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Dans une crise, faut-il assurer ses responsabilités ?

crise Thomas Keller

Étude de cas : assumer ses responsabilités

La lettre ouverte du chef cuisinier Thomas Keller en réponse à un article très critique du New York Times (NYT) sur son restaurant Per Se à Manhattan est un exemple à suivre.

En général, les chefs réagissent très mal quand ils sont égratignés par les critiques gastronomiques. Mais ce n’est pas ce qu’a fait Thomas Keller. Il a assumé les erreurs, rappelé les valeurs en lesquelles il croyait et promis d’ajuster le tir.

Les lettres de ce type sont des cas d’école pour la gestion de crise et de réputation. Il a défini son objectif, puis laissé le vocabulaire et le ton utilisés faire le travail.

Analysons sa lettre du point de vue d’un consultant en communication de crise. Pourquoi a-t-il dit certaines choses et comment sommes-nous censés réagir ?

« À l’attention de nos hôtes : »

C’est une tournure sympathique, qui donne l’impression au lecteur qu’il est invité à participer à une conversation privée. Si la lettre avait été adressée directement au critique gastronomique du NYT, Pete Wells, cela aurait semblé plus agressif.

« Dans tous nos restaurants, dans nos cuisines et en salles, nous faisons tous nos effortspour vous assurer la meilleure expérience possible. »

Cela signale que Thomas Keller applique la même approche dans tous ses restaurants. L’objectif est que vous passiez un très bon moment.

« Nous considérons que c’est notre responsabilité que chacun de nos hôtes soit parfaitement traité. »

Il vous informe que, conformément à sa philosophie, son équipe s’occupe de vous au restaurant comme elle le ferait si vous étiez leur invité chez eux.

« Nous voulons absolument nous améliorer chaque jour. Nous réexaminons constamment nos pratiques, notre menu et nos services ».

Il vous rassure sur le fait que lui et son équipe recherchent toujours des moyens d’améliorer les choses et de mieux vous servir.

« Malheureusement, il arrive que nous ne soyons pas à la hauteur de nos exigences. Le fait que le diner de Pete Wells, le critique gastronomique du New York Times, à Per Se n’ait pas été à la hauteur de ses attentes et des nôtres est une grosse déception pour moi et mon équipe. Nous sommes fiers de nos exigences, mais parfois nous faisons des erreurs. Nous sommes désolés de vous avoir déçu. »

Il est attristé de ne pas avoir été à la hauteur des exigences non seulement de Peter Wells, mais aussi des siennes. C’est difficile d’en vouloir à quelqu’un qui reconnait ne pas avoir été à la hauteur et qui se dit déçu de lui-même.

«Nous ne nous contenterons pas de cela. Nous sommes persuadés de pouvoir faire mieux pour nous et pour nos hôtes. Nous avons les atouts, la motivation et l’enthousiasme nécessaires pour y parvenir. Quand on est déçu, on travaille encore plus dur. Nous sommes persuadés que la prochaine fois que vous vous rendrez au Per Se ou dans un autre de nos restaurants, notre équipe s’assurera que vous passiez un excellent moment. »

C’est le message qu’il veut communiquer : qu’il veut encore et toujours s’améliorer. Cela oriente les choses tout en douceur vers une image plus positive.

Vous vous êtes déjà rendu dans un de ses restaurants ? Ça vous a plu ? Ça ne vous a pas plu ? Dans les deux cas, il veut que vous sachiez que la prochaine fois, ce sera encore mieux.

Les mots sont-ils importants ? Le ton employé compte-t-il ? Absolument. Trouver le vocabulaire et le ton adaptés peut prendre des heures, parfois des jours. Il faut toujours plusieurs versions et de nombreuses révisions.

Il y a eu un laps de temps de deux semaines entre la publication de la critique dans le NYT et la réponse de Thomas Keller. Dans ce cas précis, une réponse immédiate n’était pas indispensable. Mais il fallait que sa lettre (probablement écrite par son équipe de communication en l’occurrence) tombe juste.

La leçon à retenir de communication de crise : assumez. Vous aurez de meilleures chances d’atteindre votre objectif.