- L’importance de la communication interne en gestion de crise
- Le rôle stratégique de la communication interne en situation de crise
- Informer sans créer de panique
- Favoriser un dialogue continu avec les collaborateurs
- Les outils et canaux à privilégier pour une communication interne efficace
- Transformer les employés en ambassadeurs de la communication de crise
- Exemples concrets d’entreprises en gestion de crise interne
- La communication interne post-crise : rassurer, remobiliser et restaurer la fierté d’appartenance
- Communication interne et correction de l'image de marque
L’importance de la communication interne en gestion de crise
En période de crise, la communication interne joue un rôle vital dans la survie et la résilience d’une organisation rappelle Florian Silnicki, Expert en communication de crise et Président Fondateur de l’agence LaFrenchCom. Trop souvent, les entreprises se focalisent sur leur image externe et négligent leurs employés, alors que ces derniers sont en première ligne pour maintenir l’activité et relayer les informations. Une communication de crise efficace envers les collaborateurs permet non seulement d’éviter le chaos, mais aussi de renforcer la cohésion et la confiance au sein de l’entreprise. Explorons en détail pourquoi et comment mettre en place une communication interne stratégique en situation de crise, depuis la diffusion d’informations sans créer de panique jusqu’à la remobilisation des équipes après la crise, en passant par le choix des bons outils et l’implication des employés en tant qu’ambassadeurs.
Le rôle stratégique de la communication interne en situation de crise
Dès qu’une crise survient, la communication interne devient un levier stratégique pour guider l’organisation. Elle est cruciale parce qu’elle maintient la cohésion et l’alignement de tous les collaborateurs face à l’adversité. Selon une étude du cabinet McKinsey, 70 % des entreprises ayant une communication interne efficace sont plus susceptibles de surmonter une crise avec succès et d’assurer la gestion des enjeux sensibles d’image de marque et de réputation. En informant rapidement les salariés de la nature de la crise et des actions engagées, on évite la désinformation et on donne du sens à leur travail malgré les turbulences.
Une communication interne maîtrisée a un impact direct sur la perception des employés et la stabilité de l’organisation. D’une part, elle entretient la confiance : 87 % des salariés estiment que des communications transparentes et fréquentes en période de crise renforcent leur confiance envers l’entreprise. D’autre part, elle prévient les dysfonctionnements internes. Des messages clairs, cohérents et relayés à temps permettent de limiter les rumeurs et d’éviter l’émergence de tensions ou de conflits liés à la crise. En effet, une communication transparente et régulière rassure les employés, ce qui réduit l’anxiété collective et aide à maintenir la stabilité interne.
Il a été démontré que les entreprises investissant dans une bonne communication interne peuvent réduire de 25 % les risques de conflits internes en période de crise. Cela s’explique par le sentiment d’unité généré lorsque tout le monde reçoit le même niveau d’information. Les collaborateurs se sentent partie prenante de la réponse apportée : leur sentiment d’appartenance s’en trouve renforcé, tout comme leur motivation à aider l’entreprise à traverser la tempête. Une étude du cabinet PwC a d’ailleurs révélé que 91 % des salariés considèrent la communication interne efficace comme cruciale pour le succès de l’entreprise, et 74 % des organisations affirment avoir été mieux préparées aux situations difficiles grâce à cette bonne communication interne. En somme, informer et fédérer en interne pendant une crise n’est pas un luxe, mais bien une nécessité stratégique pour sauvegarder la cohésion et la pérennité de l’entreprise.
Informer sans créer de panique
En situation de crise, il faut informer rapidement sans pour autant affoler les troupes. Tout l’enjeu est de dire la vérité de manière calme et maîtrisée. Les employés doivent percevoir la communication interne comme une source d’information fiable, claire et régulière. L’entreprise doit donc communiquer tôt, avec transparence, tout en contrôlant le ton pour éviter tout vent de panique. Cela signifie partager les faits vérifiés, expliquer ce qui est fait pour gérer la situation, et reconnaître ce qui n’est pas encore connu – le tout avec un langage rassurant et professionnel. Une bonne pratique est d’adopter un ton neutre et factuel, en évitant les spéculations ou un excès d’émotion. Les dirigeants doivent informer et rassurer en montrant que la situation est prise au sérieux et sous contrôle.
Transparence ne veut pas dire alarmisme. Il s’agit d’être honnête sur la crise tout en soulignant les mesures mises en place pour y faire face. Par exemple, communiquer sur les plans d’action en cours, les équipes mobilisées et les prochaines étapes aide à éviter le vide informationnel anxiogène. Il est démontré que rassurer les parties prenantes en interne, en montrant concrètement que des mesures appropriées sont prises, permet de maintenir la confiance et d’éviter la panique. À l’inverse, la dissimulation d’informations ou la minimisation de la gravité de la crise peut avoir des effets désastreux : les employés risquent de se sentir trompés, ce qui entame leur confiance et peut aggraver la situation. Les collaborateurs s’attendent à une transparence totale de la part de leur entreprise en temps de crise ; cacher la vérité ou mentir finit presque toujours par se retourner contre l’organisation.
