le sinistre ().
La nĂ©cessitĂ© dâĆuvrer de façon transversale et concertĂ©e pour limiter la durĂ©e dâune crise et de ses effets est encouragĂ©e par une instruction gouvernementale datĂ©e du 12 aoĂ»t 2014 (, non publiĂ©e au BO) tirĂ©e des enseignements de lâĂ©mission importante de gaz soufrĂ©s survenue en janvier 2013 au sein de lâusine Lubrizol Ă Rouen et qui a mis en exergue que des amĂ©liorations Ă©taient possibles en matiĂšre dâalerte, dâinformation et dans la gestion de situation de crise. Cette instruction permet Ă lâexploitant et au prĂ©fet qui, en cas de crise souhaiteraient recourir Ă une expertise complĂ©mentaire, de solliciter le conseil dâexperts industriels tiers. Ces derniers sont actuellement rĂ©assemblĂ©s au sein du rĂ©seau USINAID qui pourrait ĂȘtre rejoint par dâautres fĂ©dĂ©rations professionnelles. Lâaction des prĂ©fets devrait Ă©galement ĂȘtre renforcĂ©e par le recours rapide au rĂ©seau dâexpertise des directions rĂ©gionales de lâenvironnement, de lâamĂ©nagement et du logement (DREAL) afin de pouvoir rapidement sâassurer que les mesures mises en Ćuvre par lâexploitant permettent de maĂźtriser lâincident ou lâaccident.
B. – Une dĂ©marche stratĂ©gique
En cas dâaccident dans une ICPE, a fortiori si elle est classĂ©e Seveso, lâobligation dâinformation de lâexploitant est double car elle sâadresse Ă la fois et en premier lieu Ă lâadministration et, en second lieu au public.
1) Une obligation dâinformation de lâadministration dans les meilleurs dĂ©lais
Lâexploitant est tenu dâinformer lâinspection des installations classĂ©es Ă deux Ă©tapes : dans les meilleurs dĂ©lais aprĂšs lâaccident et de maniĂšre circonstanciĂ©e () et, une fois la situation dâurgence gĂ©rĂ©e, en transmettant un rapport dâaccident exposant les mesures quâil a adoptĂ©es ou quâil envisage de prendre pour en pallier les effets Ă moyen ou Ă long terme et pour Ă©viter la survenance dâun accident similaire.
Le dĂ©lai de communication et la teneur de lâinformation sur la nature de la crise et ses consĂ©quences sont essentiels pas tant par ce quâelle dit que parce que le silence ou lâomission signifie. En effet, le silence de lâexploitant sera facilement interprĂ©tĂ© par lâadministration comme une volontĂ© de dissimuler ou de minimiser un dysfonctionnement(11). De plus, la tolĂ©rance de lâadministration relativement au dĂ©lai dâinformation sera dâautant moindre que lâaccident est grave, sans parler des sanctions administratives et pĂ©nales ; attachĂ©es au dĂ©faut de dĂ©claration.
Lâexploitant devra ensuite dĂ©montrer Ă lâinspection des installations classĂ©es que tout a Ă©tĂ© mis en Ćuvre afin de gĂ©rer lâaccident et dâen minimiser les impacts Ă lâintĂ©rieur et Ă lâextĂ©rieur du site. La pertinence des solutions proposĂ©es par lâexploitant et la rapiditĂ© de mise en Ćuvre sera dâautant plus dĂ©terminante quâĂ dĂ©faut, il sâexpose Ă lâadoption dâun arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral lui imposant des mesures dâurgence ou des prescriptions complĂ©mentaires ().
2) Une incitation dâinformation « Ă chaud » du public pour les ICPE Seveso
Lâinformation du public est Ă©galement un Ă©lĂ©ment essentiel dâune bonne gestion de crise car elle permet dâen limiter les effets en guidant le comportement de la population et en Ă©vitant que la suspicion et lâinquiĂ©tude, voire lâaffolement, naissent dâun dĂ©faut dâinformation.
Lâabsence dâinformation et les croyances qui sây substituent sont Ă©galement susceptibles dâaffecter la rĂ©putation de lâentreprise dont la prĂ©servation constitue un enjeu majeur pour les dirigeants(12). Or, parmi les risques susceptibles dâinduire de forts enjeux pour la notoriĂ©tĂ© dâune organisation, les Ă©vĂšnements impactant la sĂ©curitĂ©, la santĂ©, lâenvironnement, lâĂ©thique et lâintĂ©gritĂ© sont les plus importants. Le rĂŽle des rĂ©seaux sociaux et le risque associĂ© de « tempĂȘte mĂ©diatique » doivent ĂȘtre tout particuliĂšrement pris en compte et faire lâobjet dâune stratĂ©gie de communication adaptĂ©e.
