À l’ère du digital omniprésent, de plus en plus de PDG sortent de l’ombre pour s’exprimer directement sur les réseaux sociaux. Ils y voient un moyen d’humaniser leur entreprise et de créer un lien direct avec le public. En effet, selon une étude Sprout Social, 70% des consommateurs se sentiraient plus proches d’une marque dont le dirigeant est actif sur les réseaux sociaux. Cette tendance du CEO 2.0 offre une visibilité inédite aux patrons, mais c’est une arme à double tranchant rappelle Florian Silnicki, Expert en communication et Président Fondateur de l’agence LaFrenchCom. Car si une présence en ligne maîtrisée peut renforcer le leadership et la confiance, le moindre faux pas viral peut déclencher l’effet inverse. Un seul tweet impulsif peut faire vaciller une réputation construite sur des années, ou pire, coûter des milliards à l’entreprise – Tesla en a fait l’expérience lorsque Elon Musk a tweeté que l’action était « trop chère », effaçant 13 milliards de dollars de valorisation en quelques heures. Dès lors, comment expliquer cet engouement des PDG pour les réseaux sociaux, et quels dangers courent-ils à trop vouloir exister en ligne ?
L’illusion du leadership digital
Beaucoup de dirigeants sont convaincus qu’une forte présence en ligne fait d’eux des leaders « proches » et modernes. Il est vrai qu’à travers Twitter, LinkedIn ou Instagram, un PDG peut incarner son entreprise de façon plus directe et accessible, en humanisant son discours. Cette communication désintermédiée donne l’impression d’une relation privilégiée avec les clients, employés et investisseurs. Le public peut liker, commenter, retweeter – autant de signes ostensibles d’engagement qui flattent l’ego et confortent certains patrons dans l’idée qu’ils fédèrent une communauté autour de leur vision.
Cependant, cette proximité virtuelle peut être trompeuse. Nombre de followers ou de likes n’équivaut pas à un leadership respecté. Comme le rappelle un expert, soigner son personal branding ne se résume pas à une présence assidue sur Twitter ou à de l’autopromotion effrénée. En croyant se rapprocher du public, certains dirigeants sombrent dans l’illusion que chaque message posté renforce automatiquement leur image de leader. Or, le lien tissé en ligne reste superficiel et volatile : les foules digitales qui applaudissent un jour peuvent conspuer le lendemain. Être actif ne suffit pas, encore faut-il que la parole soit crédible et en phase avec la réalité de l’entreprise. À défaut, le réveil est brutal : ce qui se voulait une stratégie de leadership « cool » peut vite passer pour de la communication égocentrée, voire déconnectée. L’exemple du fondateur de Zomato l’illustre bien : en voulant recruter sur les réseaux sociaux avec une offre audacieuse, il a déclenché un tolé et dû rétropédaler face à la colère des internautes, exposant son manque de discernement. Un PDG hyper-connecté n’est donc pas immunisé contre les erreurs de jugement – parfois, sa surexposition les amplifie même.
Quand la parole non maîtrisée devient un poison
Sur les réseaux sociaux, la spontanéité est reine – et c’est bien le problème pour les PDG qui s’y aventurent sans filtre. Une prise de position impulsive, un tweet à chaud, peuvent se retourner en un éclair contre leur auteur. L’histoire récente regorge de dirigeants qui se sont tiré une balle dans le pied en ligne.
Le cas le plus emblématique est sans doute Elon Musk. Habitué des tweets iconoclastes, le patron de Tesla et de SpaceX a plusieurs fois provoqué le chaos par un simple message de 280 caractères. En 2018, il annonce sur Twitter vouloir retirer Tesla de la bourse avec un financement « sécurisé » – une déclaration fracassante qui lui vaudra une plainte de la SEC (gendarme boursier américain) pour fraude, tant l’affirmation était hasardeuse. En 2020, il remet ça en tweetant que le cours de Tesla est « trop élevé » : panique chez les investisseurs, le titre décroche instantanément et l’entreprise voit 13 milliards de sa valeur partir en fumée. Plus récemment, Musk a encore défrayé la chronique en sondant les internautes sur la vente de ses actions ou en multipliant les provocations politiques, au point de lasser même ses fans les plus fidèles. La leçon : l’impulsivité en ligne d’un PDG peut devenir un poison viral pour son entreprise.