Communiquer fréquemment, même pour dire qu’on n’a pas encore toutes les réponses, est préférable au silence radio. Un manque d’information laisse place aux spéculations et aux rumeurs, qui peuvent se propager à grande vitesse – surtout à l’ère des réseaux sociaux – et alimenter la panique. Comme le souligne le consultant en gestion de crise, même si les dirigeants d’entreprises n’ont pas réponse à tout, ils doivent oser communiquer et traiter les employés en adultes. Il est crucial de montrer que l’on est conscient de la situation et qu’on fait tout pour la résoudre. Informer les employés en continu, sans zones d’ombre, coupe l’herbe sous le pied aux rumeurs (lesquelles sont rarement conformes à la réalité que l’entreprise souhaite communiquer). Cette communication proactive et sincère permet de garder la main sur le récit de la crise en interne. En pratique, cela peut se traduire par des points d’information quotidiens ou hebdomadaires, des FAQ internes mises à jour en temps réel, ou encore un fil d’actualités sur l’intranet dédié à la crise. L’objectif est que chacun sache ce qu’il se passe et ce que fait l’entreprise, sans avoir besoin de prêter foi aux bruits de couloir.
Enfin, informer sans affoler implique d’accompagner les messages d’instructions claires. Par exemple, rappeler les consignes de sécurité, les changements temporaires de procédure ou les ressources mises à disposition (hotline, référents à contacter, etc.) aide les employés à se concentrer sur “quoi faire” plutôt que sur “que va-t-il se passer”. Cette approche factuelle et orientée solutions aide à canaliser l’attention sur l’action plutôt que sur la peur. En montrant que la direction a un plan et en donnant à chacun un rôle à jouer, on occupe le terrain de l’anxiété avec de la clarté. La communication interne de crise vise ainsi à rassurer sans infantiliser : on partage la réalité de la crise, tout en rappelant que des professionnels compétents gèrent la situation et que les employés peuvent contribuer, à leur niveau, à surmonter la difficulté.
Favoriser un dialogue continu avec les collaborateurs
La communication en temps de crise ne doit pas être un monologue descendant. Au contraire, il est indispensable d’instaurer un dialogue continu avec les collaborateurs. Cela signifie créer des canaux pour écouter les remontées du terrain, répondre aux questions et impliquer les équipes dans la résolution de la crise. Pourquoi maintenir ce lien fort avec les employés ? D’abord parce qu’un salarié qui se sent écouté sera plus enclin à adhérer aux décisions difficiles et à rester mobilisé. Ensuite, parce que les remontées d’informations des collaborateurs peuvent aider la direction à ajuster sa stratégie en temps réel. En période d’incertitude, chacun voit une partie du problème : il est précieux de recueillir les préoccupations et suggestions de ceux qui font tourner l’entreprise au quotidien.
Un dialogue ouvert et régulier contribue à réduire l’anxiété et le sentiment d’impuissance. Par exemple, permettre aux employés de poser des questions directement à la direction (via des sessions de questions-réponses en direct, des boîtes à questions anonymes ou des FAQ interactives) dissipe bien des inquiétudes. Lors de la crise du COVID-19, de grandes entreprises ont instauré ce type d’initiatives. Cisco, par exemple, a mis en place des réunions virtuelles hebdomadaires où les dirigeants discutaient en direct des préoccupations des employés et répondaient à leurs questions, renforçant ainsi la confiance et le moral des troupes. De même, L’Oréal a eu recours à des webinaires et réunions d’équipe virtuelles pour maintenir un dialogue constant avec ses collaborateurs pendant la pandémie, les tenant informés des changements et des mesures de sécurité – une approche qui a entretenu un sentiment de confiance et de partenariat au sein des équipes.
Maintenir le contact peut prendre plusieurs formes concrètes :
- Réunions d’information régulières (en présentiel ou en visioconférence) pour faire le point sur la situation. Par exemple, un point hebdomadaire avec toute l’entreprise ou avec chaque département.
- Canaux de discussion ouverts sur la messagerie interne ou le réseau social d’entreprise, où chacun peut poser des questions ou partager son ressenti. Il peut s’agir d’un salon dédié sur Slack/Teams ou d’un forum sur l’intranet spécialement créé pour la crise.
