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Dirigeants : les nouvelles exigences des entreprises

Concernant les Dirigeants, quid des nouvelles exigences des entreprises en matière de communication de crise et de gestion de crise ?

Ce marché si particulier du recrutement des dirigeants permet-il de déceler de nouvelles tendances avec la crise sanitaire du covid19 ? Sur le dernier trimestre, l’ambiance a été morose. Les vannes se sont toutefois rouvertes en janvier. Les dirigeants ont à nouveau contactés les cabinets de recrutement des dirigeants. Il est évident que le remplacement d’un dirigeant ne se budgète pas, c’est toujours un événement conjoncturel pour l’entreprise.

Il y a toujours, même en période de crise, du turn-over sur ces fonctions de direction générale, ce qui assure un bon volume d’activité aux cabinets de recrutement de dirigeants. Les candidats sont de plus en plus impliqués dans l’évolution du secteur d’activité de leur entreprise. C’est pour cela qu’ils souhaitent, dans les grands groupes, que leur candidature soit mise en perspective, et que les intervenants dans la procédure de recrutement leur parlent du job + 2 ou du job + 3 et d’une certaine mobilité fonctionnelle, la partie technique notamment sur la gestion de crise et la communication de crise des candidatures se renforce mais avec une forte orientation business. On voit ces définitions de postes évoluer donc vers des responsabilités plus larges.

Des entreprises attentistes ?

Les entreprises ne disparaissent pas de manière massive depuis un an, ce qui est quand même une nouveauté par rapport aux crises précédentes. Le nombre de dirigeants à recruter est stable aussi.

Aujourd’hui, tous les cabinets de recrutement ont formulé de nombreuses propositions. Les entreprises ne prennent pas de décision, mais elles ne les rejettent pas pour autant. Au contraire, elles les accueillent, elles ne les enfouissent pas sous une pile d’offres déjà parvenues. Elles attendent le moment favorable pour sortir et aller sur le marché. Certains auraient tendance à dire aux entreprises de ne pas trop tarder, parce que la France se rapproche d’une sortie de crise qui est déjà présente aux Etats-Unis. Le jour où il faudra se battre pour faire signer un candidat en concurrence sur plusieurs postes à la fois, cela va être difficile. On s’achemine lentement et sûrement vers une pénurie de cadres dirigeants, et il est évident que les meilleurs partiront les premiers. Le marché des dirigeants est ouvert, en fait, à beaucoup plus de candidats qu’on ne l’imagine de l’extérieur.

Savoir diriger et investir MAIS AUSSI SAVOIR COMMUNIQUER ET MANAGER LA CRISE

Qu’en est-il du recrutement des directeurs généraux, des membres des comités de direction et des comités exécutifs, et les experts dont la rémunération est supérieure à 150 000 euros annuels ?

Quand des entreprises souhaitent investir ou racheter une entreprise, elles ne trouvent pas toujours la solution managériale à l’intérieur de leurs structures. Elles demandent alors à des cabinets de trouver à l’extérieur, pour réaliser cette opération de « management buy in » (MBI), les personnes capables à la fois de diriger et d’investir. Leur implication, qui peut se traduire par des plus-values potentielles pour l’entreprise, doit être forte.

À propos de l’évolution des profils de dirigeants, il faut noter un changement au niveau des directions de filiales. L’européanisation des structures internationales fait que le pouvoir s’est déplacé maintenant dans les sièges sociaux européens. Des personnes qui prenaient autrefois en charge une filiale française avaient en main la totalité du pouvoir. Aujourd’hui, elles ne sont plus que des directeurs commerciaux et marketing. Il y a une aspiration de l’Europe, les vrais dirigeants ont donc envie d’avoir des responsabilités au niveau européen. C’est là qu’est le pouvoir, et non plus dans des filiales qui ne sont plus que des entreprises de commercialisation. Il y a un changement de profil, mais aussi de motivation.

Manager de crise : Homme de maturité ou de compétence ?