Il n’y a pas que Musk. D’autres dirigeants ont payé cher un tweet malheureux. Greg Glassman, fondateur de CrossFit, a ainsi ruiné sa carrière en juin 2020 en tweetant « It’s FLOYD-19 » à propos de la mort de George Floyd, un trait d’humour douteux liant une tragédie raciale à la pandémie. La réaction a été immédiate et violente : accusé de racisme, Glassman a provoqué un tollé général. Son principal sponsor, Reebok, a aussitôt rompu son partenariat de dix ans avec CrossFit suite à ce message désastreux. En l’espace de 48 heures, le PDG a dû présenter ses excuses publiques puis démissionner de l’entreprise qu’il avait créée. Un seul tweet a suffi à briser l’image de marque patiemment construite et à faire fuir partenaires et clients.
De même, certains dirigeants n’hésitent pas à régler leurs comptes en public, au détriment de leur stature. On a vu des joutes verbales entre PDG et personnalités sur Twitter dégénérer en spectacle embarrassant. Le dirigeant d’Ola Electric en Inde, par exemple, s’est lancé dans une querelle publique avec un humoriste – résultat : incompréhension des actionnaires et plus de 7 000 crores (70 milliards de roupies) envolés de la capitalisation boursière de sa société en quelques jours. Quand le sang-froid cède la place à l’ego, la sanction ne tarde pas : bad buzz, chutes en bourse, interventions des régulateurs… La parole non maîtrisée d’un PDG est un poison violent, capable d’intoxiquer en un rien de temps la réputation de son entreprise.
Une entreprise otage de l’image de son dirigeant
Lorsqu’un PDG occupe le devant de la scène en permanence, il finit par incarner aux yeux de tous la marque qu’il dirige – pour le meilleur et surtout pour le pire. L’entreprise devient otage de la personnalité de son patron : son image publique, ses frasques comme ses combats, déteignent sur elle en bien comme en mal. Un dirigeant trop clivant fait ainsi courir un grave risque à sa société, car toute controverse personnelle va automatiquement rejaillir sur la réputation de l’entreprise et même sur sa valorisation financière.
Les marchés l’ont bien compris : la réputation du PDG est désormais considérée comme un facteur clé de la valeur d’une entreprise. D’après une étude de Weber Shandwick, jusqu’à 44% de la capitalisation d’une société serait directement attribuable à la perception de son dirigeant. Dit autrement, près de la moitié de la valeur d’une entreprise en Bourse peut dépendre de l’aura – ou des casseroles – de son PDG. 95% des analystes financiers admettent même que la réputation du patron influence leurs décisions d’investissement. Ce pouvoir d’incarnation devient problématique quand l’image du leader se détériore : il entraine l’entreprise dans sa chute, tel un boulet accroché à sa cheville.
Les exemples abondent. Chez Papa John’s, chaîne de pizzas américaine indissociable de son fondateur emblématique, un scandale impliquant ce dernier a provoqué un effondrement du cours en Bourse de 13% tandis que le principal concurrent gagnait 48% sur la même période. En une conférence téléphonique mal maîtrisée, le PDG-fondateur John Schnatter a fait perdre 96 millions de dollars de valeur à son entreprise en quelques heures, illustrant tragiquement à quel point la marque était prisonnière de son nom. Plus près de nous, l’image d’Uber a longtemps été indissociable de celle de Travis Kalanick, son cofondateur au tempérament explosif. Les dérapages à répétition de ce dernier (culture d’entreprise toxique, altercations filmées, commentaires déplacés) ont fini par gravement ternir la réputation d’Uber, au point que les actionnaires ont exigé son départ pour sauver l’entreprise du naufrage. Là encore, la société a subi les contrecoups de la personnalité ingérable de son dirigeant.
