Laissez faire les professionnels de la communication de crise. Le grand public ne sait pas vraiment en quoi consiste la gestion de crise et le sauvetage de réputation. Les gens pensent qu’en gros cela permet de résoudre les problèmes. Est-ce que nous gérons aussi les situations qui n’ont aucun rapport avec les médias ? Quels outils utilisons-nous ? Comment savons-nous quelle stratégie employer ? Que disons-nous aux médias ? Comment savons-nous de quoi les médias ont réellement besoin, par opposition à ce dont ils disent avoir besoin ?
Nos clients sont confrontés à des situations inattendues et désagréables : instabilité financière, restructurations, poursuites judiciaires, conflits syndicaux, enquêtes des autorités règlementaires, etc. Toutes ces situations doivent être gérées de manière appropriée, car elles peuvent provoquer de graves problèmes.
Chaque situation est unique. Pour atteindre vos objectifs, vous devez adapter votre stratégie à chaque cas de figure. Comme pour les dossiers juridiques, ce serait une erreur d’employer toujours la même approche.
Et dans tout cela, que pense le client ? L’approche adoptée lui importe peu. C’est le résultat qui compte pour lui, et vite.
Quand les clients sont en (très) mauvaise posture, l’un des dangers qui les guettent est d’être noyés sous les conseils. Il y a toujours des gens pour donner leur avis, même quand il n’est pas sollicité. La plupart de ces gens ne savent pas du tout de quoi ils parlent. Le pire, ce sont les conseils, certes bienveillants, des amis, des membres de la famille, voire de la coiffeuse de la sœur d’un cousin (véridique !). Les clients doivent ignorer ce fatras de conseils peu éclairés, au risque de se retrouver submergés par des avis contradictoires.
Ils doivent laisser leur avocat et leur équipe de communication de crise stratégique faire leur travail. Ceux-ci pourront alors travailler plus efficacement et le résultat n’en sera que meilleur.
Un problème se profile à l’horizon ? Le client doit affronter tout de suite le problème, avant que les choses se gâtent. Certains clients le comprennent tout de suite. Ils veulent être prêts à faire face à tous les problèmes.
Le meilleur moyen de limiter les dégâts est précisément d’empêcher ces dégâts de se produire. Si vous vous y prenez bien, personne n’en saura jamais rien et le problème n’aura jamais existé. Pas besoin d’être devin pour cela. Faites confiance à votre instinct. S’il vous dit que quelque chose cloche, c’est qu’il y a un problème.
Le problème : les dirigeants d’une entreprise savaient qu’une restructuration allait bientôt avoir lieu et s’attendaient à des départs massifs, notamment parmi les cadres dans lesquels l’entreprise avait beaucoup investi, car les gens n’aiment pas les changements.
La solution : nous avons présenté les modifications de manière rassurante et encouragé les employés à les considérer comme autant d’opportunités. Les dirigeants ont publié des newsletters et des articles dans l’intranet dans lesquels ils décrivaient combien ils avaient confiance en l’avenir de l’entreprise.
Le résultat : nous avons surpassé les attentes du client. Il n’y a pas eu d’exode massif – le taux de départ a même diminué de 50 %.
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Un patient dans une clinique de désintoxication pour les stars insultait et menaçait les autres patients et les employés. La clinique risquait d’être critiquée voire attaquée à la fois par les autres patients, les médias et l’ensemble de la population. Nous avons pris les devants et rédigé des lettres et un document de questions-réponses pour expliquer que l’équipe de direction de la clinique avait résolu le problème et que la clinique était un endroit sûr. Nous avons aussi préparé un plan de gestion de crise qui est devenu leur référence.
Vous êtes déjà dans la tourmente ? Si les médias sont impliqués, vous avez deux options.
La première option, c’est tout simplement de tuer dans l’œuf le problème. C’est probablement la stratégie la plus difficile à mettre en œuvre pour le consultant en communication de crise. Vous devez agir avant que le journaliste ait investi beaucoup de temps dans le sujet et vendu l’idée à son rédacteur en chef. Après cela, il sera trop tard.
Vous devez adopter une approche toute en nuance. Pas de maladresse ni de mot mal choisi. Quelle stratégie de communication de crise sera la plus à même de trouver un écho auprès des médias ? Pouvez-vous proposer au journaliste un sujet ou un point de vue encore plus alléchant ? Comment pouvez-vous procéder sans le vexer ou sans lui donner à penser qu’il a levé un (gros) lièvre ?
Il ne suffit pas de se poser ces questions. Vous devez connaitre les réponses et agir vite.