- FAQs et boîtes à idées : alimenter une Foire Aux Questions interne en temps réel et inviter les collaborateurs à soumettre leurs interrogations ou propositions. Cela donne un espace d’expression et évite que les mêmes questions circulent sans réponse.
- Entretiens individuels ou en petits groupes : les managers de proximité ont un rôle clé pour relayer les préoccupations de leurs équipes. Ils peuvent organiser des points informels (par téléphone ou visioconf) afin de garder le lien avec chaque collaborateur, surtout si l’équipe est en télétravail ou dispersée.
L’important est de garder la conversation bilatérale. Une communication strictement descendante peut être vécue comme froide et distante, là où un échange interactif humanise la relation employeur-employés. D’après une étude Deloitte, les organisations qui encouragent un feedback régulier et l’expression des employés ont un niveau d’engagement quatre fois supérieur aux autres. En renforçant les échanges et en prêtant une réelle écoute aux préoccupations des collaborateurs, les entreprises peuvent non seulement traverser la tempête, mais également en sortir renforcées. Un dialogue transparent apaise les inquiétudes et peut même faire émerger de bonnes idées du terrain pour gérer la crise. Les employés, sentant que leur voix compte, se mobilisent davantage et forment un véritable partenariat avec la direction pour affronter la situation.
Enfin, ce dialogue continu nourrit la cohésion. Partager ensemble les difficultés et les solutions crée un esprit d’équipe face à l’adversité. Chaque employé se sent partie prenante de la réponse apportée, et non simple exécutant mis devant le fait accompli. Pendant une crise, on a souvent affaire à un flux d’informations changeant : en maintenant ouvertes les voies de communication, on peut ajuster les messages, clarifier des malentendus rapidement et garder tout le monde sur la même longueur d’onde. Cette agilité communicationnelle est un atout majeur pour traverser les périodes troublées. En somme, communiquer, ce n’est pas seulement informer, c’est aussi converser.
Les outils et canaux à privilégier pour une communication interne efficace
Lorsque la crise éclate, disposer des bons outils de communication interne fait la différence pour diffuser les messages de manière rapide et uniforme. Il est crucial de choisir des canaux adaptés qui toucheront tous les collaborateurs, qu’ils soient au siège, sur le terrain ou en télétravail. D’après une enquête de l’Institut de la Communication d’Entreprise, 92 % des organisations estiment que l’utilisation d’outils de communication interne est cruciale pour assurer un échange fluide et cohérent en période de crise. Concrètement, voici les canaux à privilégier :
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L’intranet : C’est le canal central en temps de crise. Un intranet bien structuré permet de publier en temps réel des annonces officielles, des comptes-rendus et des ressources utiles (procédures à suivre, contacts d’urgence, documents explicatifs). L’information y est accessible à tous de manière égale. En exploitant l’intranet plutôt que de simples emails, on s’assure de communiquer des informations toujours à jour, consultables à tout moment. On peut par exemple y épingler une bannière d’alerte sur la page d’accueil pour les messages importants, ou créer une rubrique spéciale « Info crise » alimentée quotidiennement. Certaines entreprises vont jusqu’à déployer des notifications push sur l’intranet (pop-up ou alertes obligatoires) pour s’assurer que chaque salarié prenne connaissance des messages critiques.
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Les messageries internes instantanées (Slack, Microsoft Teams, ou autres chats d’entreprise) : En temps de crise, la réactivité est primordiale. Les messageries instantanées offrent la possibilité de diffuser des messages brefs en quelques secondes à l’ensemble du personnel ou à des groupes ciblés. Elles sont idéales pour les alertes rapides (« le site X est temporairement fermé », « réunion de crise à 14h », etc.), mais aussi pour garder le contact informel. On peut y créer des canaux dédiés à la crise, où l’on poste des mises à jour fréquentes et où les employés peuvent poser des questions. Ces plateformes encouragent aussi la communication horizontale entre collègues, ce qui aide à résoudre rapidement certains problèmes opérationnels.
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Le courrier électronique et les newsletters : L’email reste utile pour les communications plus formelles ou détaillées. En cas de crise, il est pertinent d’envoyer des notes d’information internes récapitulatives (par exemple un compte-rendu quotidien de la situation) afin que chacun dispose d’un point de situation complet dans sa boîte de réception. Des newsletters internes spéciales « crise » peuvent être mises en place, contenant les dernières nouvelles, une section FAQ, et éventuellement un message de la direction. Veillez cependant à ne pas noyer les employés sous trop d’emails : combinez le mail avec d’autres canaux, et assurez-vous que chaque envoi apporte une information nouvelle ou essentielle. Certains outils permettent de marquer un mail comme « lecture obligatoire » ou de suivre qui l’a lu, ce qui peut être utile pour les messages critiques.