Mais c’est sans doute Tesla qui illustre le mieux ce phénomène d’otage. La réussite de la marque californienne est fortement liée à l’aura de Musk, mais l’inverse est tout aussi vrai : chaque polémique entourant le fantasque PDG rejaillit sur Tesla. Fin 2022, alors que Musk s’éparpille à racheter Twitter et à enchaîner les provocations en ligne, les investisseurs de Tesla tirent la sonnette d’alarme. L’action chute à son plus bas niveau en deux ans, et même les fans du visionnaire commencent à s’impatienter en l’accusant d’avoir « abandonné Tesla ». L’un des plus gros actionnaires individuels – jusque-là admirateur déclaré de Musk – fulmine publiquement que Tesla « n’a plus de PDG qui travaille » et qu’il faudrait un leader à la Tim Cook, plus sobre et concentré. Cette fronde inédite montre bien que quand l’image du PDG vacille, c’est toute la confiance dans l’entreprise qui vacille avec. La marque, otage des frasques de son chef, subit un discrédit que même de bons résultats commerciaux ne compensent plus. En somme, la dépendance excessive à un leader expose l’entreprise à ses moindres débordements : ce qui arrive à la personne arrive à la marque.
Le risque d’érosion de la crédibilité
À force de vouloir trop en faire sur les réseaux, un PDG hyperactif peut finir par lasser son auditoire et semer le doute. La surcommunication engendre une véritable érosion de crédibilité. Comment ? D’abord par saturation : à l’ère de l’infobésité, bombardé de publications incessantes, le public finit par ne plus prêter attention. Comme le souligne une agence de communication de crise, trop communiquer peut « saturer votre audience, rendant votre message indistinct et diluant votre crédibilité ». Un dirigeant qui commente tout, tout le temps, perd en impact – ses prises de parole, trop fréquentes, deviennent du bruit de fond.
Ensuite vient le scepticisme. À force de voir un PDG occuper le terrain médiatique, stakeholders et observateurs peuvent s’interroger : pourquoi tant de communication ? Que cherche-t-il à prouver ou à cacher ? Une présence excessive peut éveiller la méfiance quant à la sincérité du dirigeant. Par exemple, lorsqu’un patron annonce chaque jour des nouvelles révolutionnaires sur Twitter sans que les résultats suivent, les parties prenantes finissent par douter de ses promesses. Les marchés apprennent à se méfier des effets d’annonce non suivis d’effet. Les clients peuvent, eux, ressentir une dissonance si le storytelling quotidien ne correspond pas à leur expérience réelle de la marque.
Enfin, le pire danger est la crise de confiance. À force de contradictions ou d’approximations tweetées, le PDG décrédibilise sa parole officielle. Si un jour il doit rassurer en cas de vraie crise, qui le croira ? Un exemple marquant a été la valse-hésitation de certains dirigeants face aux réactions en ligne : le PDG de Zomato, évoqué plus haut, a dû plusieurs fois corriger publiquement ses décisions suite au tollé des réseaux sociaux. À trop vouloir réagir à chaud, il a donné l’image d’un management erratique, influençable, sans cap stable – de quoi ébranler durablement la confiance dans la gouvernance de l’entreprise. Comme on le voit, la surcommunication peut se retourner contre le dirigeant et son entreprise en provoquant trois maux insidieux :
- Lassitude du public – l’audience, saturée de messages, n’écoute plus.
- Scepticisme généralisé – à force de paroles, on finit par douter de leur sincérité.
- Perte de confiance – la voix du PDG n’est plus prise au sérieux, même quand c’est crucial.
Ironiquement, celui qui voulait être entendu de tous finit par ne plus convaincre grand monde. Un PDG doit donc garder mesure en toute chose, y compris dans sa communication : parfois, moins, c’est mieux pour rester crédible.
L’effet miroir sur les employés et investisseurs
La surexposition du PDG sur les réseaux sociaux n’impacte pas que le grand public : en interne aussi, le reflet peut être déformant. Les employés, d’abord, vivent en direct les frasques de leur patron en ligne. Que se passe-t-il quand ils constatent que leur PDG enchaîne les polémiques sur Twitter ? Le climat de travail peut en souffrir.