Une organisation de premier plan était sur le point d’effectuer toute une série de modifications et a fait appel à nous pour éviter de se trouver en mauvaise posture. Nous avons identifié un moyen de présenter les choses qui empêcherait les médias de s’intéresser davantage à la situation de l’entreprise. Peu de médias en ont parlé. Les rares allusions publiées dans la presse ont été positives ou bien sous la forme d’un simple entrefilet. Donc le client a été très satisfait.
La deuxième option est la stratégie de communication de crise dite du « pivot », qui consiste à attirer l’attention sur autre chose. Cette approche est utile quand on ne peut pas empêcher les médias de parler d’un sujet donné. Heureusement, vous avez des moyens à votre disposition pour améliorer les choses. Pour choisir la bonne tactique, tenez compte de ce qui a été fait avant, de l’intérêt du public pour le sujet et des dommages déjà infligés à la réputation de votre client.
Vous êtes obligé d’être dans la réactivité, pas dans la proactivité ? Attention à la manière dont vous formulez vos dénégations. Partez des faits et choisissez soigneusement chaque mot utilisé. Vous pouvez être proactif ? Placez la charge de la preuve sur votre adversaire. Forcez-le à prouver ses allégations. Votre client a-t-il bonne réputation et est-il considéré comme crédible ? Sa réputation est-elle bonne, donc elle doit être protégée, ou bien est-elle mauvaise et il a donc besoin de se racheter une réputation ?
Le problème : dans une crèche, un enfant a été accusé de harcèlement envers un autre enfant. La mère a menacé de poursuites et a attiré l’attention de nombreux médias. La police et les autorités chargées de la petite enfance ont lancé une enquête.
La solution : la situation évoluait très vite. Notre stratégie était tout aussi évolutive, pour anticiper les futurs rebondissements. Nous avons rédigé une déclaration pour les médias et une lettre adressée aux parents et aux agences gouvernementales. Nous avons aussi écrit des scripts pour les appels passés individuellement à chaque famille dont un enfant allait à cette crèche. L’objectif de toutes les communications était de rassurer et de réconforter les familles.
Le résultat : les parents ont été rassurés. Aucun d’entre eux n’a retiré son enfant de la crèche. La crèche a continué à percevoir des aides de l’état. L’enquête a prouvé l’innocence de la crèche, et les médias n’en ont plus parlé. Tout le monde est passé à autre chose.
Vous êtes en train de recoller les morceaux ? Le pire scénario, c’est lorsqu’on fait appel à vous quand le client est déjà K.O. Sa réputation a déjà été mise à mal, et le temps ne joue pas en votre faveur. Pour récupérer les choses, vous devez commencer par faire un tri, ce qui demande encore plus de temps et d’énergie. Les possibilités sont beaucoup plus limitées et le prix à payer est souvent beaucoup plus élevé.
Le problème : une banque a mal géré le licenciement de son PDG et directeur financier, et a suscité une vive polémique dans les médias.
La solution : on a fait appel à nous pour sauver les meubles. Un journaliste voulait faire un reportage axé sur l’après-crise, basé en grande partie sur des spéculations. Nous avons réussi à l’en empêcher en lui proposant quelque chose d’encore plus alléchant : une interview avec le président, s’il patientait 24 heures. Nous avons tiré profit de ce répit pour bien préparer l’interview et modifier l’angle donné à toute l’histoire.
Le résultat : la couverture médiatique initiale a été vite remplacée par des articles élogieux sur la vision de la banque pour l’avenir.
Quelles sont les conséquences possibles ?
Persuader la partie adverse de négocier. Votre objectif est de gagner. Les moyens d’y arriver comptent moins que le résultat final.
Parfois, la meilleure approche est d’engager des poursuites.
Un groupe de rock très connu était en litige avec une chaine de télévision concernant une marque déposée, mais il n’arrivait à rien. Nous avons rendu les détails publics. Nous avons lancé des poursuites et obtenu suffisamment d’écho dans les médias pour couvrir de ridicule la chaine de télévision. Cela a permis à notre client de signer un accord juteux à l’amiable.
Mais tous les désaccords n’ont pas besoin (voire ne devraient pas) atterrir devant les tribunaux, ou dans les pages des journaux.
Quand deux amis ont créé ensemble une ligne de vêtements, ils étaient en totale symbiose. Mais au fur et à mesure que leur succès allait croissant, des dissensions sont apparues. L’un voulait se concentrer sur la conception des vêtements. L’autre se rendait compte qu’ils étaient en train de devenir une véritable entreprise, avec de nombreux employés et des revenus à sept chiffres. Ils ont donc divisé les responsabilités entre la partie créative et la partie commerciale, mais cela n’a fonctionné qu’un temps.
