La communication de crise de FRAM

Charm-el-Cheikh crash

Le drame qui aurait pu être fatal à Fram

TOULOUSE, siège de Fram, 9 h 15 du matin, samedi 3 janvier. Moins de six heures après le crash du Boeing de Charm el-Cheikh qui a coûté la vie à 148 personnes, dont 125 clients de Fram, une première cellule de crise est organisée dans l’entreprise. Une conférence téléphonique entre Paris et Toulouse réunit la plupart des cadres dirigeants. Georges Colson est absent.

Le PDG est encore en vacances à ce moment précis, mais une vingtaine de personnes effondrées et abattues sont présentes, qu’elles aient été prévenues par la direction ou qu’elles soient venues spontanément après avoir entendu la nouvelle. Face à une telle catastrophe, les salariés et les dirigeants réagissent d’abord comme des femmes et des hommes.

Au même moment, Elvia, prestataire en assistance pour le groupe toulousain depuis 1993, prévenu dès 7 h 30 par ses propres plateformes internationales (l’information ne sera publique qu’à partir de la première dépêche de l’AFP à 7 h 46), se rapproche du voyagiste. Fram fait en effet partie de ses gros clients. Cette mobilisation très rapide a permis à l’entreprise toulousaine de traverser la tempête médiatique en échappant aux accusations qui auraient pu ruiner sa réputation.

Dès le samedi matin, la nouvelle est sur toutes les ondes, qui citent le nom de Flash Airlines comme celui de la compagnie aérienne en cause, puis celui de Fram, tour-opérateur principal. C’est sur le transporteur que se tournent tous les regards.

Cyrille Arcamone, directeur général de Burson Marsteller, cabinet de conseil en communication de crise, estime que les choses ont été bien faites. « Fram a bénéficié dans cette opération à la fois du capital sympathie qu’elle dégage, de sa notoriété bâtie sur une relation privilégiée, quasi familiale avec les clients et d’un fort sens du service, mais surtout de la parfaite maîtrise de la gestion de crise immédiate de l’accident par les autorités compétentes comme ADP (Aéroports de Paris), souligne-t-il. Un autre spécialiste, Yves Jambu-Merlin, vice-président d’Euro RSCG C&O, confirme : « Toute crise porte un nom. Celle-ci ne portera pas le nom de Fram. »

Ainsi, il n’y a pas eu d’images de familles livrées à elles-mêmes errant dans l’aéroport en attendant un avion qui n’arrivera jamais. Les équipes d’ADP et celles d’Elvia (qui a envoyé sur place un psychologue et une logisticienne) ont pris aussitôt en charge les membres présents des familles concernées. « Dans le cas de catastrophes de cette ampleur, explique Nicole Rodriguez Besson, directrice d’Elvia, les ministères concernés prennent très vite les choses en main. Nous avons travaillé en parallèle avec le Quai d’Orsay, le ministère des Transports et les Hôpitaux de Paris. »

Lorsqu’à 10 heures, samedi, un premier communiqué de presse de Fram est adressé à toutes les rédactions nationales et régionales, les familles en attente à Roissy ont déjà été soustraites aux regards des curieux. Et le voyagiste échappe donc à la macabre et difficile tâche de prise en charge des familles sur place ; il peut se concentrer sur le travail de l’après.

Le premier message public du voyagiste a été un mot de réconfort et de condoléances. Il a été accompagné immédiatement de la mise à disposition d’un standard téléphonique spécial à destination des familles et des agences qui ont vendu le forfait voyage. Dès les premières minutes, plus de 200 appels sont enregistrés, émanant aussi bien de membres de familles que d’amis ou de voisins, qui se demandent si ne figure pas sur la liste une de leurs connaissances.

Différents membres de Fram se chargent alors de joindre personnellement chacune des agences de voyages et proposent aux directeurs de contacter et prévenir eux-mêmes les familles concernées. A la fin de la journée, chacune des familles impliquées a été jointe individuellement.

Arrivé au siège en début d’après-midi, Georges Colson, « effondré mais très digne », selon les témoins présents, convoque une conférence de presse pour 16 heures. Se met en place alors la seconde partie du dispositif de gestion de crise, Georges Colson réaffirme à plusieurs reprises sur les ondes sa totale confiance dans les avions de la compagnie Flash Airlines qu’il qualifie alors de « très connue et sérieuse » et organise le voyage sur place des familles de victimes, programmé pour le mercredi ou le jeudi suivant. C’est le tour-opérateur lui-même qui se charge d’affréter un avion d’Air France. Georges Colson fera le voyage à bord d’un autre appareil, laissant les familles seules entre elles avec une équipe de soutien.

Dans la tourmente, Fram bénéficie encore une fois d’un concours de circonstances positives : la solidarité nationale manifestée par différents membres du gouvernement (quatre ministres ou secrétaires d’Etat et le président de la République) a tendance à oblitérer la responsabilité de Fram. Après le temps du deuil viendra celui de l’enquête. Se posera alors la question des indemnisations. Chez Fram, la tragédie de Charm el-Cheikh laissera des traces indélébiles.