Pour les employés. Un dirigeant qui attire sans cesse la controverse publique risque de créer un environnement anxiogène en interne. Les collaborateurs peuvent se sentir mal à l’aise, voire honteux, d’être associés à une entreprise dont le leader se fait épingler en ligne. Récemment, des employés de SpaceX ont dénoncé ouvertement le comportement embarrassant d’Elon Musk sur Twitter, le qualifiant de source de gêne pour l’entreprise dans une lettre publique – ils ont été licenciés dans la foulée, déclenchant une plainte pour licenciement abusif. Cet épisode illustre le malaise que peut ressentir le personnel face à un PDG trop fantasque : oser critiquer ouvertement son patron est rarissime, signe que le ras-le-bol était profond. De même, lorsque Musk a publiquement ridiculisé sur Twitter un de ses employés handicapés de Twitter qui s’inquiétait d’avoir été licencié, cela a envoyé un signal glaçant à tous ses salariés : leur propre PDG pouvait les attaquer personnellement en place publique. Une telle attitude ne peut que miner la confiance en interne, instaurant un climat de peur et de ressentiment. Les meilleurs talents risquent de quitter le navire, refusant de cautionner ce leadership toxique, et la motivation des troupes en prend un coup. À l’inverse, une réputation positive du PDG peut être un atout pour mobiliser les salariés – mais si cette réputation vire au négatif en ligne, l’effet miroir joue contre l’entreprise en interne.
Pour les investisseurs. Du côté des actionnaires et du marché, un PDG qui fait le spectacle sur les réseaux sociaux peut rapidement faire figure de risque plus que d’atout. Les investisseurs n’aiment rien moins que l’instabilité et l’imprévisibilité. Or, un dirigeant trop présent en ligne, qui plus est de manière clivante, introduit de l’incertitude quant à la gouvernance de l’entreprise. Les sorties hasardeuses peuvent attirer l’attention des régulateurs (on l’a vu avec la SEC dans le cas Musk), générer des amendes ou des enquêtes, bref, autant de distractions coûteuses. Surtout, les marchés sanctionnent la mauvaise communication : on l’a vu, les dérapages de PDG font chuter les cours en Bourse. À l’inverse, même sans incident majeur, une activité débordante sur les réseaux peut donner l’impression que le patron n’a pas les yeux sur le volant. Quand Musk passait ses journées à tweeter après le rachat de Twitter, beaucoup d’actionnaires de Tesla ont craint qu’il délaisse la gestion de son entreprise automobile – et effectivement, l’action Tesla a dévissé tant la confiance était entamée. Certains grands investisseurs, auparavant indulgents, sont allés jusqu’à réclamer publiquement un changement de cap, estimant que l’entreprise ne pouvait plus prospérer sous la tutelle d’un PDG dispersé et polarisant.
Plus globalement, la perception des marchés est de plus en plus sensible à la personnalité du dirigeant. Dans un monde ultratransparent, le moindre tweet orageux peut faire perdre des millions à la capitalisation. Les analystes intègrent désormais le facteur PDG dans leurs modèles de risque. Si ce facteur vire au rouge (PDG controversé, en guerre sur Twitter, etc.), la recommandation d’investissement peut vite basculer du côté vendeur. À l’inverse, un PDG trop silencieux n’est pas pénalisé par le marché, bien au contraire – la discrétion, synonyme de sérieux, rassure. Les investisseurs n’attendent pas d’un patron qu’il soit influenceur, mais qu’il dirige son entreprise avec constance. Lorsque l’agitation en ligne du PDG prend le pas sur sa mission première, la confiance se délite autant en interne qu’en externe.
Quand la parole du PDG éclipse la marque elle-même
À force de surexposition, un autre danger guette : que le dirigeant finisse par éclipser sa propre marque. Le culte de la personnalité version 2.0 est un piège subtil. Certes, un patron charismatique peut attirer la lumière et donner un visage humain à une entreprise souvent perçue comme froide ou distante. Mais quand cette personnalisation devient extrême, l’identité de la marque se confond totalement avec celle du PDG – au point que l’entreprise ne semble plus exister sans lui.
Les conséquences négatives sont multiples. D’une part, la marque ne jouit plus d’une image indépendante. Toutes les communications corporate, tous les faits et gestes de l’entreprise passent par le prisme du dirigeant-star. Cela peut brouiller le message de la marque, surtout si le PDG a ses lubies personnelles ou un style très singulier. On l’a vu avec Tesla : la communication de l’entreprise est régulièrement parasitée par les opinions et saillies d’Elon Musk sur des sujets allant de la cryptomonnaie à la politique, qui n’ont parfois qu’un lien ténu avec les voitures électriques. Ce brouillage fait que, pour une part du public, acheter une Tesla est devenu autant un statement sur Musk qu’un choix produit. Comme le soulignait un investisseur de la marque, « les clients ne veulent pas que leur voiture soit source de controverse, ils veulent en être fiers, pas en avoir honte ». Quand le PDG prend trop de place, il peut ainsi dissuader une partie de la clientèle qui rejette sa personne, indépendamment des qualités du produit. La parole du patron sur Twitter a alors plus d’impact sur la décision d’achat que la publicité officielle – ce qui est vertigineux.