Les jeunes entrepreneurs de la nouvelle économie ont pris, pour la plupart, une volée de bois vert. Certains ont pu s’enrichir et sont partis dans les projets les plus divers. Il en reste donc encore un bon nombre à l’abri du besoin et prêts à se lancer dans de nouvelles aventures. Le point fondamental, depuis quelques mois, dès avant septembre dernier d’ailleurs, est que la demande de dirigeants s’oriente plutôt vers des hommes d’expérience, très clairement, pour les managers d’entreprise et pour leur staff. On va maintenant chercher des hommes de maturité, et non plus seulement de compétence. On répond même parfois aux jeunes managers brillants qui se présentent qu’ils n’ont pas assez de cheveux gris.

Un dirigeant sachant communiquer est indispensable à l’entreprise et on ne peut différer son recrutement. On observe une tendance lourde dans les profils les plus recherchés : des dirigeants capables de gérer le changement, sachant communiquer, sachant gérer une crise et les transformations, pour évoluer de plus en plus dans des contextes rendus extrêmement complexes, que ce soit par la dimension internationale, l’exigence des actionnaires, l’évolution des marchés, des technologies. Les entreprises recherchent des transformateurs pour la conduite de ces changements.

Le dirigeant est d’abord un généraliste, même s’il possède toujours une vraie technicité liée à son expérience antérieure, qu’elle soit communicationnelle, financière, ressources humaines, industrielle, marketing ou commerciale. Il doit être capable d’intégrer un champ très large, être ouvert à la finance même s’il est commercial, aux clients même s’il est financier, etc.

Vers une stratégie globale et durable d’entreprise ?

Qui recherche des dirigeants aujourd’hui ? Ce sont d’abord des équipes de direction qui veulent sélectionner des partenaires dans une vision déjà établie. Les clients les plus actifs sont ceux qui ont développé et soutenu une stratégie de moyenne et de longue durée. Tous les marchés d’opportunisme ont recherché des dirigeants pour attaquer de nouveaux marchés ou gérer un mouvement qui tombait quasiment du ciel. Maintenant, on veut des dirigeants capables d’apporter une plus-value dans l’organisation et le mode de management.

Donc, les candidats répondent mais le plus souvent à une vraie stratégie d’entreprise. C’est pour cela que des recrutements se préparent, pour orienter les opérations et le mouvement des forces de vente. Sur la question de savoir qui s’estime dirigeant, les écarts sont de plus en plus grands et le recrutement de dirigeants de plus en plus difficile. Il faut discerner, derrière les titres, les parcours, les CV très honorifiques, et les belles écoles, la qualité réelle des hommes et des femmes qui savent s’investir avec intelligence.

On est beaucoup moins dans la standardisation qu’on a pu l’être. On recherche des gens qui ont affronté une diversité d’expériences, d’adversité, et qui ont donc une maturité, sachant que, s’il y a une qualité qui émerge aujourd’hui, c’est la capacité à prendre du recul. Il devient primordial de savoir mettre en perspective et faire le tri. Il faut sentir et prendre en compte les évolutions. Il n’y a que la maturité et un certain capital d’expérience qui donne ces dispositions. Moins de standardisation donne toute sa place à l’analyse du besoin, et aux moyens de s’intégrer dans l’entreprise, en apportant ce qui, dans l’équation personnelle du dirigeant, est adéquat avec celle de l’entreprise. On demande aux dirigeants d’avoir la capacité de gérer la complexité et le paradoxe, et les crises qui font partie des réalités de l’entreprise.

Sur cette culture du paradoxe, dans cette période du stop and go, il faut corriger une image : aujourd’hui on recrute des dirigeants dans l’objectif d’anticiper, de gérer la complexité de la sortie de crise sanitaire. Mais sur le terrain et d’emblée, on leur demande beaucoup de court terme. Et ils doivent aussi apporter des résultats, surtout dans les entreprises cotées en Bourse. A celles qui ont les yeux fixés sur la Bourse, on leur demande des résultats immédiats. Pour ce qui est de la fidélisation, nous sommes entrés, depuis dix ans, dans une ère de l’infidélité. Les cadres ne le sont pas à leurs entreprises, et vont là où est leur intérêt, différemment compris suivant les cas. Cela peut être l’intérêt du cadre de vie, et pas seulement le salaire. Les programmes de fidélisation me paraissent, à ce titre, souvent difficiles à tenir.