Le conflit qui a émergé portait sur quelle partie de l’entreprise pouvait prendre les décisions. Notre rôle n’était pas de jouer les médiateurs. Il consistait simplement à peser sur la stratégie et la communication pour faire gagner notre client.
Empêcher la publication d’un article. Si vous voulez empêcher un épisode malencontreux de se retrouver dans les journaux, vous devez être très proactif.
Un organisme de bienfaisance de premier plan faisait l’objet d’une enquête des autorités règlementaires. Un grand groupe de presse avait eu vent de quelque chose et avait commencé à fouiner. Le client était terrifié à l’idée que l’organisation se retrouve à laver son linge sale en public.
Nous avons réussi à détourner l’attention du journal. Tout d’abord en assurant à la journaliste qu’il n’y avait pas d’urgence à en parler – aucun autre journal ne s’y intéressait. Cela nous a permis de gagner du temps. Puis en négociant un accord avec la journaliste : s’il devait y avoir une enquête (ce que nous n’avons en rien confirmé) qui concluait que des fautes avaient été commises, nous lui donnerions toutes les informations qu’elle souhaitait. En échange, elle a accepté de ne rien écrire avant la conclusion de l’enquête.
L’épilogue : six mois plus tard, un nouveau problème a fait surface et l’avocat du client a voulu à nouveau faire appel à nous parce que nous avions si bien su protéger leur réputation par le passé. Le client a refusé, arguant que nous ne nous étions « pas beaucoup foulés ». En l’espace de quelques jours, le client s’est retrouvé la cible des médias.
C’est l’inconvénient de faire un travail si bon qu’il semble facile…
Éviter les articles à charge. Si vous avez réussi dans la vie, vous risquez de provoquer des jalousies ou de bouleverser votre secteur ou industrie. Ces rivaux ou ces jaloux adoreraient vous voir faire la culbute et seraient enchantés d’aider les médias à vous nuire. Parfois, il s’agit d’un employé mécontent.
Un dirigeant avait été averti que son entreprise risquait d’être la cible d’une campagne de dénigrement dans une revue professionnelle. Un membre du conseil d’administration a conseillé au PDG de nous contacter et de se préparer au pire. La probabilité était forte que des articles négatifs soient publiés, mais tout n’était pas encore joué. Nous ne voulions pas intervenir auprès du journal et créer un problème, s’il n’était au courant de rien et ne comptait rien publier de négatif.
Nous avons donc préparé un argumentaire pour prouver que les allégations étaient fausses, et préparé le client. Il fallait avoir la bonne attitude. Le PDG ne devait pas être agressif, car cela ne résout rien. L’objectif était de convaincre en douceur le journaliste qu’il se basait sur des informations erronées et que la publication d’un article nuirait à sa réputation de journaliste intègre et scrupuleux.
Comment gérer un article à charge ? Commencez par déterminer ce que le journaliste croit savoir et si les allégations sont exactes ou non.
Si elles sont fausses : vous pouvez contacter le journaliste et lui donner des éléments à titre officieux. Si votre démarche réussit, l’histoire sera bien vite oubliée.
Si elles sont vraies : vous allez devoir vous fendre d’une explication.
Puis, si le journaliste veut parler à quelqu’un, identifiez qui est la personne la plus qualifiée pour cela. Ce choix est important. Il détermine qui représentera l’organisation, mais aussi si vous voulez restreindre ou non l’accès des médias au porte-parole. Est-ce que le consultant en communication de crise doit s’exprimer au nom de l’entreprise ? Est-ce à une personne travaillant dans le service de communication de l’entreprise ? Est-ce que cela devrait être le PDG ?
Atténuer les choses ou les présenter sous un autre angle. Ne paniquez pas si vous ne pouvez pas empêcher une quelconque anecdote fâcheuse d’être publiée. Il y a toujours d’autres moyens de gérer la situation.
Un fonctionnaire gratte-papier avait envoyé un document quelconque (mais au ton menaçant), sans vérifier qui en était le destinataire. Malheureusement, il s’agissait d’un journaliste célèbre. Il a été indigné. Bientôt, le document et son ton peu engageant étaient partout sur Facebook, Instagram et les médias traditionnels.
Ce n’était qu’un malentendu. Aurait-on pu éviter cela en gérant la situation avec plus de doigté ? Sans le moindre doute. Mais il était trop tard pour le regretter.