D’autre part, si le PDG omniprésent dérape ou chute, c’est toute la marque qui plonge avec lui. Le risque réputationnel atteint son comble : l’entreprise n’a plus aucune distance de sécurité pour se protéger. On l’a vu avec CrossFit : l’image de cette entreprise de fitness était très liée à Greg Glassman et à ses valeurs. Son faux pas sur Twitter a instantanément sali la marque aux yeux du monde, malgré les tentatives du reste de l’équipe pour s’en distinguer. De même, Papa John’s a peiné à dissocier son identité de celle de son fondateur après son scandale raciste – quand la personne porte le nom de la marque, la tâche est quasiment impossible. Plus généralement, une forte marque personnelle au sommet peut faire de l’ombre à la marque corporate au point de la fragiliser : si demain cette figure tutélaire s’en va, que reste-t-il ? Certains experts en marketing alertent sur ce point : un personal branding trop poussé peut éclipser la marque de l’entreprise, qui se retrouve sans identité propre une fois le leader parti. Le cas Apple est souvent cité en contre-exemple positif : Steve Jobs était un PDG emblématique, mais il a su construire un univers de marque qui lui survivrait. À l’opposé, d’autres entreprises très liées à un fondateur charismatique (WeWork avec Adam Neumann, ou certaines startups à « gourou » médiatique) ont vu leur valorisation s’effondrer lorsque le leader a été évincé, faute d’une image de marque autonome et résiliente.
En somme, la personnalisation à outrance du leadership comporte un double danger : aliéner une partie du public qui ne se reconnaît pas dans le PDG, et rendre la marque vulnérable aux aléas de la vie personnelle ou de l’humeur de ce dirigeant. Quand la parole du PDG occupe tout l’espace médiatique, elle finit par faire de l’ombre à l’entreprise elle-même – au détriment de cette dernière.
Visibilité ne rime pas toujours avec efficacité – et silence n’est pas synonyme d’absence. Comme nous l’avons exploré, un PDG hyper-actif sur les réseaux sociaux joue avec le feu : s’il peut y trouver un écho favorable et humaniser son image, il risque tout autant de fragiliser la crédibilité et la stabilité de son entreprise. Entre l’illusion de proximité qui peut aveugler, les gaffes publiques aux conséquences démultipliées, la réputation du dirigeant qui engloutit celle de la marque, la confiance interne et externe qui vacille, les écueils sont nombreux. Pour un dirigeant, apprendre à doser sa communication digitale est devenu aussi important que de savoir prendre la parole. Il s’agit de trouver un équilibre subtil entre présence et retenue.
Tous les messages n’ont pas vocation à être tweetés, tous les moments ne se partagent pas en live, et toutes les opinions personnelles d’un PDG ne méritent pas d’être érigées en position officielle de l’entreprise. Comme dans un orchestre, les silences font partie de la musique : un temps de pause dans la communication peut éviter bien des fausses notes. Savoir se taire, parfois, c’est faire preuve de leadership. D’ailleurs, les experts en gestion de crise le rappellent : « Savoir quand parler est crucial, mais savoir quand se taire est tout aussi essentiel ». Un bon PDG digital doit donc connaître ses limites, réfléchir avant de poster, et se rappeler que sa parole publique engage bien plus que son ego – elle engage la destinée de son entreprise. En définitive, à l’ère des réseaux sociaux rois, le véritable leader n’est pas celui qui fait le plus de bruit en ligne, mais celui qui sait choisir ses batailles médiatiques. Garder le silence au bon moment peut éviter de crier victoire trop tôt… ou d’avoir à gérer des défaites cuisantes. La prudence et l’authenticité demeurent les meilleures alliées du PDG pour naviguer dans l’arène tumultueuse des réseaux sociaux sans naufrager son entreprise.