Comment influencer les politiques publiques

L’art d’influencer les politiques publiques

La gestion des enjeux de communication de crise est sur le devant de la scène depuis des décennies. C’est un sujet souvent débattu dans le domaine des relations publiques, notamment parce qu’il s’agit d’un concept vaste, comportant de nombreux aspects. Quand on ajoute à cela le stress associé à la gestion de crise et les procédures tortueuses de politiques publiques, on obtient une grande complexité, notamment pour les employés plus juniors ou n’ayant que peu d’expérience de ces sujets. La gestion des problématiques en matière de politique publique doit être intégrée très tôt à la culture de votre organisation. N’attendez pas que les choses se gâtent, voilà le conseil délivré par Florian Silnicki, expert en communication de crise et fondateur de l’agence LaFrenchCom.

Les entreprises ont-elles le droit d’exprimer leur opinion sur les politiques publiques afin d’essayer de les influencer ?

Examinez les convictions de votre entreprise avant, pendant et après une crise. Ont-elles évolué ? L’entreprise ou l’organisation veut-elle changer sa position suite à la crise ?

C’est une bonne idée de faire ce genre d’exercice. N’ayez pas peur de tâtonner et de faire des erreurs quand vous gérez une problématique associée au développement de politiques publiques. Comment votre organisation pourrait-elle progresser et rester en phase avec les évolutions de la société ? Ce travail de réflexion doit autant que possible se faire en interne, car sinon votre entreprise risquerait d’être perçue comme désorganisée.

Ces tactiques ne s’appliquent pas uniquement aux entreprises, notamment du fait que de nombreuses grosses organisations, comme les organismes à but non lucratif internationaux et les organisations non gouvernementales essaient parfois d’opérer selon un modèle commercial.

Les organisations devraient prendre au sérieux la gestion des problématiques et considérer cela comme une composante de leur stratégie sur le long terme. Les dirigeants d’entreprise doivent s’assurer que cela fait partie de l’ADN de leur société. Quel est l’intérêt de consacrer du temps et de l’argent à influer sur les politiques publiques si vous échouez ensuite à gérer un sujet controversé et le public vous retire alors une partie de sa confiance ?

Pour se préparer au mieux à un scénario de gestion des problématiques, l’une des premières choses à faire est d’analyser le contexte pour bien comprendre qui sont les principaux intervenants, critiques, décisionnaires et soutiens actuels et potentiels. Si nécessaire, investissez dans des consultants, de la publicité ou de nouvelles technologies et fixez un budget réaliste sur la base de l’enjeu à l’horizon.

Les entreprises ont-elles le droit d’exprimer leur opinion sur les politiques publiques afin d’essayer de les influencer ? Pour ce faire, quel est l’équilibre souhaitable entre l’intérêt du public et les intérêts d’une entreprise ?

Comme d’autres entités qui s’intéressent à l’élaboration des politiques publiques, par exemple les associations de riverains ou les universités, une entreprise est habituellement un membre actif de la communauté. Par conséquent, les entreprises ne doivent pas hésiter à exprimer leur opinion dans la sphère publique, notamment en ce qui concerne les politiques publiques qui pourraient avoir un impact sur leur organisation, de la même manière qu’une association de riverains peut et doit s’exprimer sur les sujets la concernant. Quand on y pense, il n’y a pas de différence entre ces différentes parties prenantes.

De plus, la personne nommée par votre organisation pour gérer une problématique devant le public n’a pas nécessairement besoin de s’exprimer publiquement et de prendre position perpétuellement sur ce sujet. Invitez donc cette personne à ne pas s’appesantir sur le sujet.

Dans certains cas, notamment quand un sujet suscite beaucoup d’émotions et de controverses, rester sur la réserve ou se faire discret pour un temps peut se révéler une bonne approche. De plus, cela vous donne du temps, à vous et votre équipe, pour prendre du recul et analyser votre stratégie.