Il fallait maintenant apaiser les choses et donc présenter le contexte, expliquer ce que cela signifiait et rassurer le public sur le fait que son animateur vedette ne risquait rien. Nous avons identifié et contacté tous les principaux influenceurs.
Puis nous avons gardé les éléments les plus convaincants pour les médias les plus importants. Les autres médias, convaincus par le changement de point de vue opéré, leur ont emboîté le pas. Et le tour était joué !
Le grand public n’avait vu et entendu que notre client. Nous avions défini la stratégie à suivre et le message à communiquer, mais nous étions restés dans l’ombre. Les gens n’avaient pas besoin de connaitre notre existence, qui aurait pu les amener à se demander pourquoi on avait fait appel à nous.
Inverser les rôles avec les médias. Faites peser la charge de la preuve sur la partie adverse, pour que ce soit à elle de prouver ses allégations. Comment ? Vous devez redéfinir la donne. Donnez l’exclusivité de votre version des faits au groupe de médias le plus influent. Pourquoi cela les intéressait-il ? Parce que vous leur offrez un avantage, un moyen de se différencier de leurs concurrents – une information inédite ou un point de vue différent.
Puis tout s’enchainera. Les médias ont tendance à avoir un tempérament moutonnier. D’autres journalistes voudront surenchérir dans la même voie. C’est votre chance. Tant que vous pourrez tirer parti de cette concurrence entre médias, vous garderez le contrôle de la situation.
Une affaire portant sur des accusations de détournement de fonds importants au sein d’une entreprise avait pris des proportions énormes. On n’a fait appel à nous que très tard. Le gouvernement avait déjà imposé sa version aux médias. Nous avons choisi un journaliste travaillant pour un titre national, lui avons promis qu’il pourrait interviewer le client et lui avons présenté notre version. Nous n’espérions pas faire disparaitre les accusations. Mais nous avons fait en sorte que la version de notre client soit entendue, et avons réussi à modifier la manière dont l’affaire était couverte dans les médias.
Le problème : un organisme humanitaire était miné par les accusations de quelques anciens employés mécontents. C’était un sujet porteur pour les médias de la région, et ils s’en donnaient à cœur joie.
La solution : présenter le sujet au plus gros journal régional, qui n’en avait pas parlé, et n’évoquerait probablement le sujet qu’une seule fois.
Le résultat : comme nous nous y attendions, le journaliste a fait un seul article, dans lequel il a présenté la situation de manière dépassionnée, puisqu’il était loin du champ de bataille. Bien sûr, les accusations étaient mentionnées. Mais les déclarations du client, ainsi que celles des agences gouvernementales qui avaient pris sa défense, figuraient aussi en bonne place. Le client s’en est très bien tiré et les accusations sont apparues comme infondées. L’affaire a très vite disparu des médias, y compris des médias régionaux.
Créer matière à articles. Cela peut parfois être utile de susciter l’attention des médias. C’est notamment le cas dans le cadre de poursuites judiciaires si votre objectif est d’inciter l’autre partie à conclure un accord à l’aimable.
Un chanteur connu qui aimait jouer au golf était en litige avec un homme d’affaires propriétaire d’un club de golf privé. Les sommes d’argent en jeu étaient dérisoires. Mais le chanteur tenait à gagner pour des raisons morales. Il a donc intenté un procès. Nous avons réussi à obtenir une forte couverture médiatique qui éclairait la partie adverse sous un jour crû. Quelques heures seulement après la publication des premiers articles, l’homme d’affaires a appelé le gérant de son club de golf en lui disant de mettre un terme au différend au plus vite.
Avertissement : les deux camps peuvent se livrer à ce petit jeu. Si vous pensez qu’il y a une chance que l’autre bord s’essaie à la même approche, vous devez les coiffer au poteau.
Les réseaux sociaux et les blogs négatifs. Vous êtes malmené par la blogosphère ? Vous voulez endiguer l’armée de journalistes-citoyens ?
Les blogs et les réseaux sociaux ont une vision beaucoup plus large, disons, des règles journalistiques à observer (s’ils les respectent d’ailleurs) que les médias traditionnels. Ils sont aussi beaucoup moins enclins à corriger ou retirer les informations inexactes.
Le problème : un magasin de luxe était la cible de jeunes mamans indignées qui s’étaient emparées d’Internet pour critiquer la réputation de l’entreprise. La raison ? L’allaitement maternel.
