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Directive européenne 2022 sur le devoir de vigilance des entreprises : quelle incidence en matière de risques ?

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Instituée le 28 novembre 2022, la Directive européenne concernant le devoir de vigilance des entreprises marque un tournant majeur dans les responsabilités sociales des entreprises (RSE) en Europe. Initialement limitée à la « soft law », le concept de devoir de vigilance a été intégré à la législation française en 2017 et fait désormais partie du droit européen. Cette évolution législative, très attendue, promeut une éthique d’entreprise plus rigoureuse et encourage la responsabilité sociale des entreprises.

L’application de la Directive n’est pas limitée aux entreprises européennes, mais s’étend aussi aux entreprises étrangères opérant en Europe. De plus, elle possède une portée extraterritoriale, s’appliquant non seulement aux entreprises européennes mais aussi à leurs fournisseurs, avec pour objectif de créer une uniformisation des meilleures pratiques en prenant en compte l’ensemble de la chaîne de valeur.

Les entreprises doivent désormais identifier, gérer et rapporter les risques environnementaux et sociaux liés à leurs activités et leur modèle économique. En plus d’offrir une plus grande transparence aux consommateurs, cela crée une base de concurrence équitable au niveau européen.

Bien que la loi française était déjà solide sur ces questions, la Directive européenne va encore plus loin, s’appliquant à toutes les relations de l’entreprise, pas seulement aux filiales et aux sous-traitants. Les secteurs de l’industrie textile, de l’industrie extractive et de l’agriculture sont particulièrement ciblés par la Directive.

Il est important de noter que l’adoption de ces nouvelles réglementations engendre des coûts pour les entreprises, en termes de formation et de mise en place de services dédiés. En cas de non-conformité, des sanctions financières peuvent être infligées par les autorités administratives nationales désignées par les États membres.

Cependant, la Directive offre également une opportunité pour les entreprises. En se conformant aux obligations et engagements sociaux, les entreprises peuvent transformer ces contraintes en un avantage concurrentiel. Tout comme les entreprises de l’UE qui se sont conformées à la protection des données, celles qui respectent les obligations de la Directive sur le devoir de vigilance peuvent devenir des partenaires dignes de confiance, bénéficiant d’un avantage concurrentiel sur les marchés émergents.

La Directive définit notamment cinq obligations principales pour les entreprises :

  • Identifier les impacts négatifs potentiels de leurs activités et mettre en œuvre les mesures nécessaires pour les atténuer.
  • Publier chaque année un rapport public transparent sur le respect des obligations de vigilance de l’entreprise.
  • Mettre en place un mécanisme d’alerte accessible à l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
  • Déclarer leurs engagements en matière de réduction des émissions de CO2 pour les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 150 millions d’euros.
  • Se conformer à la Directive avant le 27 novembre 2025, soit trois ans après son entrée en vigueur.

Enfin, il est essentiel pour les entreprises d’examiner de près leur chaîne de valeur, surtout si celle-ci est très dispersée. Le déclencheur incriminant peut souvent provenir d’un fournisseur de rang deux ou trois. Par conséquent, l’évaluation rigoureuse des pratiques de tous les fournisseurs et partenaires est un élément clé pour minimiser les risques.

Un autre point d’attention concerne les parties qui auront le droit d’intenter une action en justice en vertu de la Directive. Une victime, une organisation de la société civile, un syndicat ou une autre personne morale pourra introduire un recours au nom de la victime.

Malgré ces nouvelles obligations, il est important pour les entreprises de garder à l’esprit que le respect de la loi n’est pas toujours suffisant pour éviter une crise. Par exemple, une entreprise qui respecte actuellement la loi peut avoir un passé moins exemplaire. Les changements de gouvernance et l’évolution des pratiques ne font pas disparaître le passé, et des problèmes antérieurs peuvent resurgir. De plus, certaines entreprises étrangères peuvent utiliser la loi pour affaiblir la position de leurs concurrents européens. Ainsi, la vigilance doit rester une priorité.

L’application de la Directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises représente donc à la fois un défi et une opportunité pour les entreprises. En naviguant avec soin à travers ces nouvelles réglementations, les entreprises peuvent non seulement éviter des sanctions, mais aussi renforcer leur position concurrentielle en devenant des acteurs plus responsables et respectueux sur le marché.