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Les réunions de crise et webinaires internes : Rien ne vaut la communication en direct lorsque c’est possible. Organiser des points d’information en visioconférence (webinaires) permet d’humaniser la communication, de délivrer des messages avec empathie et de répondre directement aux questions. Les dirigeants ou le comité de crise peuvent par exemple tenir un town hall meeting virtuel (réunion plénière) chaque semaine pour faire le point en direct avec l’ensemble du personnel. Ce format interactif, éventuellement enregistré pour ceux qui n’ont pas pu assister en live, renforce le sentiment d’unité. Durant la crise sanitaire, de nombreuses entreprises ont multiplié les webinaires pour maintenir le lien malgré la distance. Ces événements virtuels doivent être bien préparés pour capter l’attention (par exemple en incluant des présentations dynamiques, des sondages en direct, etc., afin d’éviter la “lassitude des écrans”). L’avantage est de pouvoir adapter le message en temps réel en fonction des réactions et questions, ce qui donne une communication plus vivante et efficace qu’une note statique.
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Les plateformes collaboratives et réseaux sociaux d’entreprise : Au-delà de l’intranet classique, des outils comme Workplace by Facebook, Yammer, ou d’autres réseaux sociaux internes peuvent servir à diffuser des informations de manière plus communautaire. On peut y poster des vidéos du PDG adressant un message à chaud, lancer des discussions de groupe, ou encore mettre en avant des témoignages d’employés sur le terrain. Ces espaces participatifs permettent aussi de détecter rapidement les préoccupations ou rumeurs qui émergent et d’y répondre publiquement. Ils transforment la communication en échange multi-directionnel et encouragent l’entraide entre collègues.
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Les supports physiques (si applicable) : Dans certaines situations (par exemple, une crise affectant des sites industriels où tous les employés n’ont pas un ordinateur), il ne faut pas négliger les affichages sur site ou les réunions d’information en petits groupes sur le terrain. Annoncer les consignes de sécurité au haut-parleur, distribuer des mémos papier aux équipes non connectées, sont des canaux à considérer pour toucher 100 % des collaborateurs. L’important est d’adapter les supports au contexte de votre entreprise (digitalisée ou non, équipes dispersées, horaires décalés, etc.).
Chaque canal a son rôle, et ils sont complémentaires. L’intranet assure la consistance et la traçabilité de l’info, la messagerie donne la rapidité, les réunions apportent l’humain et l’interactif, etc. En combinant ces outils de communication interne, l’organisation maximise ses chances de joindre l’ensemble des collaborateurs rapidement et efficacement. Par ailleurs, il est conseillé de synchroniser la communication interne avec la communication externe : idéalement, les employés doivent apprendre les nouvelles importantes par l’interne avant ou au pire en même temps que le grand public, jamais après. Si un salarié découvre des informations cruciales sur son entreprise via les médias avant de les avoir reçues en interne, le sentiment de confiance peut être sérieusement entamé. Une stratégie bien orchestrée utilisera donc ces canaux internes en amont des communiqués externes, afin que les collaborateurs soient toujours dans la boucle en premier. En résumé, privilégiez les canaux internes rapides, accessibles et interactifs durant la crise, pour garder vos troupes informées et soudées.
Transformer les employés en ambassadeurs de la communication de crise
Une communication de crise réussie fait des collaborateurs non pas de simples destinataires, mais de véritables acteurs de la diffusion d’informations. En temps normal déjà, on parle souvent de salariés ambassadeurs de l’entreprise – en période de crise, ce concept prend toute son importance. Les employés bien informés, impliqués et fiers de leur organisation peuvent devenir les meilleurs relais de la bonne parole, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’entreprise. Ils contribuent à combattre les rumeurs et à propager les messages positifs, amplifiant l’efficacité de la communication de crise.
Comment mobiliser les employés pour qu’ils deviennent ces ambassadeurs ? La première condition est de les informer de manière privilégiée. Si l’entreprise traite ses collaborateurs avec respect en leur donnant les bonnes informations au bon moment, elle s’assure la loyauté de ses meilleurs communicants : ses employés. Chaque salarié dispose en effet de ses propres canaux de communication (réseaux sociaux, discussions avec des collègues, avec des clients ou des proches) qui peuvent démultiplier la portée des messages officiels. Par exemple, un employé convaincu de la stratégie de réponse de son entreprise pourra en parler positivement autour de lui ou sur LinkedIn, contribuant ainsi à rassurer l’écosystème élargi (clients, partenaires, candidats potentiels) et à protéger la réputation de la marque. À l’inverse, un employé laissé dans le flou risque de partager son inquiétude ou sa colère, alimentant involontairement la crise. Investir dans la communication interne, c’est s’offrir un réseau d’ambassadeurs spontané.