La solution : nous avons rapidement apaisé les choses en rédigeant des réponses appropriées et en les publiant directement en réponse aux commentaires publics de l’accusatrice. Nous avons fait en sorte que le site retire les commentaires infondés et fait appel à des influenceurs parmi les jeunes mamans pour défendre notre client. Quand les médias se sont intéressés à la chose, nous leur avons demandé de lire les réponses que nous avions publiées précédemment, ce qui a diminué leur intérêt.
Le résultat : il n’y a eu aucune couverture médiatique de l’incident. Nous avons non seulement réussi à faire effacer les commentaires erronés, mais la personne qui avait lancé la campagne de dénigrement s’est excusée auprès du propriétaire du magasin et a retiré ses commentaires négatifs.
Chaque situation est unique, mais la plupart des problèmes de faible intensité peuvent être résolus en allant directement à la source : la personne mécontente, celle qui a lancé la campagne, ou bien encore celle qui crie le plus fort. Si vous arrivez à les persuader, elles relaieront elles-mêmes votre message. Cela ne veut pas dire pour autant que vous devez répondre directement et individuellement à chaque personne sur Facebook, Twitter et Instagram.
Si vous êtes la cible d’une avalanche de critiques et de demandes de renseignements (comme c’est souvent le cas lors des rappels de produits, des pertes ou vols de données personnelles, ou de menaces sur la sécurité ou la santé), vous devriez former une équipe dédiée exclusivement à la gestion des réseaux sociaux. Comme pour toutes vos communications, votre message doit être soigneusement réfléchi et votre équipe devra suivre scrupuleusement le script rédigé à son intention.
Se faire entendre
Ce n’est pas juste au tribunal que les choses se jouent. C’est aussi auprès du grand public.
Les médias ne vous décrivent pas sous un jour favorable ? Ils ne vous écoutent même pas, car ce que vous avez à dire ne les intéresse pas ?
Intentez un procès. C’est un moyen très efficace d’obtenir l’attention, non seulement de la partie adverse, mais aussi des médias et du public.
Pourquoi ? Parce que c’est là que les désaccords se règlent. Les médias et le grand public accordent donc plus de poids aux arguments présentés dans le cadre d’un procès.
Prenons pour exemple les poursuites engagées par le « roi des emprunts pourris », Bill Gross, contre PIMCO, la société d’investissement qu’il avait cofondée en 1971, et qui l’avait remercié. Il y avait décrit de manière très négative l’atmosphère d’intrigue, de coups de couteau dans le dos et de cupidité dans laquelle il avait été évincé.
Les médias ont adoré. Il a ainsi réussi à ramener son éviction sur le devant de la scène et à placer PIMCO sur la défensive.
C’est une tactique courante pour la gestion de crise et de réputation. Examinons maintenant les cas de deux clients, qui avaient des problèmes différents, mais ont employé des tactiques similaires.
Une société de premier plan a renvoyé trois dirigeants après qu’une enquête interne a montré qu’ils s’étaient servis dans la caisse. Les employés licenciés ont déposé plainte, en affirmant qu’ils n’avaient rien fait de mal. Les médias ont pris fait et cause pour les employés « lésés ». En effet, les médias pensent toujours que les employeurs ne sont pas dignes de confiance.
Après un conflit interne, un organisme caritatif s’est scindé en deux groupes opposés, qui se faisaient concurrence pour conquérir la même cible. L’une des parties s’est empressée d’informer les médias, et leur version des faits est devenue la version officielle. L’autre partie en a eu assez d’être décrite comme des méchants.
La société du premier exemple et la partie de l’organisme qui s’était mis les médias à dos devaient renverser la vapeur, et vite.
La solution ? L’utilisation intelligente de certains mots et tournures de phrase dans les documents de dépôt de plainte afin de formuler des accusations, clarifier des faits, justifier certaines positions et redéfinir des objectifs. C’est ensuite que les choses deviennent franchement amusantes. Tout d’un coup, vous êtes le meilleur copain des journalistes. Pourquoi cela ? Parce que vous leur faites une offre qu’ils ne peuvent pas refuser : un rapport soulignant les détails particulièrement intéressants de la plainte et des informations officieuses. Vous leur apportez aussi un point de vue différent.
Le résultat ? Exactement comme espéré, nous avons réussi à modifier la couverture médiatique qui était donnée. Dans ces deux affaires, la partie adverse a perdu son avantage et bu la tasse.
La leçon à retenir : avant de déposer une plainte, pensez non seulement aux avantages que votre client pourra en tirer grâce aux décisions du juge, mais aussi par le biais du verdict rendu par le grand public. Vous ne faites pas que défendre un dossier juridique. Vous présentez les choses de manière à modifier la perception du public.