Ainsi, passĂ©e lâinformation dâurgence du public sur lâexistence dâun risque par tout moyen appropriĂ©, lâentreprise a intĂ©rĂȘt Ă faire connaĂźtre les mesures correctives adoptĂ©es et pour amĂ©liorer la prĂ©vention des risques et ainsi renforcer sa crĂ©dibilitĂ© envers le grand public et lâadministration. A contrario , lâabsence de communication peut lui ĂȘtre reprochĂ©e par lâadministration notamment si cela a pu favoriser la rĂ©action inappropriĂ©e de certains riverains.
Lâinformation du public sur les accidents majeurs nâest pour autant pas rĂ©glementĂ©e Ă lâexception des Ă©tablissements dit Seveso. En effet, lâexploitant dâune telle installation est, dâune part, tenu Ă une information du public de maniĂšre indirecte par le truchement de la commission de suivi des site (CSS) ( đ et, dâautre part, invitĂ© Ă informer le public « Ă chaud » de maniĂšre plus directe grĂące aux mĂ©dias (Circ. DPPR/SEI/BARPI/ du 1 er dĂ©c. 2006).
Cette dĂ©marche de communication « Ă chaud » lancĂ©e en 2007 est fondĂ©e sur le volontariat des exploitants. Elle vise Ă informer les riverains, les salariĂ©s, les Ă©lus, les collectivitĂ©s territoriales, les associations et la presse locale sur le dĂ©roulement de lâaccident, ses circonstances et ses consĂ©quences, ainsi que sur les mesures prises. Pour faciliter la comprĂ©hension par tous, lâexploitant peut utiliser lâĂ©chelle europĂ©enne des accidents qui propose six niveaux dâimportance pour quatre paramĂštres que sont les matiĂšres dangereuses relĂąchĂ©es, les consĂ©quences humaines et sociales, les consĂ©quences environnementales et les consĂ©quences Ă©conomiques.
Dans cette optique dâaccroĂźtre la prĂ©vention des accidents majeurs, de dĂ©velopper une culture du risque et de favoriser les bons comportements des riverains en pareil cas, la directive Seveso III accentue les obligations de lâexploitant concernant lâinformation Ă destination des populations (, futur) et renforce lâaccĂšs du public aux informations en matiĂšre de sĂ©curitĂ© et sa participation au processus dĂ©cisionnel, ainsi que lâaccĂšs Ă la justice conformĂ©ment aux exigences de convention dâAarhus (Conv. Aarhus sur lâaccĂšs Ă lâinformation, la participation du public au processus dĂ©cisionnel et lâaccĂšs Ă la justice en matiĂšre dâenvironnement, signĂ©e le 25 juin 1998 et approuvĂ©e au nom de lâUnion europĂ©enne par ).
III. – APRĂS LA CRISE : REVENIR Ă LA NORMALE, SâADAPTER
Le moment de la sortie de crise est tout aussi important que le moment de lâactivation des plans de gestion de crise. La fin de la crise doit ĂȘtre annoncĂ©e et communiquĂ©e en interne et en externe afin de permettre officiellement le retour Ă une situation « normale ». Ă court terme, il sâagira de redĂ©marrer les activitĂ©s arrĂȘtĂ©es, de constater les dommages, de documenter les demandes indemnitaires Ă lâattention des assurances et de gĂ©rer ou de prĂ©venir les Ă©ventuels litiges. Ces activitĂ©s peuvent nĂ©cessiter la mise en place dâĂ©quipes dĂ©diĂ©es et des rĂ©organisations structurelles. Ă plus long terme, il sâagira de tirer les leçons de la crise.
En tant que dĂ©marche dâanticipation de dĂ©faillances dont la combinaison suffit souvent Ă gĂ©nĂ©rer un accident, le retour dâexpĂ©rience sur la crise vĂ©cue est un outil de prĂ©vention des crises futures. Il permettra de complĂ©ter la cartographie des risques, dâamĂ©liorer les plans de rĂ©ponse en urgence et de continuitĂ© et dâĂ©lever le niveau de rĂ©silience de lâorganisation. Il doit donc ĂȘtre organisĂ© de maniĂšre appropriĂ©e entre les acteurs concernĂ©s (exploitant, prestataires, sous-traitants, salariĂ©s…).