Ensuite, il convient d’impliquer directement les collaborateurs dans le processus de communication. Plutôt que de tout centraliser au niveau des dirigeants, l’entreprise a intérêt à s’appuyer sur des relais internes. Par exemple, identifier des experts internes ou des responsables d’équipe et les encourager à prendre la parole sur leurs sujets de compétence. Ceux-ci sont souvent plus crédibles et plus proches de leurs collègues ; leurs explications seront mieux acceptées et comprises par le terrain. Paul Barton recommande ainsi de “se reposer sur ses employés en termes de communication, notamment sur les experts” car ils sont parfaits pour faire passer l’information et servir d’intermédiaires entre la direction et le reste des collaborateurs. Concrètement, on peut mettre en place un réseau de référents internes pour la crise : par exemple un ambassadeur par département ou par site, chargé de relayer les messages clés, de remonter les questions récurrentes et de s’assurer que chacun a bien compris les directives. Ce système de communication cascade crée une proximité qui renforce la confiance. De plus, en valorisant ces ambassadeurs, on nourrit leur sentiment d’appartenance.
Il est également crucial de donner aux employés les outils et le cadre pour s’exprimer de manière responsable. Avec l’essor des réseaux sociaux, chaque employé peut potentiellement devenir un porte-parole public de l’entreprise, pour le meilleur ou pour le pire. Il est donc recommandé d’établir des chartes de communication claires, notamment sur l’usage des médias sociaux en temps de crise. Ces chartes, idéalement élaborées avant qu’une crise ne survienne, expliquent ce qui est encouragé (par exemple partager les communiqués officiels, témoigner de son vécu de façon authentique) et ce qui est déconseillé voire interdit (divulguer des informations confidentielles, commenter des rumeurs non vérifiées, critiquer publiquement l’entreprise en plein chaos, etc.). L’objectif n’est pas de museler la parole des employés, mais de la guider pour qu’elle soit alignée avec la stratégie de crise. En formant et en sensibilisant les salariés à ces bonnes pratiques, on leur donne confiance pour prendre la parole à bon escient.
Un salarié ambassadeur, c’est aussi quelqu’un qui incarne les valeurs de l’entreprise face à la crise. Il convient donc de cultiver en interne une culture d’entreprise forte, basée sur la confiance et la responsabilisation. Si les employés sentent que la direction leur fait confiance, ils seront d’autant plus loyaux. Un adage en communication dit qu’on ne peut pas tout contrôler, surtout pas l’ensemble des conversations informelles – en revanche, on peut donner envie aux employés de relayer le bon message. Cela passe par la fidélisation des employés et la transparence : plus on les traite en partenaires, plus ils auront naturellement tendance à soutenir l’entreprise y compris dans leurs discussions privées ou publiques.
En pratique, transformer ses employés en ambassadeurs durant la crise peut signifier :
- Partager en avant-première avec eux les communiqués importants avant leur diffusion publique, pour qu’ils se sentent privilégiés et prêts à répondre si on les interroge.
- Encourager les partages positifs : par exemple, fournir aux collaborateurs des contenus “prêts à diffuser” (infographies, messages clés, FAQ) qu’ils peuvent utiliser pour expliquer la situation à leurs équipes ou même sur les réseaux sociaux personnels.
- Valoriser les bonnes initiatives : mettre en lumière les employés qui, par leurs actions ou leurs communications exemplaires, contribuent à gérer la crise (par exemple, un collaborateur qui a résolu un problème critique et qui en parle sur le réseau interne pourrait être félicité publiquement).
- Impliquer les représentants du personnel : travailler main dans la main avec les délégués du personnel, les syndicats ou le CSE le cas échéant, pour qu’ils deviennent aussi des relais de confiance auprès des salariés. Eux aussi sont des ambassadeurs potentiels si on les inclut dans le dispositif de communication.
L’idée directrice est de faire confiance aux collaborateurs et de les considérer comme partie intégrante de la stratégie de communication de crise. Lorsque les employés sentent qu’on leur donne un rôle actif, ils sont plus enclins à porter la voix de l’entreprise. Un exemple parlant : lors d’une crise technique complexe, une entreprise pourrait laisser ses ingénieurs s’exprimer sur un blog ou en interne pour expliquer la problématique en termes simples. En mobilisant ces experts, le message gagne en crédibilité et en humanité. De même, si l’entreprise traverse une crise de réputation, ce sont souvent les employés qui, par leurs témoignages sincères, pourront défendre le véritable visage de la société. De plus, dans notre monde hyperconnecté, un message relayé par des dizaines ou centaines d’employés sur LinkedIn aura une portée bien supérieure à un communiqué de presse classique. Bien géré, ce bouche-à-oreille numérique contrôlé peut grandement aider à rétablir la vérité et la confiance autour de l’entreprise en crise.