Ne vous laissez pas emporter par la colère. La vengeance est un plat qui se mange froid.
Vous êtes un tendre ? Alors, fermez les yeux. Nous allons maintenant présenter l’aspect plus sombre de la communication de crise.
La partie adverse vous porte sur les nerfs ?
Respirez un bon coup. Inspirez. Expirez. Ça va mieux maintenant ? Bien.
Réfléchissez. Quel est votre objectif ?
Un accès de rage vous soulagera, mais pas pour longtemps. La colère reviendra, en un cercle vicieux sans fin. Se mettre en colère n’avance à rien.
Concentrez-vous plutôt sur le fait de rendre les coups. Soyez malin. Les petits coups par-derrière sont faciles, mais n’infligent pas vraiment de dégât.
Vous devez jouer sur le long terme, ce qui, certes, demande du temps, de l’énergie et des ressources.
Analysez les points faibles de votre adversaire. Identifiez son talon d’Achille. Et appuyez là où cela fera le plus mal.
C’est le côté obscur de la communication (oui, la référence à La guerre des étoiles est délibérée !). En général, les consultants en communication de crise protègent ou réparent une réputation. Mais leur activité moins connue consiste à détruire la réputation des autres. Plus ils y parviennent rapidement, plus vite l’autre camp acceptera de négocier pour mettre fin à son calvaire.
Pour cela, les poursuites judiciaires peuvent être utiles, et encore plus si elles sont médiatisées, pour ajouter à la pression.
- Un grand groupe de divertissement voulait utiliser les ressources, pourtant protégées par les droits d’auteur, d’une petite société. Il s’est servi sans plus demander d’autorisation ni payer de droits d’auteur. La petite société a déposé plainte et médiatisé l’affaire. La grosse société a alors dû capituler.
- Des conflits internes divisaient un organisme humanitaire. Chaque camp rivalisait pour convaincre les mêmes cibles. L’atmosphère était irrespirable. L’une des parties s’est retrouvée accablée par les médias, et a fait appel à nous. Que pouvions-nous faire ? Nous avons orienté les médias vers une version plus favorable à nos clients et mis à mal l’autre camp. La partie adverse a perdu l’oreille des médias et ne s’en est jamais remise.
- Un investisseur a engagé des poursuites contre un cabinet de gestion de patrimoine pour avoir mal investi son argent et presque tout perdu. La presse financière a adoré. L’image du cabinet a beaucoup souffert et les affaires ont périclité.
Changer de cap à temps
Parfois, les gens font exactement ce qu’il faut, soit parce qu’ils comprennent les choses intuitivement, soit parce qu’ils ont employé de bons consultants.
Prenons l’exemple de Whole Foods, la chaine d’épicerie haut de gamme.
« Au début, nous avons fait des erreurs. Nous voulons le reconnaitre », ont déclaré les co-PDG Walter Robb et John Mackey dans une vidéo postée sur YouTube.
Ce sont les excuses les plus plates qu’on puisse imaginer, et c’est cette petite phrase que les médias ont reprise. Pour l’instant, pas de problème. L’entreprise voulait reprendre le contrôle de la situation et regagner la confiance du public.
Mais en prenant du recul, on voit bien que Whole Foods n’avait pas le choix. Le service de défense des consommateurs de la ville de New York l’avait dans le collimateur pour avoir trafiqué les balances afin de faire payer plus cher les fruits, légumes et viandes à leurs clients. L’enquête durait depuis un an, et les services de la ville avaient alerté la chaine de magasins à plusieurs reprises pour lui donner la possibilité de rectifier les choses, mais Whole Foods avait continué à flouer ses clients.
Une semaine seulement avant cette déclaration, la chaine s’était plainte publiquement des agissements de la ville, l’accusant d’exagérer le problème.
Pourquoi cette volte-face ? Que s’était-il passé entre-temps ?
Quelqu’un avait dû se rendre compte que la stratégie initialement adoptée ne fonctionnait pas et nuisait à la réputation de l’entreprise. On avait donc décidé de changer de tactique.
C’est en cela que consiste la gestion de réputation et de crise. Définir l’objectif réel du client, qui peut être différent de ce que le client imagine. Puis concevoir une stratégie pour l’atteindre.
Toutes les entreprises dont le succès dépend de la perception et la fidélité de leurs clients sont dans le même bateau. Leur instinct pourra être de se battre pour défendre leur réputation. Mais à quel prix ?