Maîtrise de l’anglais et des cultures étrangères

D’autre part, le bon patron et bon stratège va être jeté dans un grand malaise si, recruté sur ses qualités de manager, on lui demande d’emblée de faire du chiffre avant la fin de l’année, et de gagner 10, 15, voire 25 % de résultats. Dans ce cas, justement, il lui faudra appliquer une stratégie de très court terme, et on peut se demander si le mot stratégie a encore un sens. Enfin, dans ce marché, l’âge a de moins en moins d’importance, à condition que le salaire soit en relation avec les espérances budgétaires de l’entreprise qui recrute.

En matière de salaire des dirigeants, en ce moment, on peut descendre très bas, et on peut monter haut, à condition que la personnalité colle avec les intérêts de l’entreprise. Enfin, malgré tout, on est encore face à une lacune, parce que les générations montantes ne sont pas encore là, celles qui maîtrisent la langue anglaise. Il y a une forte amélioration, mais beaucoup de candidats ne sont pas encore au niveau de ce qu’espèrent les entreprises obligées de communiquer avec l’étranger, qu’elles soient spécifiquement hexagonales ou pas, quand ce ne sont pas des entreprises étrangères elles-mêmes. L’anglais reste une préoccupation, les générations qui ont été formées à l’anglais ne sont pas encore en cours d’accession aux postes de dirigeants.

La préoccupation de l’anglais ne s’estompe pas. Ce qui est nouveau, c’est de prendre connaissance dans le cahier des charges du désir d’embaucher des personnalités de nationalité ou de culture étrangères, pour absolument figurer et agir sur le marché international. Les doubles nationalités sont très demandées.

La maîtrise de l’anglais est fondamentale, parce que cette compétence correspond à une culture et une éducation bien particulières. Pour les start-up, il est très souvent demandé des personnalités qui maîtrisent très bien l’anglais, et ces entreprises souhaitent des dirigeants plutôt jeunes pour ne pas créer d’écarts générationnels. A posteriori il est apparu que toutes ces personnalités avaient une expertise du management de croissance, mais face à la crise, ces personnalités ont eu quelques soucis. Les dirigeants sont aujourd’hui intéressés par des profils ayant bien réagi dans des situations de forte tension.

Coller à la méthode de l’entreprise

De ce point de vue, on s’américanise un peu. Une aventure entrepreneuriale, même soldée par un échec dans l’entreprise précédente, peut s’avérer valorisante. Surtout, pour apprendre le management de crise, il faut être passé par là.

La propension à se retrousser les manches, à savoir commander une photocopieuse qui se situe dans le couloir, alors qu’auparavant, ce candidat dirigeait une équipe très structurée. C’était justement la difficulté de ce type de recrutement puisque autrefois on invoquait des qualités de loyauté, de fidélité, d’adhésion à la culture de l’entreprise. Chaque structure impose des critères assez particuliers.

On en revient à la stratégie qui est déclinée, dans certains groupes, par des valeurs spécifiques. Ceux-ci retiennent les candidats qui rentrent dans ces méthodes. D’autre part, ils ont une priorité qui est de respecter le parcours scolaire de leurs enfants. Quand les enfants sont au lycée, ils ne font pas déménager la famille.

Le dirigeant généralement âgé de plus de 45 ans, accepte la mobilité, mais seulement pour lui. C’est-à-dire qu’il va où il faut pour continuer sa carrière, mais la famille reste en place. C’est un mouvement qui se renforce très largement. La scolarité des enfants est leur préoccupation n 1. Le TGV a rendu beaucoup de services.

Beaucoup de dirigeants n’auraient jamais choisi d’affectation en province, s’ils n’avaient pas ce moyen de rallier Paris en une, deux ou trois heures. Ils décernent des étoiles en fonction de cet éloignement. Il y a en revanche, une réticence croissante des entreprises employeuses potentielles envers les dirigeants qui ne déménagent pas. Elles souhaitent que le dirigeant s’installe sur place, ce qui a une implication importante pour des PME et des usines qui emploient beaucoup de personnel local.

Aujourd’hui, dans un couple de cadres dirigeants, le problème à traiter est de savoir quel est celui ou celle qui sacrifiera plus ou moins sa carrière au bénéfice de l’autre.

C’est trop souvent la femme, mais pour une seule raison : elle tient à consacrer plus de temps à l’éducation de ses enfants que l’homme, d’une manière générale. Tant que le dilemme n’est pas tranché, dans une vie de couple, les mobilités sont quasiment impossibles à organiser. Heureusement les choses changent.