En somme, un employé informé et engagé devient le meilleur antidote aux rumeurs. Plutôt que d’essayer de tout contrôler (ce qui est illusoire), mieux vaut équiper et engager ses collaborateurs pour qu’ils deviennent une armée de communicateurs positifs. Cette approche collaborative de la communication de crise transforme une potentielle faiblesse (les fuites d’informations et la rumeur) en force (des milliers d’ambassadeurs proactifs).
Exemples concrets d’entreprises en gestion de crise interne
De nombreuses entreprises ont éprouvé l’importance d’une bonne communication interne en situation de crise – parfois en réussissant à mobiliser leurs équipes de manière exemplaire, parfois en en payant le prix fort lorsqu’elles l’ont négligée. Voici quelques cas concrets illustrant l’impact de la communication interne en période difficile :
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Airbnb (pandémie de COVID-19, 2020) : Face à l’effondrement de l’activité touristique, Airbnb a très vite déployé une communication interne transparente et soutenue. La direction a instauré des mises à jour régulières pour informer les employés des mesures prises (sécurité sanitaire, nouvelles politiques de travail, aides disponibles, etc.). Cette stratégie de transparence a porté ses fruits : un rapport interne a révélé que 90 % des employés se sentaient en sécurité et valorisés grâce à cette communication claire de la part de l’entreprise. Malgré la situation économique difficile, Airbnb a ainsi réussi à maintenir la confiance et l’engagement de ses équipes.
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Hertz (pandémie de COVID-19, 2020) : À l’inverse, la société de location de voitures Hertz a pâti d’une communication interne défaillante durant la crise. Les informations tardives ou incomplètes ont laissé les employés dans l’incertitude, ce qui a exacerbé leur démoralisation. Résultat : une chute de productivité et une augmentation du turnover ont été constatées, alors même que l’entreprise traversait déjà de graves difficultés financières. Ce manque de coordination et de transparence en interne a aggravé la crise pour Hertz, illustrant le coût d’une communication interne mal gérée.
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L’Oréal (crise sanitaire, 2020) : Le géant des cosmétiques a su adapter rapidement sa communication interne lors de la pandémie. L’entreprise a mis en place des webinars réguliers et des réunions virtuelles pour garder le contact avec l’ensemble de ses collaborateurs à travers le monde. Les employés étaient tenus informés en temps réel des évolutions organisationnelles (nouvelles procédures, protocoles sanitaires, reprise progressive d’activité) et pouvaient poser leurs questions. Cette approche proactive et digitale a permis de maintenir un sentiment de confiance et d’esprit d’équipe malgré la distance, et a renforcé la résilience du groupe face à la crise.
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Air France (crise interne, conflits sociaux) : La compagnie aérienne a traversé ces dernières années des périodes de tensions sociales intenses (grèves, désaccords entre la direction et le personnel). Consciente que la mauvaise ambiance interne menaçait son bon fonctionnement, Air France a mis en œuvre une communication interne plus transparente et ouverte. Des canaux de dialogue (groupes de travail, réunions d’écoute, communications régulières sur les décisions) ont été établis pour rallier les employés autour d’objectifs communs. Cette ouverture a contribué à apaiser les tensions et à limiter l’impact négatif des conflits sur les opérations et l’image de la compagnie. Le cas Air France montre qu’une crise interne peut être désamorcée en partie grâce à une meilleure écoute et à l’implication des collaborateurs dans la recherche de solutions.
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Starbucks (crise de réputation, 2018) : Suite à un incident aux connotations racistes dans l’un de ses cafés aux États-Unis, Starbucks a réagi non seulement par des excuses publiques, mais aussi par une action interne forte : la fermeture exceptionnelle de tous ses établissements pendant une demi-journée pour former 175 000 employés sur les préjugés et la non-discrimination. Ce choix audacieux de communiquer d’abord en interne (via la formation et le dialogue autour des valeurs de l’entreprise) a fait de chaque barista un ambassadeur de la nouvelle culture prônée par Starbucks. L’initiative a non seulement redoré l’image de la marque, mais a aussi engagé une discussion nationale sur l’équité raciale. Les employés, formés et sensibilisés, se sont faits les relais du message de tolérance de l’entreprise, montrant comment communication interne et externe peuvent se renforcer mutuellement en temps de crise.