Pour autant, certains professionnels des RP et de la communication affirment qu’il devrait y avoir une ligne de démarcation claire entre les efforts des citoyens et ce que font les entreprises et les grandes organisations pour influer sur les politiques publiques, ce qui peut être considéré comme du lobbying.

La véritable question est de savoir si une entreprise ou une organisation doit influer sur les politiques publiques pour protéger ses intérêts si cela risque de se faire au détriment de nombreuses autres parties prenantes. En tant que professionnels des RP, avons-nous même le droit de poser cette question ?

Ceux d’entre vous qui travaillent pour des entreprises ou des organisations qui ont choisi de tenter d’influer les politiques publiques, et font de la gestion des problématiques ne devraient pas s’y prendre seuls.

Dialoguer bien en amont avec le public peut s’avérer payant quand vous présenterez votre point de vue

À FAIRE

■ Vous assurer que la personne se présentant devant le public pour exposer la position de votre organisation sur une politique publique maitrise bien son sujet et pourra répondre aux questions
■ Communiquer de manière claire dès le début – mais inutile de donner tous les détails
■ Vous souvenir que les gens ont des styles d’apprentissages différents, donc communiquez vos informations en utilisant différents supports : dépliant, infographies, commentaires sur les relais sociaux, etc.
■ Vous efforcer de présenter des informations complexes de manière claire et attrayante, mais sans perdre de vue vos objectifs

À NE PAS FAIRE

■ Essayer de tromper le public en utilisant des informations incorrectes en vous disant que vous pourrez toujours y revenir et corriger ou préciser les choses plus tard
■ Penser que vous n’aurez besoin de vous adresser au public qu’une ou deux fois. La communication dans le cadre de la gestion des problématiques lors d’une crise doit aller dans les deux sens.
■ Utiliser un porte-parole juste parce que c’est le porte-parole de votre organisation. Travaillez avec des experts sur le sujet. Un porte-parole qui semble peu fiable ou ne semble pas avoir confiance en les informations qu’il présente risquerait de desservir votre organisation.
■ Eviter les questions difficiles. Essayez d’anticiper ces questions et soyez prêt à répondre de votre mieux. Si vous ne connaissez pas la réponse à une question, dites-le et promettez d’y répondre une fois que vous vous serez renseigné.

Vous devez non seulement expliquer aux parties prenantes la position de votre entreprise, mais aussi éventuellement les convaincre de faire quelque chose, comme d’écrire une lettre de soutien, exprimer leur accord avec votre organisation lors d’une réunion du conseil municipal ou publier leur point de vue sur les réseaux sociaux.

Souvenez-vous cependant qu’il ne sert à rien d’être agressif ou dans la confrontation. Travaillez plutôt avec les parties prenantes qui sont d’accord avec votre entreprise pour qu’elles comprennent bien votre point de vue afin de le relayer. Elles devraient faire preuve d’enthousiasme et présenter de manière succincte la raison pour laquelle ils soutiennent votre organisation. Exposer des faits et les émailler de messages de soutien de différentes parties prenantes vous permettra de présenter un point de vue convaincant.

Après avoir présenté le sujet et une fois que les esprits se seront calmés, analysez les progrès effectués. Organisez une session de retour d’expérience. Étudiez les choses que vous avez apprises et si vous avez fait des avancées spectaculaires. Réglez les derniers détails, comme payer un fournisseur, écrire un rapport ou archiver les images et vidéos. Pensez-vous avoir fait des erreurs qui auraient pu être évitées ? Avez-vous remporté de belles victoires qui devraient être célébrées et partagées ?

Au bout du compte, tous les efforts déployés pour influer sur des politiques publiques et vos démarches de gestion des problématiques ne serviront à rien si votre organisation n’accepte pas de modifier sa culture d’entreprise, notamment en incluant les parties prenantes dès que possible dans vos efforts de gestion de crise. N’oubliez pas de demander leurs impressions et retours à toutes les parties prenantes, y compris celles qui n’étaient pas d’accord avec vous. Elles vous permettront de voir les choses sous un autre jour et bien souvent d’en tirer de précieux enseignements.