Pourquoi est-il essentiel d’avoir un plan de communication de crise ?

plan

La réalité incontournable des crises

Les crises sont une constante, non pas une éventualité. Peu importe la taille ou le secteur d’une organisation, elle sera un jour confrontée à une situation qui menace son fonctionnement, sa réputation ou sa pérennité. Qu’il s’agisse de cyberattaques, de scandales externes ou de fraudes internes, de catastrophes naturelles ou encore de crises sanitaires comme la pandémie de COVID-19, les entreprises modernes évoluent dans un environnement où l’imprévu est la règle, non l’exception.

Dans ce contexte, un plan de communication de crise est bien plus qu’un document ; c’est une stratégie de survie. Sans préparation adéquate, une organisation risque non seulement de subir des pertes financières et opérationnelles, mais aussi de compromettre durablement sa réputation et la confiance de ses parties prenantes. Pour paraphraser Warren Buffett : « Il faut 20 ans pour construire une réputation et cinq minutes pour la détruire. Si vous pensez à cela, vous ferez les choses différemment. »

1. La communication de crise : entre réaction et anticipation

Définition et rôle d’un plan de communication de crise

Un plan de communication de crise est un cadre structuré destiné à guider une organisation dans sa réponse aux situations critiques. Il comprend des outils, des protocoles, et des messages préétablis pour communiquer efficacement avec les différentes parties prenantes – employés, clients, médias, autorités et public. Contrairement à une réaction improvisée, ce plan repose sur l’anticipation et permet une réponse coordonnée, rapide et cohérente.

La clé ici est l’anticipation. Peter Drucker, célèbre théoricien du management, a écrit : « La meilleure façon de prédire l’avenir est de le créer. » Un plan de communication de crise ne peut pas empêcher les crises, mais il peut atténuer leurs impacts et, parfois, transformer une menace en opportunité.

2. Les enjeux d’un monde hyperconnecté et médiatisé

La vitesse de l’information dans un monde numérique

Nous vivons à l’ère des réseaux sociaux et des cycles d’information de 24 heures. Une crise mineure peut devenir un scandale international en quelques heures. Prenons l’exemple de United Airlines en 2017, lorsqu’un passager a été violemment expulsé d’un vol surbooké. Une vidéo prise par un témoin est devenue virale, entraînant une crise de réputation majeure pour la compagnie. Le manque de préparation et les réponses maladroites de l’entreprise ont amplifié la crise, faisant plonger son action en bourse de 4 %, soit une perte de près d’un milliard de dollars en une journée.

Un plan de communication de crise aurait permis à United Airlines de réagir rapidement et de manière appropriée, évitant une grande partie des retombées négatives. L’échec à répondre en temps voulu est souvent perçu comme un manque de transparence ou de responsabilité.

L’attente de transparence et de responsabilité

Les consommateurs et les parties prenantes exigent aujourd’hui une transparence totale. Un sondage réalisé par Edelman Trust Barometer (2023) révèle que 60 % des individus cessent d’acheter les produits d’une entreprise qu’ils perçoivent comme non éthique ou opaque. La communication de crise devient alors un levier de reconquête de la confiance.

3. Les bénéfices concrets d’un plan de communication de crise

A. Réduction des impacts financiers et opérationnels

Un plan de communication bien conçu permet de limiter les pertes directes et indirectes liées à une crise. Prenons l’exemple de Johnson & Johnson lors de la crise du Tylenol en 1982. Lorsque sept personnes sont mortes après avoir consommé des capsules contaminées par du cyanure, l’entreprise aurait pu sombrer. Mais grâce à une gestion exemplaire de la communication de crise – rappel des produits, campagne de sensibilisation transparente, et innovation dans le conditionnement sécurisé – Johnson & Johnson a non seulement sauvé sa marque, mais aussi renforcé la confiance du public.

Les pertes initiales, bien qu’importantes, ont été rapidement compensées par le retour en force de la marque, qui a démontré son engagement envers la sécurité de ses consommateurs.

B. Préservation de la réputation et de la crédibilité

Une réputation se construit sur des années d’efforts mais peut être détruite en un instant, comme l’a souligné Buffett. L’absence d’un plan de communication de crise mène souvent à des erreurs fatales, telles que des messages contradictoires ou des délais de réponse excessifs.