Chaque exemple illustre à sa manière une leçon clé. Airbnb nous apprend que la transparence proactive rassure et soude les équipes dans la tourmente. Hertz rappelle que l’absence de communication crée un vide rempli par l’angoisse et peut précipiter la chute. L’Oréal démontre l’efficacité des outils digitaux pour garder le lien et l’engagement, tandis qu’Air France souligne l’importance du dialogue social pour résoudre une crise interne. Enfin, Starbucks montre qu’en mobilisant ses employés autour de solutions concrètes, on peut transformer une crise en opportunité de réaffirmer ses valeurs. Pour toute organisation, s’inspirer de ces cas revient à retenir qu’en période de crise, vos employés peuvent être votre talon d’Achille… ou votre principale force, selon que vous saurez ou non bien communiquer avec eux.
La communication interne post-crise : rassurer, remobiliser et restaurer la fierté d’appartenance
Une fois la crise passée ou du moins sous contrôle, le travail de communication interne n’est pas terminé – loin de là. L’après-crise est une phase délicate qu’il faut gérer avec autant d’attention, afin de tirer les enseignements du tumulte et de remobiliser les troupes pour l’avenir. Après une période éprouvante, les collaborateurs ont besoin d’être rassurés sur la situation, remerciés pour leurs efforts, et de retrouver une perspective positive qui ravive leur fierté d’appartenance à l’entreprise.
D’abord, il est essentiel de reconnaître le vécu des employés pendant la crise. Cela passe par des remerciements sincères de la part de la direction, adressés à l’ensemble du personnel. Par exemple, organiser une réunion (physique ou virtuelle) de clôture de crise où l’on souligne les réussites collectives, où l’on cite des équipes ou des personnes qui se sont illustrées, contribue à clore le chapitre sur une note de gratitude. Ce type de reconnaissance renforce le lien affectif entre l’employé et l’entreprise. Après une année de crise sanitaire, « il n’a jamais été aussi crucial de remobiliser, de recréer du lien, et de travailler la fierté d’appartenance » note ainsi une agence de communication interne. Montrer de la reconnaissance est le premier pas pour redonner de l’énergie : un collaborateur qui se sent valorisé sera prêt à repartir de l’avant.
Ensuite, la communication post-crise doit rassurer sur l’avenir. Les employés doivent comprendre ce qui a changé suite à la crise et comment l’entreprise se projette désormais. Il convient de communiquer sur les décisions prises pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise (nouveaux protocoles, investissements, plan de continuité mis à jour, etc.), ou sur la stratégie de relance si la crise a eu un impact commercial. Par exemple, si l’entreprise a traversé une crise financière, expliquer quelles mesures de redressement ont été engagées et quels premiers résultats se font sentir permettra de dissiper l’incertitude résiduelle. C’est aussi le moment de partager les enseignements tirés de la crise : qu’a-t-on appris de cette épreuve ? Quelles forces de l’organisation ont fait la différence ? Y a-t-il des processus à améliorer ? En faisant preuve de transparence sur ce bilan, on instaure un climat de confiance pour la suite, car les salariés voient que l’entreprise grandit de l’expérience traversée.
La remobilisation des équipes passe par un discours résolument tourné vers l’avenir, positif et fédérateur. Il s’agit de donner un nouvel élan. Par exemple, définir de nouveaux objectifs stimulants ou relancer des projets mis en pause peut redonner du souffle. La communication interne doit alors insister sur le rôle de chacun dans la construction de l’avenir post-crise : « Voilà où nous allons, et voilà comment votre contribution sera déterminante ». Cette projection vers l’avant redonne du sens au travail quotidien, qui a pu en perdre durant la crise. On peut aussi solliciter l’avis des employés sur les priorités à venir – via des ateliers de réflexion, des sondages internes – pour qu’ils se sentent acteurs du redressement ou de la nouvelle phase qui s’ouvre.
Parallèlement, il faut réparer les éventuelles cassures qu’a pu causer la crise. Si des tensions sont nées pendant la période difficile (par exemple entre services, ou entre la direction et le personnel), c’est le moment de les adresser. La communication post-crise peut inclure des sessions de feedback où l’on invite les collaborateurs à exprimer, de manière constructive, ce qui les a marqués négativement et positivement. Cela peut se faire via un questionnaire anonyme sur le ressenti vis-à-vis de la gestion de crise, ou des groupes d’expression. L’objectif est double : montrer qu’on est à l’écoute des frustrations éventuelles, et identifier les points d’amélioration pour le futur. Ce droit d’inventaire post-crise participe à tourner la page en permettant à chacun de s’exprimer sur ce qu’il a vécu.
