Manager les relations publiques en période de crise
En octobre 2014, Joseph Clancy a pris la tête des Services secrets américains après une série de failles de sécurité qui avaient provoqué la démission de Julia Pierson en tant que directrice de l’agence gouvernementale. En mai 2014, le département a commencé à recevoir des réponses à appels d’offres de la part d’agences de communication et de communication de crise, afin d’aider le département à faire face à l’attention témoignée par les médias. Il était plus que temps de s’y atteler.
Les médias critiquaient durement l’agence depuis 2009, du fait de l’enchainement de défaillances dans la sécurité qui avait fortement remis en cause la crédibilité des Services secrets rappelle l’expert français en communication Florian Silnicki à la tête de la prestigieuse agence parisienne de communication LaFrenchCom. L’un des derniers exemples, le 19 septembre 2014, s’était produit lorsqu’un individu armé avait sauté par-dessus la clôture et couru vers la Maison-Blanche. Avant cela, l’agence avait laissé un criminel armé prendre l’ascenseur avec le Président Obama et en 2012, plusieurs agents des Services secrets envoyés en Colombie en amont d’un sommet avaient été rappelés après avoir été accusés d’avoir amené des prostitués à leur hôtel.
Cet épisode avait coûté son poste au prédécesseur de Julia Pierson, Mark Sullivan. Julia Pierson avait été la première femme nommée à la tête de l’agence en 149 ans d’existence, mais elle avait aussi dû démissionner des suites d’un scandale.
« C’était à prévoir », a déclaré Deb Hileman, Président et Directrice générale de l’Institut de gestion de crise (Institute of Crisis Management ou ICM), en s’appuyant sur des études menées par l’ICM montrant que deux tiers des crises organisationnelles sont à la fois prévisibles et évitables. « Si ces problèmes avaient été résolus dès 2009, les Services secrets ne se retrouveraient pas en pleine crise à présent ».
Solution à long terme
C’est peut-être un problème d’arrogance. Ou bien, en dépit d’un nombre troublant d’incidents embarrassants, d’une conviction bien ancrée au sein des Services secrets que l’agence est en acier trempé.
Dans la plupart des cas, ce genre d’attitude des dirigeants provoque une belle pagaille, que les Relations Publiques doivent aider à résoudre.
« C’était sans aucun doute un problème de culture d’entreprise », a assuré un consultant en RP s’exprimant anonymement. « L’enchainement d’incidents quasi ininterrompus a servi de révélateur. C’est aussi dû en partie au paysage médiatique – tout le monde est perpétuellement espionné. Certaines de ces histoires n’auraient même pas été mentionnées il y a 20 ans. Démissionner est un début, mais cela ne suffit pas à régler le problème, qui est beaucoup plus profond. »
Grâce aux agences de Relations Publiques, les Services secrets pourront redorer leur image et récupérer la confiance du peuple américain, mais cela prendra du temps.
« Les RP peuvent jouer un rôle important », affirme Deb Hileman. « Si les RP sont incluses dans le processus de décision au plus haut niveau, elles peuvent influer sur la manière dont l’organisation assure la préparation à la gestion de crise et met en place un processus d’alerte en amont. »
Cependant, les RP ne peuvent passer à l’action qu’une fois des réformes mises en place.
« Quand quelque chose est irrémédiablement déficient, la communication à elle seule ne pourra résoudre le problème », souligne Matt Wagner, Responsable régional pour les USA et les affaires publiques et en charge des bureaux d’Edelman à Washington. « C’est seulement lorsque les dirigeants se sont mis d’accord sur la manière de résoudre le problème que la communication peut contribuer à expliquer leurs intentions et à rebâtir la confiance des parties prenantes. »
Il ajoute que lorsque les marques et les organisations sont confrontées à une crise particulièrement grave, « beaucoup de gens se tournent vers l’équipe des RP avant même d’avoir arrêté une stratégie pour résoudre le problème. Mais la communication ne doit avoir lieu qu’après la mise en œuvre de nouvelles initiatives et un changement de stratégie. »
Les Services secrets souffrent déjà d’un déficit d’image. La confiance dans le gouvernement est passée de 53 % en 2013 à 37 % en 2014, selon le baromètre de confiance d’Edelman.
L’agence, dont la réputation est maintenant ternie, se retrouve confrontée à une tâche colossale. En fonction de ce que l’agence fera, les RP pourront contribuer à influer sur la manière dont ses actions seront perçues. « Tout [ce que font les Services secrets] est basé sur la confiance », affirme Wagner. « Ce sont ces gens qui sont chargés de protéger le Président et sa famille, donc leur rôle est très important. À l’avenir, communiquer de manière ouverte et honnête sera un élément essentiel. »3 conseils de RP quand la réputation de votre marque n’est plus que ruine par Bill Burton, Vice-président exécutif et Directeur de Global Strategy Group
La « marque » des Services secrets est importante, car quand cette marque est forte, il y a moins de risque que des gens se préparent à attaquer la Maison-Blanche.
La situation des Services secrets peut être instructive pour les organisations petites et grandes qui se retrouvent confrontées à une crise grave.
Si on parle souvent de « problème de communication », on parle rarement de « problème de stratégie ». C’est pourtant bien la stratégie qui doit être repensée pour résoudre le problème de RP qui en découle. Cela va au-delà du simple fait de cautériser les plaies.
■ Acceptez et reconnaissez vos erreurs. N’importe quelle organisation dans la même situation devrait commencer par admettre le problème et accepter ses responsabilités. Ce processus a commencé avec la démission de Julia Pierson. Puis une autre étape est nécessaire. Il pourra s’agir de la déclaration d’intention de la nouvelle personne chargée par le Président de diriger les Services secrets, ou d’une interview dans laquelle les améliorations à venir sont clairement définies.
■ Apportez de vrais changements. Puis il faut passer à l’action. Il est impératif de faire la preuve que les agents ne respectant pas les règles ou coupables de tout manquement seront punis. Il faut prouver que a) les politiques mises en œuvre assurent la sécurité des personnes qu’elles sont censées protéger et que b) de nouvelles politiques et formations ont été mises en place pour éviter les problèmes de sécurité et erreurs de jugement qui ont eu lieu par le passé.
■ Proposez un point de vue alternatif et positif. Les Services secrets accomplissent des actes héroïques incroyables tous les jours, partout aux États-Unis. Il ne peut qu’être utile de le rappeler et de s’efforcer d’obtenir une bonne couverture médiatique à ce sujet.
Les Services secrets sont certes par définition secrets, mais cela ne signifie pas qu’il faille négliger leur image et leur réputation.
Décideurs, apprenez à gérer les relations publiques de manière efficace