Astreinte de crise 24h/24 7j/7

Twitter, ce tribunal impitoyable de l’opinion publique ?

Question :

« Le conseiller en communication de crise est un maître ès catastrophes médiatiques et catastrophes digitales. Il est chargé de concevoir l’opération déminage pour protéger l’image et la réputation de son client englué dans une crise. Peut-on vraiment se battre contre twitter et défendre nos clients efficacement sur ce réseau social où ne règnent que des haters ? »

Réponse :

Se défendre efficacement sur les réseaux sociaux mérite une réflexion, intéressante, à mener autour de la crise digitale de manière générale. D’abord, à nos yeux, il n’y a jamais de raison de ne pas se défendre. Seuls les combats qui ne sont pas menés sont perdus définitivement. Nous ne renonçons jamais à défendre les intérêts d’image et la réputation de nos clients. C’est aujourd’hui un des actifs les plus valorisés des organisations. La réputation et l’image de marque méritent qu’on se batte pour elles. Elles méritent mieux que des déserteurs.

Twitter n’est-il qu’un théâtre numérique de règlements de comptes permanents ? Twitter n’est-il qu’un défouloir infernal des passions tristes de l’humain ? Peut-être. Mais Twitter est d’abord un réseau social qui obéit à des règles propres qu’il faut comprendre et respecter. Twitter obéit à des codes sociaux sur lesquelles le conseiller en communication de crise peut s’appuyer pour faire levier et permettre à son client d’imposer efficacement ses messages dans l’opinion publique face à ceux de ses concurrents malveillants.

Nous avons la conviction que, jamais, la présence du conseiller en communication de crise n’a été si précieuse alors que Twitter a marqué, depuis longtemps, sa nette préférence pour le devoir de juger et de punir à la présomption d’innocence et à la bienveillance reconnaissant à chaque être humain un droit naturel à l’erreur.

Twitter n’est pas un réseau social aimable. Tout est scandale. Tout est polémique. Tout est choquant. Tout est badbuzz. Tout est stigmatisé. Tout est dénoncé. Tout est insulté. Tout est surtout surjoué ! Mais existe-t-il un réseau social bienveillant ?

La loi énumère de nombreux droits et des devoirs, les réseaux sociaux comme Twitter sont censés s’y soumettre. Personne ne devrait faire quelque chose qui est interdit dans la vie IRL, sur Twitter. Pourtant, ses utilisateurs ont tendance à ignorer le droit sur Twitter au motif d’un anonymat ou d’un pseudonymat qui ne les protègent pourtant ni d’une identification par les services de police ni d’une condamnation par la justice. C’est sans doute là que réside une difficulté majeure. La justice est (très – trop?) lente à rendre ses décisions. Les réseaux sociaux viennent soudainement et brutalement enterrer des images et des réputations. Cela donne un travail monstrueux aux spécialistes du nettoyage de réputation sur internet. Nous ne nous en réjouissons pas, en pensant au nombre de vies humaines brisées, qu’il y a derrière ces réputations malmenées.

Les réseaux sociaux comme Twitter ont largement contribué à renouveler les usages militants et activistes d’une nouvelles démocratie politique. C’était attendu. C’est une saine évolution dont la communication politique s’est évidemment emparée. Le pouvoir d’influencer politiquement a été largement repartager, la capacité de soutenir une réforme ou de contrer une décision politique a été rendue accessible au plus grand nombre. Le pouvoir de juger l’a suivi. On ne juge plus devant son canapé en commentant un fait divers dont on ne sait rien si ce n’est ce que le reportage télévisé en dit. On commente en direct sur Twitter par des publications lapidaires au détriment de la présomption d’innocence, du secret de l’instruction, du droit à l’oubli, etc… A l’image d’internet, Twitter n’oublie pas. Ses publications sont référencées avec une grande force sur Google, Bing, etc… Sa mémoire est éternelle. Les problèmes durables d’image et de réputation posées par les publications qui figurent sur Twitter sont innombrables. Que diront-vos enfants et petits-enfants quand ils accéderont à une publication rédigée quand vous aviez 16 ans sur Twitter ? Comment jugeront-ils ces publications de vous, enfant, et des scandales qu’elles ont suscités, avec leur regard, leurs connaissances et leurs critères de jugements qui seront nécessairement très différents des nôtres aujourd’hui.

Les conseillers en gestion de crise, doivent, pendant les crises, assurer la défense de leurs clients, y compris sur twitter qui a largement contribué à hystériser l’actualité et les débats légitimes qu’elle peut susciter. Twitter a aussi largement décomplexé les haters qui chassent en meute. Leurs publications doivent systématiquement être combattues et discréditées avant d’être effacées et déréférencées. Ne rien lâcher.

On le voit quotidiennement dans notre rôle de conseillers en communication sous contrainte judiciaire, en accompagnant les clients des avocats : les attaques publiées sur Twitter lors des affaires judiciaires sont forcément hésitantes et toujours irritantes pour nos clients qui sont présumés innocents et non encore jugés définitivement. Si Twitter était un humain, il serait un accusateur constant, un procureur virulent, sous les cieux des égos totalitaires des membres qui le composent et l’animent.

Les conseillers en communication de crise, assurant notamment la communication des avocats, y déploient quotidiennement des mécanismes de contre-influence visant à casser les bulles accusatrices artificielles par des milliers de faux tweets et à anéantir les effets des attaques contre l’image de marque et la réputation des entreprises de leurs clients et de leurs dirigeants.

Sur ces réseaux sociaux, la stratégie de communication efficace est celle qui est à la fois humaine, empathique et transparente. Chacun peut sans doute accepter qu’on lui rappelle ses propres fautes sur Twitter pour atténuer celles de ceux qu’elle accuse mais cela ne fait qu’alimenter une spirale vicieuse d’attaques dont précisément, le conseiller en communication de crise doit faire sortir son client.

Combien Twitter a-t-il à connaître de démonstrations véhémentes et rigoureuses sur tous les sujets de la part de pseudo spécialistes ! Et, pourtant, c’est toujours à peu près en vain, elles sont aussi vite proclamées de manière arrogante que démenties froidement.

Non que les règlements de comptes qui se déroulent sur les réseaux sociaux comme Twitter soient sans valeur, non que ces attaques ne disent pas quelque chose de la société, mais la vie, la vraie, est ailleurs. La valeur de nos clients également.

Ces attaques ont une fonction intimidante pour ceux qui en sont à l’origine. Mais toujours, le conseiller en communication de crise doit rappeler à son client que ces attaques, qu’on ne rencontre d’ailleurs jamais dans la rue, sont une bulle, violente certes, mais qu’elle peut être combattue pour disparaitre demain. Et que la vie doit reprendre. Parce qu’elle prime sur ces attaques.

Ne pas le dire serait accepter de se taire face à la construction de ces attaques de plus en plus fictives et artificielle. Une société libre n’est pas la société factice de Twitter. Ne plus défendre nos clients qui font face à la crise sur Twitter au prétexte de sa violence, reviendrait à abdiquer. Nous ne n’y résoudrons pas en tant qu’agence de communication de crise.