L’objectif, au bout du compte est de garder, voire d’accroitre le nombre de clients. On peut y parvenir en les convainquant qu’ils comptent pour l’entreprise et que le but de celle-ci est de proposer un excellent produit ou service au meilleur prix.
Tout le reste n’est que du blabla.
Les règles à suivre
Yoda avait une règle : «fais-le, ou ne le fais pas, mais il n’y a pas d’essai. »
Même chose pour Kermit la grenouille, dans le Muppet Show : « la vie est comme un film. Écris ta propre fin. »
Adopter cette philosophie vous aidera dans la vie et dans votre carrière professionnelle.
La vie peut être basée sur différents principes. Choisissez ceux qui sont les plus difficiles à suivre pour vous, et tenez-vous-y. Vous excellerez dans votre travail et vos clients seront satisfaits.
Dans la gestion de réputation, la règle à suivre est que ce qui compte, c’est de gagner. Mais c’est souvent un chemin semé d’embûches. Faire preuve de subtilité et d’habileté est très important.
Commencez par définir ce que vous voulez réellement accomplir et identifier les obstacles. Certains obstacles seront faciles à déceler, d’autres non.
Pour certains clients, le processus sera difficile. Les émotions jetteront la pagaille. Ce sera dur de croire qu’un employé que l’on croyait modèle a commis un acte répréhensible. Ce sera peut-être difficile de réparer les torts, et encore plus difficile d’obtenir réparation.
Mais il faut savoir surmonter ces émotions. Surtout si vous faites partie du conseil d’administration et que les faits se sont déroulés sous votre nez. Vous êtes considéré comme responsable.
Quand il s’agit d’une affaire personnelle, la colère et le sentiment de trahison peuvent obscurcir l’esprit et empêcher de mettre en œuvre les stratégies plus adaptées.
Mais vous devez surmonter ces émotions. Quelqu’un a été renvoyé ? Un délit a été commis ? Les autorités (la police, les services règlementaires, etc.) risquent d’être impliquées ? Vous allez déposer plainte ?
C’est là que vous devez prendre une décision. Faites-vous une déclaration publique ? Ou bien décidez-vous d’attendre en espérant que personne ne remarque rien ?
Pour vous aider à savoir quoi faire, voilà deux questions à vous poser : êtes-vous une personne ou une organisation de premier plan ? Êtes-vous une ONG, un organisme humanitaire ou une association à but non lucratif (car ceux-ci sont censés être absolument irréprochables) ? Si vous avez répondu oui, il est très peu probable que les faits ne soient pas dévoilés.
Le principal risque c’est de se tromper dans ses calculs. Si vous ne dites rien et que l’affaire est rendue publique, vous aurez l’air coupable. Ce n’est jamais une bonne chose.
Faire face aux feux de l’actualité
Vous connaissez les dictons et autres idées reçues depuis que vous êtes petit. Peu importe que ce qu’ils affirment soit souvent faux. Ils sont faciles à mémoriser et simplifient la vie. Avec eux, pas besoin de réfléchir.
Vous avez un rhume ? Nourrir un rhume. Affamer une fièvre. Les médecins désapprouvent ? Peu importe !
Vous voulez un petit coup de pouce du destin ? Faites un vœu devant une étoile filante. Si seulement la vie pouvait être aussi simple. Nous décrocherions tous le gros lot.
Votre réputation est menacée dans les médias ? Faites profil bas, cela va passer. Cela peut être une bonne idée dans certains cas. Mais pas dans tous.
Quelles sont les options possibles quand vous êtes en pleine tourmente ? Tout dépend d’où en est l’affaire.
Si elle n’en est qu’à ses débuts, il vous reste une chance de vous en sortir complètement indemne. Mettez cette chance à profit.
Prenons l’exemple d’une société qui s’était débarrassée de deux de ses cadres dirigeants sans explication. C’était un évènement important, mais dépourvu de contexte ou de sens. Cela a créé un vide dans lequel les médias et le grand public se sont engouffrés, au détriment de la société.
Comment remédier à la situation ? Une équipe de communication de crise est intervenue. Elle a expliqué que la société avait décidé de prendre une nouvelle direction.
Les journalistes préfèrent présenter un angle différent plutôt que de redire la même chose, ils ont donc repris la version communiquée par l’équipe de communication, et l’ancienne version a vite été oubliée.
Et si les médias répètent la même chose, négative pour vous, en boucle ? Si vous gardez le silence, vous empirez les choses. Les médias penseront alors que vous cachez quelque chose, ce qui est d’ailleurs souvent le cas. Cela leur donnera encore plus envie d’insister et de fouiner.