Restaurer la fierté d’appartenance est également un enjeu majeur. Une crise peut ébranler le sentiment de fierté des employés, par exemple si l’image de l’entreprise a été ternie publiquement ou si des sacrifices difficiles ont été faits. Il faut alors reconstruire ce sentiment en valorisant tout ce qui peut l’être. Communiquer en interne sur les succès remportés malgré la crise – même s’ils sont modestes – est important. Par exemple, mettre en avant que l’entreprise a réussi à servir ses clients malgré les obstacles, ou que x projets ont abouti grâce à la ténacité des équipes, etc. On peut raconter des histoires inspirantes: des anecdotes d’employés ou d’équipes qui ont surmonté des défis pendant la crise. Ce storytelling interne contribue à forger une narrative positive commune.
Une autre approche est de célébrer la fin de la crise d’une façon appropriée. Cela peut prendre la forme d’un événement d’entreprise (même en virtuel) pour marquer le coup : une « journée de la résilience », un petit cadeau symbolique remis aux employés, ou l’inauguration d’un mur/cahier où chacun peut inscrire ce dont il est fier après cette période. Par exemple, EDF, après la tempête catastrophique de 1999 qui avait plongé une partie du pays dans le noir, a publiquement et en interne remercié ses collaborateurs pour leur mobilisation héroïque, ce qui a grandement renforcé la fierté en interne et amélioré l’image de l’entreprise auprès du public. Sans forcément aller jusqu’à une campagne publique, il est bénéfique de montrer en interne que l’on reconnaît l’héroïsme ordinaire dont ont fait preuve les équipes. Cela soude le collectif et ancre le sentiment d’appartenance : « nous avons traversé cela ensemble, et nous en ressortons grandis ».
Enfin, la communication post-crise doit préparer l’avenir en termes de culture d’entreprise. Une crise est souvent un révélateur de ce qui fonctionne bien et de ce qui doit changer. C’est le moment de réaffirmer les valeurs de l’entreprise. Par exemple, si la solidarité interne a été exemplaire, on peut décider de l’ériger en valeur cardinale et de continuer à la cultiver par des programmes dédiés. Si au contraire la crise a mis en lumière des manques (par exemple un déficit de communication à un moment donné), on peut annoncer les actions de formation ou d’investissement qui seront entreprises pour y remédier. En communiquant ainsi sur l’après, on montre qu’on ne retourne pas simplement « business as usual », mais qu’on entre dans une phase nouvelle, enrichie par l’expérience vécue.
En conclusion, la communication interne est un pilier incontournable de la gestion de crise. Avant, pendant et après la tempête, elle assure la circulation fluide des informations, aligne les efforts de chacun et maintient la confiance collective. Une communication interne bien menée en période de crise permet non seulement de limiter les dégâts à court terme (en évitant la panique, les rumeurs et la démobilisation), mais aussi de renforcer la résilience à long terme. Comme nous l’avons vu, informer avec transparence, écouter ses collaborateurs et les impliquer, utiliser les bons outils, faire de chaque employé un relais positif, et ne pas oublier l’étape cruciale du post-mortem une fois la crise passée, sont autant de bonnes pratiques pour transformer une situation difficile en démonstration d’agilité et de cohésion.
Aucune organisation n’est à l’abri d’une crise. Mais celles qui auront su préparer et placer leur communication interne au cœur du dispositif traverseront l’orage avec des équipes soudées, engagées et prêtes à repartir de plus belle une fois le ciel éclairci. En somme, prendre soin de ses employés par la communication en temps de crise, c’est investir dans la solidité et la pérennité de l’entreprise – car des collaborateurs bien informés et considérés feront toujours la différence dans les moments cruciaux.
Communication interne et correction de l’image de marque
La communication interne fait partie de la dynamique de construction de l’image.
L’image d’une entreprise dépend également de l’image qu’en diffusent ses salariés. En produisant un effet positif sur le climat interne d’une société, la communication interne joue un rôle essentiel sur l’image globale de l’entreprise en crise comme hors crise.
La communication interne s’est progressivement imposée comme discipline managériale en créant un esprit d’entreprise, en motivant les équipes… C’est aussi l’un des outils au service de la constitution de la « culture d’entreprise ».
Comment traduire des choix et enjeux stratégiques pendant une crise ?
- fédérer les collaborateurs d’une entreprise ou d’un groupe autour d’un nouveau projet d’entreprise, d’une nouvelle stratégie,
- dialoguer étroitement avec le personnel afin de transformer chaque collaborateur en ambassadeur des messages de l’entreprise,
- informer sur la politique de l’entreprise, sur sa performance économique et extrafinancière,
- accompagner le changement sensible pour le faire accepter et rendre acceptables les efforts nécessaires,
- recréer de la fierté d’appartenance à une entreprise après un moment difficile,
- désamorcer une crise naissante,
- restaurer le dialogue ou un climat social dégradé après un épisode social difficile comme un PSE, …