En effet, dans une Ă©tude rĂ©cente(13), lâIneris rĂ©vĂšle que, pour maĂźtriser les risques industriels, les entreprises ont dĂ©veloppĂ© depuis de nombreuses annĂ©es des mesures centrĂ©es sur lâamĂ©lioration continue de la fiabilitĂ© des installations et la mise en place de SGS, au dĂ©triment des facteurs organisationnels et humains (FOH) qui sont pourtant Ă lâorigine de plus de la majoritĂ© des accidents. Sont notamment insuffisamment pris en compte les changements organisationnels susceptibles de perturber la sĂ©curitĂ© de lâinstallation. Lâanalyse a posteriori de lâaccident devrait en consĂ©quence permettre de mettre en lumiĂšre ces facteurs de risques qui doivent Ă©galement ĂȘtre analysĂ©s rĂ©guliĂšrement dans le cadre de lâĂ©valuation du SGS et de son volet relatif Ă la « gestion des modifications ».
Cette dĂ©marche de retour dâexpĂ©rience est prescrite aux exploitants dâĂ©tablissements dits Seveso seuil haut (Arr. 10 mai 2000, art. 7 et annexe III-6°). Ă la suite dâun accident majeur, la PPAM, le SGS, le POI doivent ĂȘtre actualisĂ©s voire revisitĂ©s. De plus, Ă compter du 1 er juin 2015, lâexploitant devra Ă©valuer en permanence le respect des objectifs fixĂ©s par la PPAM et le SGS et mettre en place des mĂ©canismes dâinvestigation et de correction en cas de non-respect. Ces procĂ©dures englobent le systĂšme de notification des accidents majeurs ou des accidents Ă©vitĂ©s de justesse, notamment lorsquâil y a eu des dĂ©faillances des mesures de prĂ©vention, les enquĂȘtes faites Ă ce sujet et le suivi, en sâinspirant des expĂ©riences du passĂ© (Arr. 26 mai 2014, Annexe I, 6°).
ParallĂšlement, aprĂšs un accident, lâAdministration mĂšnera sa propre enquĂȘte afin dâen dĂ©terminer lâorigine et dâidentifier un Ă©ventuel non-respect de la rĂ©glementation relative aux ICPE. Le SGS sera notamment examinĂ© avec attention par lâinspection des installations classĂ©es afin dâĂ©tablir les causes et les Ă©ventuelles responsabilitĂ©s et toute insuffisance dans le SGS ou dans sa mise en Ćuvre est susceptible de donner lieu Ă un arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral de mise en demeure imposant, notamment, le respect des procĂ©dures Ă©laborĂ©es dans le cadre du SGS.
Le prĂ©fet peut en effet, sous lâimpulsion de lâinspection des installations classĂ©es et sur la base de son rapport dâenquĂȘte, prendre un arrĂȘtĂ© complĂ©mentaire fixant le calendrier des travaux et mesures de maĂźtrise de risques additionnelles Ă mettre en Ćuvre sur les ouvrages Ă lâorigine de lâaccident et prĂ©cisant les mesures de remise en Ă©tat de la zone impactĂ©e (C. env. art. L. 512-20 et C. Env., art. R. 512-28, al. 5). Cet arrĂȘtĂ© complĂ©mentaire peut succĂ©der Ă un ou plusieurs arrĂȘtĂ©s dits dâurgence adoptĂ©s par le prĂ©fet pendant la crise en fonction de sa nature et de lâampleur de la pollution quâelle gĂ©nĂšre. Ce nâest toutefois que dans des cas exceptionnels que le redĂ©marrage de lâinstallation sera subordonnĂ© Ă une nouvelle autorisation, un nouvel enregistrement ou un nouveau rĂ©cĂ©pissĂ© de dĂ©claration.
Enfin, depuis quelques annĂ©es les prĂ©fets sont Ă©galement incitĂ©s Ă constituer, postĂ©rieurement aux accidents technologiques survenus dans les installations industrielles des « cellules post-accident technologique » destinĂ©es Ă Ă©valuer et gĂ©rer les consĂ©quences environnementales et sanitaires importantes et qui, selon les cas, associeront les services en charge des installations classĂ©es, de la santĂ©, de lâagriculture, de lâalimentation, de la protection des populations et de la police de lâeau (Circ. 20 fĂ©v. 2012, NOR : DEVP1126807C, BOMEDD n° 2012/5, 25 mars).
Le dĂ©lai de communication et la teneur de lâinformation sur la nature de la crise et ses consĂ©quences sont essentiels, pas tant par ce quâelle dit que parce que le silence ou lâomission signifie.