Pour tuer une rumeur ou la faire dévier sur autre chose, vous devez présenter une explication plausible et convaincante.
Les réactions trop molles n’arrangent rien. Elles ne font que jeter de l’huile sur le feu. Pensez à la controverse portant sur la violence conjugale au sein de la ligue de football américain, quand une vidéo du joueur Ray Rice en train de battre sa fiancée a fait surface en 2014. Ou au présentateur de télévision Brian Williams qui avait brodé sur sa participation à une opération militaire en Irak en 2007.
Une chose ne fait aucun doute : les médias ne passeront pas à autre chose tant que leur appétit ne sera pas satisfait.
Je t’aime, moi non plus
Quand Maria Sharapova a été prise à se doper, ses sponsors l’ont tous lâchée.
Cette leçon, qui porte sur une vedette du monde du sport, s’applique à tout le monde.
En résumé, vous devez protéger votre image de marque. Si la personne qui « représente » votre organisation auprès du public fait quelque chose qui n’est pas cohérent avec votre image de marque et vous n’intervenez pas, alors votre marque en souffrira.
Comment savoir quelle décision prendre ?
Il n’y a pas de règles bien définies. Chaque situation est unique. Mais en général, les options comportant le moins de risque sont celles qui vous protègent le plus.
Lâcher tout. Vous prenez votre distance avec la personne controversée. C’est une réaction rapide.
Retirer votre appui verbalement : après la mise en accusation d’Adrian Peterson, un joueur de football américain de l’équipe des Minnesota Vikings, pour maltraitance sur enfants, le PDG de Verizon a publié un message sur LinkedIn concernant les violences domestiques, plutôt que de ne parler que du cas du joueur. Ce message a permis d’élargir le débat au-delà de la situation du joueur sponsorisé par Verizon ainsi que de mettre en avant l’excellent travail effectué par HopeLine, une ONG en partie financée par Verizon.
Retirer tous les produits dérivés et annuler les campagnes de communication : après la publication d’un vidéo montrant Ray Rice, un joueur de football américain pour les Baltimore Ravens, en train de s’attaquer à sa fiancée, Modell’s et Dick’s Sporting Good, deux chaines de magasins de sport américains, ont retiré les maillots portant son numéro de leurs magasins.
Mettre un terme à vos campagnes futures, mais garder les produits dérivés : deux jours après la mise en accusation de Michael Vick, un joueur de football américain pour les Philadelphia Eagles, pour avoir organisé des combats de chien, Nike a annoncé qu’elle ne lancerait pas la nouvelle ligne de chaussures conçue avec Michael Vick. Mais la marque n’a pas pour autant retiré de ses magasins les produits associés au joueur.
Faire front. Nike a conservé son soutien à Tiger Woods en dépit de ses frasques, mais a modifié son attitude. Les sponsors doivent évaluer jusqu’où ils sont prêts à aller pour soutenir une célébrité.
Attendre et voir (ce qui se traduit en général par un lâchage). Le cycliste Lance Armstrong et Nike avaient tissé une relation durable, et comme toutes les relations longues, il était difficile d’y mettre un terme. Mais Nike a fini par jeter l’éponge : « en raison des preuves insurmontables prouvant que Lance Armstrong s’est dopé et a menti à Nike depuis plus de 10 ans, nous annonçons avec beaucoup de tristesse que nous avons mis fin à notre contrat avec lui. »
Repositionner son image de marque. Cette option est pleine d’ironie. Nintendo avait un jeu vidéo intitulé « Mike Tyson’s Punch-Out! » (KO avec Mike Tyson !). Quand l’ex-femme du boxeur a accusé celui-ci de l’avoir battue, Nintendo a vite remplacé le nom du jeu par « Punch-Out! » (KO !)
Toute publicité est bonne à prendre. C’est l’option la plus intéressante (et la plus inhabituelle). Quand l’affaire OJ Simpson a éclaté et pris des proportions ahurissantes, l’agence de publicité de la marque Hertz a déclaré : « au bout du compte, l’entreprise a bénéficié d’un gain de visibilité…nous sommes persuadés que cela a été une très bonne chose sur le plan publicitaire. »
Vous ne savez toujours pas quelle option choisir ? Demandez conseil à quelqu’un dont l’avis ne sera pas influencé par ses émotions ou des motifs financiers. Quand une affaire vous touche de près, c’est difficile d’y voir clair. Cela obscurcit votre jugement. Vous avez besoin de quelqu’un qui vous dise ce que vous avez besoin d’entendre, et non ce que vous avez envie d’entendre. Puis faites confiance à votre instinct.