Prenons l’exemple de BP lors de la catastrophe environnementale du Deepwater Horizon en 2010. La gestion initiale de la crise par l’entreprise a été marquée par des réponses maladroites, un manque d’empathie et une minimisation de la gravité de la situation. En conséquence, BP est devenu un symbole d’irresponsabilité environnementale, et sa réputation a mis des années à se reconstruire.

C. Coordination et cohérence dans les réponses

Un plan de communication de crise assure une synchronisation entre les différentes parties prenantes internes. En cas de crise, la coordination des directions des fonctions support – marketing, RH, juridique, communication – est essentielle pour garantir des réponses alignées.

D. Maintien de la confiance des employés et des clients

Les employés sont souvent les premiers touchés par une crise. Une communication claire, empathique et proactive envers eux réduit les tensions internes et renforce leur engagement. À l’externe, les clients sont rassurés par une réponse rapide et professionnelle.

4. Le plan de communication de crise : une structure essentielle

Un plan efficace comprend les éléments suivants :

  1. Identification des scénarios de crise probables : Quels types de crises sont les plus susceptibles d’affecter l’organisation ?
  2. Définition des rôles et responsabilités : Qui sont les porte-parole ? Quelles sont leurs tâches spécifiques ?
  3. Établissement de protocoles de communication : Quels canaux utiliser ? Quelle est la hiérarchie décisionnelle ?
  4. Création de messages clés : Quels sont les messages préconçus pour répondre aux préoccupations courantes des parties prenantes ?
  5. Simulations et formations régulières : Comment préparer les équipes à réagir en conditions réelles ?

5. Leçons tirées des crises historiques

La crise d’Enron (2001)

L’échec complet d’Enron à gérer la crise de son effondrement financier et de ses scandales de corruption est devenu un cas d’école sur ce qu’il ne faut pas faire. Non seulement l’entreprise a manqué de transparence, mais elle a aussi ignoré l’importance de maintenir une communication ouverte avec ses parties prenantes.

La gestion de la pandémie de COVID-19 par certaines entreprises

La pandémie a révélé des disparités frappantes dans la préparation des organisations. Les entreprises disposant de plans de gestion de crise robustes ont mieux géré la transition vers le travail à distance, la continuité des opérations et la communication avec leurs employés et clients.

6. Les auteurs et théories en soutien

Plusieurs théoriciens et experts soutiennent l’importance d’une planification stratégique en communication de crise :

  • W. Timothy Coombs, dans son ouvrage Ongoing Crisis Communication: Planning, Managing, and Responding, met en avant l’importance de la préparation et de la capacité à répondre rapidement pour minimiser l’impact des crises. Il insiste sur le fait qu’un plan de communication de crise n’est pas seulement un outil défensif, mais un élément stratégique clé pour protéger les parties prenantes.
  • Edward Bernays, souvent considéré comme le père des relations publiques modernes, a souligné que la perception du public est souvent plus importante que les faits eux-mêmes. Cela illustre pourquoi un plan de communication de crise doit inclure des efforts pour influencer positivement cette perception.

7. Les conséquences de l’absence d’un plan

Sans plan de communication de crise, une organisation risque :

  • Une amplification des impacts négatifs : Des rumeurs non maîtrisées et des informations contradictoires peuvent empirer la situation.
  • Une perte de confiance des parties prenantes : Le silence ou une réponse tardive peut être perçu comme un aveu de culpabilité.
  • Des coûts financiers majeurs : Retards, pertes de clients, poursuites judiciaires et baisse des actions en bourse sont autant de risques liés à une mauvaise gestion.
  • Un désengagement des employés : Les collaborateurs qui se sentent mal informés ou non soutenus peuvent quitter l’entreprise ou nuire à sa réputation.

L’impossible improvisation

Un plan de communication de crise est l’équivalent d’un gilet de sauvetage : il est inutile de l’improviser lorsqu’on est déjà en train de couler. À travers les leçons de l’histoire et les théories contemporaines, il est clair que les organisations qui planifient leur communication de crise sont mieux préparées à protéger leurs intérêts, maintenir leur réputation et assurer leur pérennité.

En somme, la question n’est pas de savoir si une crise surviendra, mais quand. Comme le disait Benjamin Franklin : « En ne vous préparant pas, vous vous préparez à échouer. »