La Haute Juridiction a retenu que, selon lâarticle 322-5 du Code pĂ©nal, la destruction ou la dĂ©gradation involontaire par explosion ou incendie ne peut ĂȘtre sanctionnĂ©e que si est violĂ©e une obligation de prudence ou de sĂ©curitĂ© imposĂ©e spĂ©cifiquement par la loi ou le rĂšglement.
La nĂ©cessitĂ© dâĆuvrer de façon transversale et concertĂ©e pour limiter la durĂ©e dâune crise et de ses effets est encouragĂ©e par une instruction gouvernementale du 12 aoĂ»t 2014.
Le retour dâexpĂ©rience sur la crise vĂ©cue est un outil de prĂ©vention des crises futures.
Note(s) :
(1) Pour ce faire des modĂšles quantitatifs construits autour de plusieurs facteurs de risques identifiĂ©s comme les plus susceptibles dâaffecter la performance financiĂšre, tant Ă la hausse quâĂ la baisse, peuvent ĂȘtre dĂ©veloppĂ©s spĂ©cifiquement pour un type dâactivitĂ© et de donnĂ©es disponibles au sein dâune organisation. Le nombre et la nature des facteurs de risques sont diffĂ©rents pour chaque organisation et susceptibles dâĂ©voluer au fil du temps…
(2) Les facteurs organisationnels et humains dans la maĂźtrise des risques majeurs, Ineris, 21 mars 2014 ; Retour dâexpĂ©rience, http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr
(3) La portĂ©e des nouvelles dispositions pĂ©nales du Code de lâenvironnement applicables aux activitĂ©s industrielles, Courtaigne-Deslandes C., BDEI n° 39/2012.
(4) Le droit pĂ©nal de lâenvironnement, A. Gogorza, Rev. Droit pĂ©nal n° 9, sept. 2013, dossier 4.
(5) Ainsi il y a quelques annĂ©es, les gaz Ă effet de serre Ă©taient considĂ©rĂ©s comme une menace planĂ©taire alors que les cyber-attaques relevaient de la science-fiction. De mĂȘme, alors que lâĂ©nergie nuclĂ©aire avait gagnĂ© une meilleure image par rapport Ă lâemploi des Ă©nergies fossiles dans le contexte des risques liĂ©s aux Ă©missions de gaz Ă effet de serre, lâaccident de Fukushima en 2011 nâa pas uniquement changĂ© lâopinion publique, mais Ă©galement toute la politique Ă©nergĂ©tique de certains pays. Ou encore, des liens sont Ă©tablis entre les risques sanitaires connus liĂ©s Ă lâutilisation de lâamiante et les propriĂ©tĂ©s encore incertaines des nanoparticules.
(6) Ces équipements sont notamment les réservoirs, capacités et tuyauteries, massifs, cuvettes de rétention, structures et caniveaux.
(7) Le respect des obligations prĂ©vues par lâarrĂȘtĂ© du 4 octobre 2010 enserrĂ©es dans un calendrier est surveillĂ© attentivement par lâadministration qui a prĂ©vu dâeffectuer un minimum de 300 inspections annuelles de ces installations entre 2013 et 2017.
(8) La directive Seveso III : quelle transposition en droit français ?, Maßtre M.-P., Environnement et dév. durable n° 10, Oct. 2012, étude 12
(9) LâĂ©tude de danger devra dĂ©montrer quâont Ă©tĂ© mis en Ćuvre un POI et un SGS pour les installations Seveso seuil haut.
(10) MĂ©langes de produits incompatibles, MinistĂšre du DĂ©veloppement Durable â DGPR/SRT/BARP
(11) Site Seveso : la communication à chaud, Pitrat D., Préventique n° 122, mars-avril 2012
(12) Pour 87 % des rĂ©pondants Ă lâĂ©tude menĂ©e par le cabinet Deloitte en 2014 : Reputation@Risk Survey Report, Content Date : 27 oct 2014 (Last Reviewed : Oct 2014), conducted by Forbes Insights on behalf of Deloitte. Etude menĂ©e auprĂšs de plus de 300 dirigeants (membres du conseil dâadministration, de directions gĂ©nĂ©rales, ou risk executives) dâentreprises exerçant dans les principaux secteurs industriels et rĂ©parties sur lâensemble du globe. Informations supplĂ©mentaires disponibles sur www.deloitte.com/reputationrisksurvey.
(13) Les facteurs organisationnels et humains dans la maĂźtrise des risques majeurs, Ineris, 21 mars 2014